Durant dix semaines du 4 janvier au 22 mars, le Casino fermera ses portes pour de lourds travaux de rénovation. Mais le musée compte restera actif, aussi bien à l’intérieur qu’en dehors de ses murs, avec notamment des conférences à l’Infolab ainsi qu’une exposition décentralisée du côté de la Konschthaus beim Engel.
Si vous passez à proximité du Casino, et que vous entendez des bruits de marteau-piqueur, ce n’est pas une nouvelle installation d’art contemporain, mais bien les travaux qui ont déjà débutés au sein du musée, qui fermera ses portes le 4 janvier pour ne les rouvrir que dix semaines plus tard. Au menu, un sacré lifting, du sol au plafond – confié à l’architecte Claudine Kaell – avec les espaces publics du rez-de-chaussée entièrement repensés. Idem, dans une moindre mesure, pour les salles d’exposition du premier étage.
Mais Kevin Muhlen, directeur artistique du musée, malgré les futurs projets à concrétiser – les deux prochaines biennales de Venise, les expositions consacrées à Aude Moreau pour 2016 et celle du duo Feipel-Bechameil (2017) – ne se voyait pas sans rien faire pendant que son établissement changeait de physionomie. « Je ne comptais pas rester inactif au niveau culturel durant dix semaines », lâche-t-il, avant de présenter les quelques (rares) réjouissances à se mettre sous la dent pendant cette période de restauration, s’achevant le jour des 20 ans du Casino.
D’abord, les amateurs des «Mardis de l’art» verront leur cycle de conférences « revu pour 2016 », et ce, dans un format « moins aléatoire, plus condensé ». On trouvera, dans ce sens, un même commissaire, censé « relier entre eux » trois rendez-vous fixés à l’Infolab. L’historien d’art Hans Fellner proposera ainsi une table ronde intitulée «Être curateur dans un contexte national (12/01), suivie d’une réunion sur le thème de la conservation de l’art digital (02/02) et d’une petite exposition d’un soir – « Où? On ne le sait pas encore! », dixit Kevin Muhlen – qui devrait mettre en perspective, après un appel aux artistes, ce qu’il advient des œuvres perdues, voire détruites ou encore volées («Lost Art : a One-Night Show», 01/03).
Lieu de divertissement plus qu’artistique?
Ensuite, une exposition de 27 jeunes artistes issus de l’Atelier No Name de la HEAR (Haute école des arts du Rhin) de Strasbourg – « avec qui on est en contact depuis plusieurs années » – trouvera ses quartiers au Konschthaus beim Engel. Elle s’intéressera au thème de l’anthropocène, ou plutôt sur les effets de celle-ci, à savoir l’hypothèse d’une nouvelle ère géologique où l’humain deviendrait l’acteur principal des transformations climatiques. Idéal dans la foulée de la COP21 (vernissage le 29/01). La traditionnelle participation au Luxembourg City Film Festival – « depuis trois ans maintenant » – sera aussi reconduite, avec une œuvre de Rachel Maclean projetée à l’Utopolis, celle-là même qui expose actuellement au Casino (pour encore deux semaines).
Reste que, malgré ses maigres offres périphériques, la nouvelle année du Casino va essentiellement se passer dans la poussière et le bruit. Un énorme grondement de machine confirme le constat : « Oui, on a pris les devants et on y investit beaucoup d’énergie », dit Kevin Muhlen, précisant que les dernières modifications apportées au musée remontent à 1995, date de son ouverture. « Et ce sont seulement les salles d’exposition qui ont été remises à neuf, en aucun cas les coulisses! » Et comme c’est par là qu’a commencé l’équipe qui s’occupe du réaménagement, les surprises sont nombreuses. « Heureusement que l’on ne s’attaque pas aux greniers », rigole Jo Kox.
Malgré la volonté de garder l’établissement dans «son jus d’origine», les travaux entrepris au rez-de-chaussée – qui devront aboutir à une seconde entrée boulevard Roosevelt, permettant une libre déambulation du public entre un café culinaire, une salle de projection, une autre dédiée aux activités pédagogiques et autres ateliers – ont fait grincer quelques dents. Le musée va-t-il devenir un lieu de divertissement plus qu’artistique. Critique balayée par le directeur : « Sur 600 m², on consacre seulement 85 m² au café-restaurant. Ça laisse de la place à l’art.»
Grégory Cimatti
Le succès du « crowdfunding »
Jo Kox, en tant que président du Fonds national culturel (Focuna), est bien placé pour parler de ce système de financement participatif, sur lequel s’est appuyé le musée pour réaménager ses intérieurs. Un appel aux dons de 100 000 euros, lancé en juillet dernier, histoire d’arriver à atteindre la somme de 300 000 euros de travaux, en grande partie (plus de la moitié) financés par les fonds propres de l’établissement, sans oublier le soutien, vital, de l’administration des Bâtiments publics. Et c’est tout heureux que le directeur administratif du Casino a dévoilé les résultats de cette opération, « la première , rappelle-t-il, d’une institution publique au Luxembourg . Il y a eu, jusqu’alors, 69 donateurs individuels, et la somme de 50 000 euros a déjà été dépassée ».
En fonction du montant du don (de 50 à 5 000 euros), comme toute opération de crowdfunding, le retour sur investissement est proportionnel : les plus charitables auront ainsi leur nom inscrit un peu partout – même sur une chaise de la table d’hôtes du Ca(fé)sino. Et ils sont sept dans ce cas, à avoir déboursé la somme maximale. « Mais 50 euros, c’est déjà généreux », tempère Kevin Muhlen, directeur artistique du musée. Pour tous les mécènes dans l’âme, il est possible d’aider le Casino dans son élan de restauration jusqu’au 22 mars prochain. Surtout qu’après les premiers coups de marteau, les sensations sont nombreuses… « C’est un bâtiment à surprises , conclut Jo Kox. Durant les travaux, on découvre chaque fois quelque chose de nouveau! » Dans ce sens, comme il le dit, « la rallonge budgétaire gonfle vite ».
G. C.