Entre deux prises, Luc Schiltz et Sophie Mousel donnent leurs impressions sur cette seconde saison, et racontent l’alchimie de leur duo. De leurs débuts d’acteurs à leurs projets en passant par le succès de la série, ils se confient sans détour. Rencontre.
Vous avez deux parcours assez parallèles, en France et en Belgique. Pouvez-vous nous en dire davantage?
Luc Schiltz : J’ai commencé par le Conservatoire, ici au Luxembourg. J’ai alors entendu parler, par mon frère et l’une de ses amies, d’écoles en Belgique. C’est ainsi, par un concours de circonstances, que j’ai fait le Conservatoire royal de Liège. J’étais vraiment heureux là-bas !
Sophie Mousel : Personnellement, j’ai fait un peu de théâtre au lycée puis je suis partie à Paris faire des études de lettres modernes à la Sorbonne, tout en gardant en moi une profonde envie artistique. Je suis ensuite passée par le Cours Florent, en classe libre. Cela m’a vraiment invitée à me lancer.
Est-ce que votre prix d’interprétation au Lëtzebuerger Filmpraïs en 2016 pour Demain, après la guerre de Christophe Wagner était une première reconnaissance?
L. S. : Oui, et d’autant plus que c’était la première année où c’était toute la profession qui votait, et non pas seulement un jury. C’est très flatteur !
Dans ce sens, est-ce plus compliqué en tant qu’acteur luxembourgeois de trouver sa place à l’étranger?
S. M. : Rien que l’accent, ça a toujours posé problème, même si cela m’a aidée parallèlement à décrocher d’autres projets. Le fait d’avoir grandi ailleurs, d’avoir une autre culture, ou plusieurs, peut également influencer un choix, dans un sens comme dans l’autre. C’est une richesse.
Justement, vous avez pu faire vos propres doublages sur la série Capitani, non?
L. S. : Oui et c’est assez rare car Netflix refuse en général que des “native speakers” fassent le doublage. J’ai donc fait mon doublage en français et en raison de la pandémie, je n’ai pas pu le faire en allemand car c’était compliqué d’aller à Berlin.
Comment êtes-vous arrivés sur Capitani?
S. M. : C’était en février-mars 2018 et je revenais au Luxembourg passer des castings. J’ai fait des essais pour la série et cela s’est très bien passé. Christophe Wagner m’a ensuite appelée et, voilà, c’était lancé! Je ne me suis pas tout de suite rendu compte de l’aventure que cela allait être.
L. S. : Pour ma part, ce n’était jamais évident, car j’ai toujours un problème de dates, de calendrier. Chez moi, c’est l’habituelle lutte entre le théâtre et le cinéma, mais dans ce cas-ci, c’est la télévision qui l’a emporté à la fin (il rit).
Comment avez-vous vécu le succès de la première saison?
L. S. : Il y a déjà ce que j’appelle des heures de vol : le fait d’être face à une caméra, avec toute la technique autour, ne peut évidemment pas se faire seul et cela forge une solide expérience. Le succès ensuite, notamment à l’international, n’a pas fondamentalement changé ma vie mais j’espère que cela va ouvrir des portes.
S. M. : J’étais touchée et reconnaissante. Car dans ce milieu, on travaille, on fait de son mieux mais on ne sait jamais le résultat en bout de course. Le succès sur Netflix, personne ne s’y attendait! C’est d’autant plus gratifiant de montrer que le Luxembourg, ce si petit pays, est capable de construire un tel univers et d’avoir une visibilité internationale.
Capitani, c’est plus qu’une simple collaboration !
Avez-vous été d’emblée partants pour la seconde saison?
L. S. : C’était une évidence pour tout le monde. On a reçu les scénarios un mois ou deux avant de tourner, mais on savait que cela allait se faire en pleine ville, dans ce quartier.
S. M. : Cette seconde saison est en effet différente de la première. Beaucoup de choses évoluent, pour nous deux. C’est presque un nouveau rôle, donc un nouveau défi! En tant qu’actrice, c’est génial de pouvoir creuser davantage son personnage.
