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En Chine, les mangeurs de chien défendent ardemment leur fête


Plus de 10 000 canidés sont généralement abattus lors de l'événement, dans des conditions dénoncées par les défenseurs des animaux. (photo AFP)

Des carcasses jaunies sur les étals, du chien en ragoût ou sauté… La plus célèbre fête de viande canine de Chine battait son plein mercredi malgré des velléités d’interdiction. Et avec des habitants bien résolus à défendre leurs traditions.

Cet événement gastronomique a lieu tous les ans dans la ville de Yulin (sud de la Chine) lors du solstice d’été le 21 juin. Elle suscite immanquablement un tollé à l’international et même en Chine. L’association américaine Humane Society International (HSI) avait affirmé le mois dernier que les autorités chinoises interdiraient toute vente de viande de chien durant cette édition 2017. Mais mercredi, à Yulin, des bouchers débitaient des morceaux de viande canine et la faisaient revenir dans des woks. Et des vendeurs exposaient des carcasses jaunes de chiens fraîchement abattus et dépecés, aux queues raidies et aux crocs saillants.

Chez M. Yang, un restaurateur, les clients commandent des nouilles de riz au petit-déjeuner, mais exigent du chien à midi. « Pendant la fête, nos ventes sont multipliées par neuf. Et rassurez-vous, on arrive toujours à avoir assez de chiens », argue-t-il, espérant en vendre six par jour durant l’événement. Selon des associations de défense des animaux, les autorités auraient finalement trouvé un compromis avec les vendeurs, autorisant ceux-ci à placer deux carcasses par étal. Mais certains marchands semblaient avoir largement dépassé ce quota.

Battus à mort ou ébouillantés vivants

Plus de 10 000 canidés sont généralement abattus lors de l’événement, dans des conditions dénoncées par les défenseurs des animaux : certains chiens sont battus à mort, voire ébouillantés vivants.

De nombreux policiers étaient postés mercredi à l’extérieur du principal marché canin de Yulin pour éviter tout débordement. Mais pour les gens de la ville, manger du chien fait tout simplement partie des traditions. Wu San, un habitant quadragénaire, brûle au chalumeau les derniers poils de la carcasse d’un canidé. C’est un ami qui lui a donné cet ex-chien de garde : il voulait se débarrasser de l’animal car « trop habitué aux gens, il n’aboyait plus », raconte-t-il. « Nous le mangerons ce soir avec des copains », affirme M. Wu, qui explique qu’il faut trois heures pour tuer et préparer un chien.

Selon Liu Zhong, le patron d’une échoppe d’herbes médicinales, même si la police surveille « de très près » l’activité au marché canin, les commerçants vendent du chien sous le manteau, à leur domicile ou ailleurs. « C’est juste un peu plus discret » que l’an passé, déclare M. Liu, qui ne consomme plus de viande canine depuis dix ans et possède désormais sept chiens comme animaux de compagnie. Certains patrons de restaurants ont par ailleurs modifié leurs enseignes, effaçant l’inscription « viande de chien » pour celle plus sobre de « viande savoureuse ». Une gargote a également recouvert d’un papier jaune le caractère chinois pour « chien ».

« Ce que les gens mangent, ça les regarde »

Selon Humane Society International, les ventes ont connu une « baisse significative ». « Le combat contre cette fête (…) est fait de petites victoires comme celle-ci et il est important de reconnaître les progrès quand il y en a », a affirmé la porte-parole de l’organisation Wendy Higgins. Entre 10 et 20 millions de canidés sont tués chaque année en Chine pour être mangés, selon HSI. La consommation de chien n’y est pas illégale, mais reste extrêmement minoritaire et suscite une opposition croissante.

Mais pour Li Yongwei, un habitant de Yulin, manger de la viande canine n’a rien de spécial. « Quelle est la différence entre du chien, du poulet, du bœuf ou du porc ? », demande-t-il. « Cela fait partie de la culture locale. On ne peut pas imposer des choix aux gens. Comme vous n’allez pas forcer quelqu’un à être chrétien, bouddhiste ou musulman. Ce que les gens mangent, ça les regarde. »

Chen Bing, un employé de bureau de 25 ans, affirme lui que les autorités ne pourront jamais empêcher la tenue de la fête. « Les jeunes, les vieux, même les bébés mangent du chien ici. C’est la tradition. Yulin n’a aucune spécialité locale. C’est cette fête qui rend notre ville spéciale. »

Le Quotidien/AFP