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[Théâtre] Eugénie Anselin joue les « Sales Gosses » au Centaure


Un sacré challenge pour Eugénie Anselin, dirigée dans ce projet par Fábio Godinho et accompagnée par le musicien et chanteur Jorge De Moura. (photo DR/Bohumil Kostohryz)

C’est une pièce étonnante que présente le théâtre du Centaure pour lancer sa saison 2018/2019.

Le drame scolaire et familial Sales Gosses, de Mihaela Michailov, propose à une seule comédienne de jouer tout un éventail de personnages : une petite fille un peu trop tête en l’air pour être bonne élève, une maîtresse dont jamais personne n’a jamais eu à se plaindre, une mère qui n’a rien contre l’idée qu’on mette une bonne gifle à sa fille – à condition que ce soit elle qui le fasse – mais aussi un petit groupe de plus ou moins bons élèves, un narrateur, etc. Un sacré challenge pour Eugénie Anselin, dirigée dans ce projet par Fábio Godinho et accompagnée par le musicien et chanteur Jorge De Moura.

Dans un décor abstrait, très linéaire, fait de nombreux élastiques qui délimitent l’espace de haut en bas, la comédienne, sans jamais quitter la scène ni changer de vêtements, évolue, change, se mue, plonge tel un caméléon dans les divers personnages. Une posture plus droite, un regard plus sérieux, une voix plus posée suffisent pour expliquer au public qu’elle vient de changer de personnage. C’est fait avec finesse mais on ne peut plus explicitement, d’une manière qui n’est pas sans faire sourire, parfois même rire, malgré le drame qui, très vite, se joue sur scène.

Un drame né d’un moment de folie collective, diront certains, d’une grave négligence de la part d’une enseignante, penseront d’autres, à moins que ce ne soit de la violence sous-jacente à tout type de relation sociale. Car ce jour-là, la petite fille n’écoutait pas l’enseignante, trop absorbée à faire de petits personnages avec des élastiques.

La maîtresse s’énerve, le ton monte. «Tu veux que je t’attache ?», lance l’adulte. «Faites», lui répond la jeune fille, un peu comme on dirait : «Pas cap !» Ligotée, les mains dans le dos, la petite finira exhibée dans l’école avant que certains de ses camarades, un peu par jalousie, un peu par méchanceté, un peu aussi par jeu, décident d’en profiter pour la torturer et poster, ensuite, la vidéo de leurs sévices sur la toile !

Réflexion actuelle

Alors, la question se pose : à qui la faute ? Aux enfants ? À la maîtresse ? À l’école ? À la société ? Une question qui restera sans réponse.

Magnifiquement mise en scène, riche de ses ambiances sonores changeantes, de son décor évolutif et de sa comédienne qui se donne corps et âme, la pièce est un coup de poing. Un coup fort. Un coup lourd. Comme les énormes poids d’acier qui retiennent les élastiques du décor. À force de voir la comédienne suggérer, seule, les sévices qu’elle s’inflige à elle-même, mais dans la peau de deux personnages différents, la pièce en devient même, par moments, désagréable. On a sincèrement, à plusieurs reprises, mal pour elle.

Un texte fort, une adaptation tranchante et une réflexion pertinente et actuelle. La saison du Centaure ne pouvait commencer de meilleure manière !

Pablo Chimienti

Ce samedi à 20h. Dimanche à 18h30.
Jusqu’au 24 octobre.

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