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[Cinéma] Retour dans l’enfer des Andes


Le titre et le scénario sont tirés du livre éponyme de l'Uruguayen Pablo Vierci, qui recueille les témoignages des membres du «Cercle des neiges». (Photo : Netflix)

Après avoir déjà inspiré plusieurs films, l’histoire du crash de la cordillère des Andes revient à l’écran avec Le Cercle des neiges, dans un hommage aux personnes disparues dans le drame.

Roberto Canessa a passé les deux tiers de sa vie à raconter comment il a bravé des températures négatives, deux avalanches, escaladé les Andes et mangé de la chair humaine pour survivre au terrible accident d’avion qui a bouleversé son existence à l’âge de 19 ans. Mais pour cet Uruguayen, cette tragédie anthropophage qui a fasciné le monde vaut la peine d’être racontée de nouveau. Car avec Le Cercle des neiges, elle débarque sur Netflix à partir d’aujourd’hui. Le film est également sorti dans quelques cinémas à travers le monde en décembre.

Dans la vie, «nous avons tous notre chaîne de montagnes à gravir», rappelle Roberto Canessa. «Et il y a beaucoup de gens qui grimpent leur montagne en ce moment même. Il faut leur dire de ne pas se décourager, de continuer.» Réalisé par l’Espagnol Juan Antonio Bayona (Jurassic World : Fallen Kingdom, The Impossible), le film retrace à nouveau l’odyssée des jeunes joueurs d’une équipe de rugby amateur uruguayenne, dont l’avion s’est écrasé dans la cordillère des Andes au début des années 1970 alors qu’ils se rendaient au Chili.

«Vous êtes sur la liste d’attente»

Le titre et le scénario sont tirés du livre éponyme de l’Uruguayen Pablo Vierci, qui recueille les témoignages des membres du «Cercle des neiges». Pour Roberto Canessa, ce nom symbolise le pacte qui a émergé du défi auquel l’équipe était soumise, «lorsque la société civilisée vous laisse de côté». Après le crash, les survivants étaient d’abord persuadés que les secours viendraient à leur rescousse, explique l’ex-rugbyman devenu cardiologue. Mais les jours se sont étirés sans sauveur à l’horizon.

«Vous devez vous débrouiller pour récupérer de l’eau, vous devez manger les morts parce que sinon vous allez mourir. Les morts sont là, à côté de vous», raconte-t-il. «Vous commencez à voir la mort d’une autre personne, non pas avec tristesse pour elle, mais avec tristesse pour vous, parce que vous êtes sur la liste d’attente.»

«Quelque chose manquait»

Le 13 octobre 1972, un avion avec 45 personnes à bord (les rugbymen amateurs, quelques proches et l’équipage) s’écrase sur une plateforme neigeuse à plus de 3 500 mètres d’altitude en territoire argentin. Douze meurent dans le crash, et 17 succomberont plus tard à cause des blessures, du froid extrême ou des avalanches. Le calvaire des survivants, forcés de manger leurs coéquipiers, durera 72 jours au total.

«Ce qui nous est arrivé dans les Andes est absurde», s’émeut Roberto Canessa, l’un des 16 survivants. C’est lui qui a permis le sauvetage de ses camarades, grâce à une équipée héroïque dans les montagnes avec son ami Fernando Parrado pour rejoindre le Chili, alors que les recherches avaient été abandonnées. Cette histoire bouleversante a déjà fait l’objet de livres et de longs métrages, notamment avec le film américain Les Survivants (1993) de Frank Marshall avec Ethan Hawke. Un récit qui se concentre surtout sur l’incroyable exploit des survivants.

Asseyez-vous et réfléchissez à ce que vous feriez si l’avion se crashait dans votre vie

Mais pour Juan Antonio Bayona, qui souhaitait raconter cette histoire dans sa langue maternelle, «quelque chose manquait». Le réalisateur espagnol a souhaité «donner la possibilité de s’exprimer à ceux qui n’étaient pas revenus». Ce parti pris scénaristique «a donné un sens au film», ajoute-t-il. Le Cercle des neiges prend ainsi pour fil conducteur l’expérience de Numa Turcatti, un des joueurs qui ont succombé dans les Andes.

«Des moments bien pires»

Pour son interprète, Enzo Vogrincic, ce rôle était une opportunité et un défi. «Il semble qu’il n’y ait pas moyen de raconter cette histoire sans passer par un peu de souffrance», raconte l’Uruguayen de 30 ans. Pour le tournage, les acteurs ont pris et perdu du poids, et passé des heures immergés dans la neige. Affamé et transi de froid, Enzo Vogrincic a aussi tourné certaines scènes malgré la fièvre. Recréer les avalanches subies par l’équipe a été «une torture», raconte-t-il. Mais ces défis ont nourri le jeu des acteurs et leur «connexion avec le réel», estime-t-il. Le film recrée l’expérience de manière «quasi scientifique», sourit Roberto Canessa, selon qui les comédiens sont passés «par les mêmes épreuves que nous».

Le long métrage représente néanmoins «une version très légère de ce qui s’est passé dans les montagnes», nuance le survivant. «On a vécu des moments bien pires. Si je présente un film sur ce que nous avons vécu, les gens quittent la salle», rit-il. Ovationné à la Mostra de Venise, le film a été choisi pour représenter l’Espagne aux Oscars, et pourrait faire partie des nommés dans la catégorie meilleur film international. Fort de son expérience, Roberto Canessa recommande de le regarder avec du recul. «Asseyez-vous et réfléchissez à ce que vous feriez si l’avion se crashait dans votre vie.»

Le Cercle des neiges, de Juan Antonio Bayona. Netflix.

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