Ils sont jeunes et ambitieux : trois Luxembourgeois ont fait pousser un jardin communautaire et bio à Luxembourg! Découverte du projet «Terra».
Pour l’agriculteur, le ciel est un allié précieux… et capricieux. Trop de pluie, c’est la noyade. Trop peu, c’est la sécheresse.
Mais Marko ne se fait pas de bile. «Ici, la terre est sablonneuse, donc le drainage est bon, on arrive à gérer les fortes pluies des derniers mois. À l’inverse, en cas de sécheresse, on a un système d’irrigation goutte à goutte, par gravité, très efficace. L’agriculture résiliente, c’est ça : avoir la capacité de survivre, même avec de mauvaises conditions climatiques.»
Nous sommes dans un havre de verdure, sur les hauteurs de Mühlenbach, rue Eicherfeld. Un de ces coins qui nous semblent tellement éloignés des trépidations du centre-ville, pourtant si proche. Là, sur un hectare et demi, trois jeunes Luxembourgeois ont fait un pari : se lancer dans l’agriculture biologique.
Autrement dit, trois aventuriers des temps modernes! Car l’agriculture n’attire pas la jeunesse actuelle, encore moins celle bio. Mais Marko, Pit et Sophie sont confiants : «Ça cartonne. Les 200 paniers qu’on fait chaque semaine partent comme des petits pains», poursuit Marko.
Pit a étudié le maraîchage, Sophie, l’agroécologie, et Marko, l’intégration écologico-sociale. L’idée d’un jardin communautaire est plantée en 2012 : «On a passé quelques mois à mettre le projet sur papier, on a sondé nos réseaux pour savoir s’il y avait une demande pour des produits frais, de saison, bios… et on s’est rendu compte que oui, ça pouvait être économiquement viable. Même sans subsides, qu’on a refusés.»
Cela a surpris certains d’ailleurs… «On voulait montrer qu’on peut s’en passer et qu’on peut se verser un salaire, alors même que notre exploitation est petite. Si petite qu’on n’est même pas considérés comme des exploitants agricoles!»
Et pour le terrain, coup de bol, une dame souhaitant louer son verger est séduite par leur projet. «Et son loyer, ce sont nos paniers de légumes!»
C’est ainsi qu’en 2014, Terra est créé (pour Transition and Education for a Resilient and Regenerative Agriculture). Et ce n’est effectivement pas une ferme comme les autres. «On ne vend pas au kilo. On a des membres qui paient environ 670 euros pour recevoir un panier différent toutes les semaines pendant la saison agricole» (soit un peu moins d’une année).
Ce système d’agriculture soutenue par la communauté (ASC) évite le gaspillage, facilite la planification de la production et évite les coûteux intermédiaires des circuits de distribution classiques.
Une agriculture régénératrice
Dans les paniers, en ce moment, on trouve tomates, aubergines, poivrons, concombres, melons, herbes aromatiques, et même des pastèques, grâce à trois serres. L’exploitation accueille des variétés traditionnelles d’arbres fruitiers, entre lesquels serpentent des rangées de légumes, d’herbes et de fleurs, qui vivent en symbiose : «Ici, fleurs, insectes et cultures sont ensemble, comme une petite forêt. C’est le contraire de la monoculture, c’est un écosystème naturel.» «On ne fait que du bio. Cela va même au-delà. On est en train d’établir une agriculture régénératrice, qui améliore le sol. On fait des rotations de culture de huit ans pour permettre au sol de se régénérer, on utilise des biofertilisants…»
Et on y croise même des canards! «La raison de leur présence est écologique. Ils mangent les limaces et donnent en bonus des œufs et du fertilisant quand ils se « promènent » dans les cultures.»
Notre discussion est interrompue lorsqu’un habitant du coin arrive avec sa remorque chargée de fumier. «C’est du fumier de cheval. De première qualité», rit-il. Il l’apporte à la coopérative qui valorise ainsi ce fertilisant local. Terra cultive ainsi le maigre lien entre la société et son agriculture. Des ateliers pédagogiques sont organisés pour les enfants, et le dernier dimanche du mois, des rencontres conviviales sont organisées, explique Sophie : «C’est l’Open-Sunday. C’est une activité pratique, les gens s’unissent pour faire ensemble une activité de saison dans les champs». Marko : «C’est génial, les enfants s’éclatent dans la nature, les grands-mères nous donnent leurs recettes. C’est intergénérationnel… Rien que pour ça, ça vaut le coup.»
Romain Van Dyck
De Paris à Luxembourg
Les créateurs de Terra peuvent aussi compter sur des bras supplémentaires : «On a des apprentis, des voisins qui viennent bénévolement, des participants au woofing (NDLR : réseau international où les gens peuvent aller travailler dans des fermes où ils reçoivent logement et alimentation), des volontaires européens…», explique Marko. On rencontre justement Léo Groult (photo). Ce Parisien a fait une école de commerce internationale. «Je suis arrivé par hasard au Luxembourg, grâce au service volontaire européen. Deux fois par semaine, je viens travailler 6 heures ici. Enfin, ce n’est pas du travail, je viens avec plaisir. Je fais de tout et j’apprends beaucoup : préparer le terrain, semer, élaguer…» Léo avoue ne pas encore savoir quoi faire professionnellement. «Mais j’ai toujours rêvé d’avoir une ferme pédagogique avec des animaux. Créer son jardin, être autonome, je trouve ça génial.»
Bonjour Marc,
TERRA n’est non seulement une ASC (agriculture soutenue par la communauté), amis aussi une coopérative. A travers le capital qui entre par l’achat de parts sociales des coopérateurs, TERRA réussit à investir dans des structures nécessaires comme des serres. Ceci nous a permis d’investir sans avoir recours à des subsides, subventions ou prêts bancaires.
Bravo les jeunes ! Tout n’est pas perdu, il y a toujours un moyen de régénérer l’agriculure
Très beau projet, je leurs souhaite que du succès pour le futur! Juste une question; en sachant que les serres coûtes assez chères, comment ont-ils pu en construire 3 sans même demander des aides financières?