Accueil | Culture | [Cinéma] Un poulet, et rien d’autre !

[Cinéma] Un poulet, et rien d’autre !


Vainqueur à Annecy et aux derniers César, Linda veut du poulet ! arrive enfin sur les écrans luxembourgeois. Un hymne à l’enfance, à l’amitié, au collectif… et à la révolte !

Voilà déjà plusieurs mois qu’il est sorti, séduisant un nombreux public partout où il passe. Pour lancer son succès, il y a d’abord eu le Cristal du long métrage au festival d’Annecy, rendez-vous majeur du cinéma d’animation. Et le mois dernier, un César obtenu face à deux autres superbes films : Interdit aux chiens et aux Italiens (d’Alain Ughetto) et Mars Express (de Jérémie Périn). C’est que cette œuvre, tissée à quatre mains par Chiara Malta et Sébastien Laudenbach, véhicule des valeurs qui font écho aujourd’hui aux difficultés de faire société : une ode à l’amitié, au collectif et à la famille (la petite comme la grande), le tout abordé à hauteur d’enfant. Comprendre «sans mièvrerie, mais avec moquerie, insolence et poésie», précisent d’une même voix les deux réalisateurs.

Ils poursuivent : «Ici, il n’y a pas de mondes fantastiques. Il n’y a pas de sorcier, pas de grande quête pour sauver le monde, et la seule créature volante présente n’est qu’un… poulet !». C’est ce volatile qui va servir de fil rouge, de MacGuffin comme on dit dans le jargon (un prétexte narratif ayant pour seule utilité de faire avancer l’histoire). On le retrouve au tout début du récit, quand Paulette perd son mari et Linda, alors âgée d’un an, son père, spécialiste du poulet aux poivrons. Une cruelle disparition qui va creuser un fossé entre la mère et la fille, que le film va justement «combler». Ainsi, sept ans plus tard, à la suite de la perte d’une bague, la gamine est accusée à tort. Pour se faire pardonner, Paulette lui promet de cuisiner la fameuse recette. Mais à cause d’une grève générale, il n’est pas facile de mettre la main sur une volaille…

Ici, il n’y a pas de mondes fantastiques. La seule créature volante n’est qu’un… poulet!

Ici, du début à la fin, l’enfant est roi et agite les débats. D’abord au cœur d’une cité «relativement close» qui permet «aux jeunes protagonistes d’être délivrées de toute emprise parentale, de se déplacer comme elles l’entendent». Sans oublier que pour des raisons de crise sociale et financière, les enfants sont souvent seuls à la maison… Ensuite, dans l’esprit, comme le disent Chiara Malta et Sébastien Laudenbach : ce film, c’est comme «un enfant turbulent, de ceux qu’on met au coin parce qu’ils dérangent la classe». Il y a en effet une bonne dose d’absurde, de joie, de liberté, de burlesque, mais aussi (et surtout) de vitalité, se propageant comme une «irrésistible tache d’huile qui fait tout glisser sur son passage : règles, bon sens, ordre établi».

Forcément, les adultes ne sont pas épargnés, retombent en enfance, et de responsables deviennent «peureux, menteurs, tricheurs, révèlent leurs failles, ne craignent pas le ridicule». Outre les copines et copains de Linda, en pagaille, il y a ainsi une tante professeure de yoga accro aux bonbons, un chauffeur de camion mélomane et allergique aux plumes, et un jeune policier contrarié, qui se rêvait musicien. Tous sont embarqués dans une folle course poursuite derrière Paulette et Linda, qui entraînent avec elles de plus en plus de monde, «comme un aimant». On passe alors «d’un deux-pièces-cuisine au parvis d’une cité, d’une famille monoparentale à tous les habitants du quartier!».

Si Linda veut du poulet ! parle de deuil et de souvenirs qui fuient, il évoque avant tout la vie, bouillonnante, pleine de tendresse et de générosité. Pour ce faire, le film «emprunte des sentiers multiples, passant du sérieux au merveilleux, avec un humour parfois teinté de mélancolie, pour parler à cette enfance enfouie en chacun de nous», précisent les réalisateurs. Mieux : dans ce portrait d’une France à la marge, la grisaille laisse place à une animation inventive (avec une couleur attribuée à chaque personnage, parfois réduits à une simple icône, «comme des gommettes!»), soulignée par une prise de son proche «d’un vrai tournage» et des chansons enjouées qui savent se contenir. «Notre but a été de faire un film de divertissement avec un fond tendre et grave, pour un large public, dans la volonté de faire rire et pleurer.» Pari gagné haut la main !

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.