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Le revival de Creedence


C’est Jeff Bridges qui commente le documentaire «Travelin’Band : Creedence Clearwater Revival at the Royal Albert Hall». (photo DR)

Si cela fait cinquante ans que Creedence Clearwater Revival s’est séparé, le groupe américain, l’un des plus grands du rock, refait l’actualité à travers un album «retrouvé» et un documentaire d’époque.

De Creedence et son rock-blues à toute épreuve, on retient des images, gravées dans la rétine par le cinéma : les scènes ariennes en plein Vietnam dans Forrest Gump et Apocalypse Now, où les bombardements se font au son de Fortunate Son. Et surtout les errances du Big Lebowski, film des frères Cohen de 1998 devenu culte, avec son personnage «traine savate» qui fume des joints avec une pince à épiler et passe son temps à la salle de bowling.

Sur le parking, sa voiture miteuse avec, plantée dans l’autoradio, sa seule richesse : une cassette de CCR avec les titres Lookin’ Out My Back Door et Run Through the Jungle. De quoi taper des mains sur le volant, avaler quelques kilomètres de bitume et laisser les galères loin derrière.

C’est justement Jeff Bridges, le fameux «Dude» dans le film, qui commente le documentaire Travelin’Band : Creedence Clearwater Revival at the Royal Albert Hall. Sorti fin septembre aux États-Unis sur Netflix, il développe une histoire sommaire du groupe tout en le suivant lors de sa première et dernière tournée à l’étranger. Dans le lot, d’inédites images d’archives (dont celles tournées par la BBC pour une émission qui n’a finalement jamais été diffusée).

Avec en prime, la performance dans sa totalité d’un de leurs deux concerts à guichets fermés, donnés au Royal Albert Hall, la célèbre salle londonienne. Un «live» daté du 14 avril 1970 qui n’avait jamais été montré jusqu’à aujourd’hui, et qui entretenait, de loin, la légende du quatuor, alors à son apogée.

«Creedence, yeah, man !»

Réalisé par Bob Smeaton (The Beatles Anthology et Hendrix : Band of Gypsys), le documentaire bénéficie donc du soutien d’un des fans inconditionnels du groupe. Jeff Bridges a tenu quand même à le préciser dans un communiqué : «J’adore les écouter ! C’est sans doute mon groupe préféré. Creedence, yeah, man !».

Seul hic à cette résurrection, le film n’est toujours pas sorti en Europe (en dehors de la Grande-Bretagne) et Netflix reste muet sur le sujet. Néanmoins, il y a toujours moyen de se consoler avec l’album dudit concert, réédité par Craft Recordings pour l’occasion. Un objet qui, lui aussi, a failli ne jamais se faire entendre, perdu qu’il était dans les limbes discographiques. Bien malgré lui.

En effet, à l’automne 1980, les fans de Creedence Clearwater Revival (et les fidèles du rock en général) avaient déjà célébré la sortie de The Royal Albert Hall Concert, premier album live officiel de la formation. Sauf que ce n’était pas celui-là… L’enregistrement était en réalité celui d’un show donné la veille du nouvel an 1970 à Oakland, en Californie. Une erreur d’étiquetage apparemment… Le disque allait être rapidement retiré des ventes, pour réapparaître plus tard sous le titre The Concert. Qu’à cela ne tienne : le bon concert du Royal Albert Hall, retrouvé récemment et restauré, est désormais disponible.

15 minutes de standing ovation

En douze chansons courant sur 42 minutes, le groupe californien montre tout son savoir-faire et qu’il est bien l’un des phénomènes de l’histoire du rock. Rappelons qu’entre 1968 et leur séparation en octobre 1972, il a sorti consécutivement neuf singles classés dans le top 10 et six albums devenus disques de platine (dont trois sortis en 1969, deux en 1970). De quoi ravir la place de numéro 1 occupée par les Beatles qui, ça ne s’invente pas, se sont séparés quatre jours avant, sous l’impulsion de Paul McCartney. Mais aucune prétention chez Creedence : devant 5 000 spectateurs, ils vont dérouler un set magistral, rigoureux et puissant, prouvant qu’ils préfèrent toujours la scène au studio.

CCR enchaîne sans respirer ses classiques aux inspirations rock, country et blues – Born on the Bayou, Green River, Fortunate Son, Proud Mary… – sous les applaudissements nourris. Il n’est pas là pour faire le spectacle ou amuser la galerie. N’empêche ! Le public, pas forcément habitué à une telle démonstration de force, va être soufflé. Stu Cook (basse) et Tom Fogerty (guitare) font le travail alors que Doug Clifford chauffe sa batterie. Évidemment, la voix et le jeu de John Fogerty occupent tout le devant de la scène, hargneux et ensorcelant.

Ce que le disque ne montre pas, contrairement au documentaire, c’est que les quatre membres de CCR se tiennent serrés les uns contre les autres, comme s’ils jouaient dans le bar du coin et non dans une salle gigantesque. Peut-être pour se protéger de la standing ovation de fin qui, paraîtrait-il, a duré un bon quart d’heure. Juste avant cela, et d’entamer la dernière chanson, l’intense Keep on Chooglin’, le guitariste-chanteur, d’un ton délicat, quasi gêné, avait lancé : «Merci beaucoup de nous avoir reçus à Londres.» C’était deuxième fois qu’il s’adressait au public au cours du spectacle. Honnête et entier jusqu’au bout. Le «Dude» appréciera.

At the Royal Albert Hallde Creedence Clearwater Revival.

 

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