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« Queen and country », le retour du vétéran (Vidéo)


Dix-sept ans après « Hope and Glory », John Boorman renoue les fils de sa jeunesse.

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« Queen and country » est la « suite » de « Hope and Glory », où le jeune garçon du premier opus est devenu militaire, sur fond de fin de guerre en Corée. (Photo : DR)

Vingt ans après l’évocation de son enfance dans un Londres pilonné par le Blitz, le réalisateur britannique John Boorman renoue avec la veine intimiste et autobiographique et retrace son entrée dans la vie adulte, dans un film au charme lumineux, qui sera peut-être son dernier. Queen and Country démarre par l’image des écoliers remerciant Adolf Hitler d’avoir bombardé leur école, un des passages les plus mémorables de Hope and Glory (1987). Le visage d’un des garçonnets se fond dans celui d’un jeune homme de 19 ans.

Nous sommes en 1952, Bill vit toujours avec ses parents dans une maison idyllique sur une île au milieu de la Tamise, à proximité des studios de Shepperton. Il est appelé pour le service militaire, avec le risque d’être envoyé en Corée. Il a donc fallu dix-sept ans pour que John Boorman, 82 ans dans quelques jours, renoue les fils de sa propre histoire, et porte à l’écran ses premiers émois amoureux et sa passion naissante pour le cinéma. « Les personnages de Queen and Country sont basés sur des personnes qui ont existé. J’aurais eu du mal à le faire plus tôt. J’ai décidé d’attendre qu’ils soient tous bel et bien morts », explique le réalisateur.

« Je n’avais pas eu ce problème avec Hope and Glory car ce film retraçait surtout l’histoire de ma famille, à laquelle j’avais fait lire le script. » Dans cette « suite », Bill (Callum Turner, oreilles décollées et timidité charmante) est un jeune soldat, instructeur dans un camp militaire, flanqué d’un copain de chambrée, Percy (Caleb Landry Jones), véritable grenade dégoupillée dont les coups fumants sèment le chaos dans le baraquement.

> Une caméra qui s’arrête

Les deux jeunes gens nouent connaissance en échangeant des répliques des grands films de l’époque. « Tout le monde allait alors au cinéma au moins une fois par semaine. Nous avions une vie parallèle, enracinée dans les films », se souvient le réalisateur, passionné et grand connaisseur du 7e art. Le jeune Bill tombe alors amoureux d’une mystérieuse blonde, rencontrée dans un concert classique, et retrouve sa famille lors des permissions : la mère, le père, le grand-père autoritaire et la sœur aînée, farfelue et émancipée, revenue du Canada où elle avait suivi un soldat rencontré pendant la guerre, dans le premier film.

Pour le couronnement d’Elizabeth II, en juin 1953, tous se retrouvent autour du poste de télévision acheté pour l’occasion. Le film excelle à dépeindre cette décennie entre-deux, coincée entre les privations de la guerre et l’explosion des « sixties » : la fin d’un empire auquel croient encore la hiérarchie militaire et la vieille génération, mais qui n’a plus aucun sens pour les plus jeunes. Lorsqu’il a tourné ces deux films autobiographiques, John Boorman dit n’avoir ressenti « aucune nostalgie ». « J’ai l’impression de raconter la vie de quelqu’un d’autre », dit-il. Seules les scènes évoquant l’infidélité de sa mère avec un voisin – rappelée dans Queen and Country lorsque la mère salue ce voisin – le troublent encore.

Cette histoire « a eu une immense influence sur moi. En ne disant rien à mon père, j’avais l’impression de le trahir. Mais si je lui avais dit, j’aurais trahi ma mère ». Et de souligner que Le point de non retour (avec Lee Marvin, 1967) et Excalibur (1981) sont eux aussi des histoires de trahison conjugale par une épouse. Hope and Glory reste le film auquel il est le plus attaché « car il parle de ma famille ». Mais Delivrance, chef d’œuvre lyrique et terrifiant de 1972, est « un film complètement abouti, où je n’ai pas envie de changer une scène », contrairement à d’autres de ses long-métrages, selon ses termes.

Quant au Point de non retour, début d’une collaboration fructueuse avec Lee Marvin, il se souvient de l’avoir tourné « en état de grâce ». Queen and Country s’achève sur l’image d’une caméra qui s’arrête. Pour symboliser l’intention du cinéaste de cesser de faire des films. Mais quelques mois après la fin du tournage, il se prend « à rêver d’une nouvelle histoire », toujours dans la veine autobiographique, indique encore le Britannique. Ses premiers pas à Hollywood, ou la jeunesse de sa mère et ses tantes pendant la Première Guerre mondiale.

Le Quotidien

Utopia (Luxembourg), avant-première ce soir à 19h. Sortie officielle mercredi.

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