Depuis deux ans qu’il tourne, le groupe français Feu! Chatterton n’était pas encore passé par le Luxembourg. C’est chose faite depuis jeudi soir et un concert incandescent à la Rockhall d’Esch-sur-Alzette.
Nous avions laissé Feu! Chatterton à une soirée provençale, en plein festival d’Avignon, lors d’une lecture de L’Amour et les Forêts par son auteur Éric Reinhardt, mise en musique par le groupe phénomène de la scène française. Le talent était là, vibrant, au milieu du Musée Calvet.
Feu! Chatterton, ce sont « cinq cadavres incandescents pour vous servir », selon Arthur Teboul, leur chanteur et parolier. Cadavres bien vivants, à en juger par leur performance sur la scène du Club de la Rockhall. Ils se sont rodés sur toutes les scènes de France, en première partie de Fauve! et maintenant en solo. Cela se voit, la soirée était bien brûlante, sous le haut fourneau de Belval.
Jusqu’à l’orgasme Malinche
Alors quand le show s’ouvre sur Ophélie, tout est déjà là : deux guitares, une batterie, une basse et la voix puissante d’Arthur Teboul. Surtout, l’album Ici le Jour (a tout enseveli) est revisité avec un désir qui émoustille le public. Arthur Teboul, en Monsieur Loyal du groupe, introduit un à un les morceaux, joue avec le public, provoque un peu par son arrogance héritée du poète anglais Thomas Chatterton. Il y a beaucoup de pose, dans son attitude de dandy, et c’est ce qui séduit et fait rougir les filles.
La suite ? Le Pont Marie, puis le sublime Côte Concorde et le grandiose À l’Aube. Les chansons s’enchainent sans se presser, à un rythme qui hypnotise, langoureux. Avec un album et un EP à jouer, la matière est rare mais chaque seconde est précieuse, bien menée, entre rock, blues et samples bien choisis.
Bien sûr, le public attend La Malinche, l’imparable tube qui a lancé Feu! Chatterton. Et les petits farceurs incandescents choisissent de le jouer à la fin du rappel, dans une version de près de dix minutes qui s’aventure du côté de l’électro rock pour mieux revenir aux riffs de guitare. Un orgasme partagé avec la salle.
En première partie de Feu! Chatterton, pour continuer à décliner l’abécédaire de la nouvelle chanson française, une inconnue, Fishbach. Seule en scène, avec une bande son pour l’accompagner, la jeune Française en impose et c’est peu de le dire. Avec son corps tout en raideurs, sa voix haute et puissante et son regard assassin, elle capte tout de suite l’attention d’un public parfois volage, quand il attend l’affiche du concert. En quelques morceaux, entre new wave et électro pop, elle a bluffé une Rockhall qui ne s’attendait pas à une telle expérience, à la fois douce et SM, forte et fragile. Petit poisson deviendra grand.
Christophe Chohin