Que vous inspire votre binôme?
S. M. : J’en suis contente, bien que l’on n’ait pas tant de scènes ensemble que ça. Dans la première saison, j’étais la jeune fille très emphatique qui suit l’inspecteur un peu sec… C’était marrant ! Je suis curieuse de voir comment les gens vont percevoir l’évolution de notre duo.
L. S. : C’est une vraie rencontre ! On a d’ailleurs d’autres projets ensemble. Capitani, c’est plus qu’une simple collaboration!
Est-ce que votre participation à An Zéro a permis de renforcer votre duo?
S. M. : Là aussi, on n’avait pas tant d’interactions que ça mais oui, c’est toujours agréable de se retrouver pour travailler.
L. S. : C’était, là encore, un projet intéressant, politiquement impliqué, grinçant même. C’était très intéressant.
En quoi le succès de la série a-t-il changé vos interactions avec le public?
L. S. : On m’appelle souvent Capitani! En privé, comme sur le tournage. Je me souviens d’un jour où j’étais à un passage piétons, et là, une voiture de police s’arrête. Les deux agents m’ont alors salué d’un “Moien Här Polizist”. Ce sont toujours des échanges sympathiques.
S. M. : Moi aussi, on m’appelle souvent Elsa Ley, ou Elsa. Pourtant, j’ai changé de coupe de cheveux, et il y a les masques, mais rien n’y fait (elle rit). Oui, c’est assez drôle…
Être un petit pays peut aussi devenir une force
Quels sont vos projets?
S. M. : J’attends des nouvelles d’une comédie en France. En juillet, j’ai aussi un court métrage avec Skill Lab qui s’appelle Bellevue. Luc sera là aussi ! En septembre, ce sera le théâtre puis un film allemand mais comme on est dans un milieu où tout bouge rapidement, je préfère attendre pour en parler davantage. J’aimerais idéalement continuer à jongler entre le Luxembourg et la France mais aussi entre l’Angleterre et l’Allemagne. Je trouve cela sain et stimulant de se frotter à plusieurs cultures, plusieurs influences.
L. S. : Il y a en effet ce court métrage, qui est reporté depuis un an à cause de cette pandémie. Pour la suite, je suis encore tiraillé entre théâtre et cinéma. Une habitude chez moi (il rit).
Comment voyez-vous l’évolution de la scène luxembourgeoise?
S. M. : Il se passe en effet beaucoup de choses et j’aime en particulier ce mélange que l’on observe sur de tels tournages, le fait de croiser dans les équipes des Luxembourgeois, des Français, des Belges, des Anglais… Ces projets vont désormais à l’étranger et le fait d’être un petit pays peut aussi devenir une force.
L. S. : Il était temps et je suis fier que Capitani y contribue. Le potentiel est là, et il fallait aussi que les institutions se mettent en place, appuient cette envie. L’artistique suit, donc tout est réuni pour que ça évolue dans le bon sens.
Comment peut-on encore se développer, justement?
L. S. : J’ai l’impression qu’actuellement, on ne peut pas faire plus que Capitani. Il faut donc se demander comment aller plus loin et comment financer des projets encore plus ambitieux. Sans oublier la diffusion. C’est dommage, en effet, qu’après seulement deux semaines d’exploitation, des films se retrouvent dans le tiroir. Oui, je pense que le financement et la diffusion seront les prochains défis pour se développer davantage.
S. M. : Il faut aussi faire les bons choix, prendre des risques et avoir cette envie de s’ouvrir à l’étranger. C’est d’ailleurs pour ça que l’on était ravi de l’aventure Netflix, car cela permet de placer le pays sur la carte. Quand on parle désormais du Luxembourg, en France par exemple, les gens sont moins étonnés. C’est devenu, disons, plus concret. On existe !
Entretien avec Nikolas Lenoir
Wat e Blödsinn…….