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« Eldorado », un film étonnant sur les Portugais du Luxembourg


Rui Abreu, Thierry Besseling et Loïc Tanson, les trois réalisateurs du film. (photo DR / luxfilmfest.lu)

Eldorado, le documentaire de Rui Abreu, Loïc Tanson et Thierry Besseling sur les Portugais du Luxembourg, est enfin à l’écran. Un film à découvrir.

Eldorado , du trio Rui Abreu, Loïc Tanson et Thierry Besseling, est un film étonnant. Un documentaire sur l’immigration portugaise au Grand-Duché qui suit pendant plusieurs années quatre personnages.

Les cinéastes offrent des témoignages surprenants, des doutes sincères, des espoirs, quelques images incroyables – dans la classe, par exemple  – et s’offrent aussi quelques fantaisies lyriques qui donnent à l’ensemble une belle légèreté. On peut regretter la reproduction de certains clichés, mais Eldorado reste un film à voir. Rencontre avec les réalisateurs.

Le Quotidien : Le film est le résultat de sept ans de travail. Correspond-il à votre volonté de départ?

Rui Abreu  : On n’avait pas vraiment d’idée préétablie. C’est un documentaire tourné sur la durée et l’idée était surtout de suivre ces destins au jour le jour, de manière très flexible. En choisissant les personnages, on avait évidemment une idée sur où ils pourraient aller, mais ce sont leurs vies qui ont fait du film ce qu’il est.

Le film est un documentaire de création. Comment s’est passée la direction d’acteurs qui, bien sûr, ne sont pas professionnels?

Thierry Besseling  : En fait, ce qu’on a fait ce sont des mises en situation. On réunissait des gens dans un même cadre, et on a pu les guider par rapport à des sujets à aborder  – sujets qu’on avait repérés dans leur vie auparavant. On n’a rien inventé, on a juste mis en forme leurs paroles. Évidemment, nous avons choisi des sujets  : l’école, l’absence du père, l’intégration, la famille… Mais encore une fois, ce sont les personnages qui guident les thèmes abordés dans le film.

Parlons-en des personnages. En les choisissant, vous n’avez pas évité certains clichés : l’ouvrier, la femme de ménage, le repris de justice drogué…

Loïc Tanson  : Ce ne sont pas des clichés, ce sont des réalités…

D’accord, mais il y a aussi au Luxembourg des Portugais architectes, cadres, journalistes… et eux ne sont pas représentés.

Rui Abreu  : La réalité est que, sinon la majorité, au moins beaucoup de Portugais font des métiers manuels. Et justement, on voulait montrer, derrière le cliché de José l’ouvrier et de Maria la femme de ménage, qui est la personne qui se cache derrière le métier exercé, rencontrer ces personnes, raconter ces vies, ces histoires, ces conflits, leurs émotions… Et puis ces gens-là sont des gens très peu représentés habituellement au cinéma, on voulait leur donner une visibilité.

Comment avez-vous convaincu ces gens de parler de ces problèmes  : prison, absence du père… dont on n’a pas nécessairement envie de parler devant une caméra?

Thierry Besseling : Tout le monde a une histoire. Et ces personnes ont envie d’assumer leur parcours de vie. Après, il faut dire qu’on a passé quasiment cinq ans avec eux. Ils nous connaissaient et nous faisaient confiance.

Quelles conclusions sur l’immigration portugaise faut-il tirer du film?

Loïc Tanson : Aucune. On n’a pas du tout la prétention d’avoir fait un film sociologique. C’est plus une aventure humaine que raconte le film.

Le documentaire, en tout cas, se termine de manière onirique avec une sorte de ballet. C’est pour rappeler que tout le monde a des rêves?

Rui Abreu  : Voilà, un ouvrier, une femme de ménage, un jeune un peu perdu ont aussi des rêves, une envie d’ailleurs, de liberté. On a voulu donner cette ouverture au film, qui est, jusque-là, très fortement ancré dans la réalité et le quotidien.

Thierry Besseling  : C’est aussi une libération de leurs gestes manuels. Une manière de leur donner une part d’imaginaire et de rêve. D’autant que dans ces gestes de travail, aussi bien dans les gestes de nettoyage des femmes de ménage que dans ceux des hommes qui travaillent dans les chantiers, il y a quelque chose de très beau. Ça ne se voit pas nécessairement au premier abord, c’est pour ça qu’on a voulu le mettre en exergue.

Pablo Chimienti

Eldorado : espoirs et désillusions de quatre immigrants lusophones au Luxembourg

« Situé au cœur de l’Europe, le Luxembourg est un petit pays dont la population est composée à 46% d’étrangers, majoritairement d’origine portugaise. Ce documentaire relate l’histoire de quatre immigrants lusophones issus de la nouvelle génération.

Il s’agit d’une observation longitudinale des espoirs et désillusions de Fernando, un demandeur d’emploi entre deux âges, de Carlos, un ancien repris de justice en quête de réhabilitation au moment d’affronter la paternité, de Jonathan, un adolescent en difficulté scolaire et en quête d’identité professionnelle et d’Isabel, une femme séparée hantée par un passé difficile.

Durant trois années, les espoirs et désillusions de quatre immigrants lusophones se télescopent dans ce Luxembourg que certains voient comme un Eldorado. »

Eldorado (Luxembourg, 83 minutes), de Rui Abreu, Loïc Tanson et Thierry Besseling. En salle.

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