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Au Québec, l’art du stand-up monte en puissance


Avant de se produire sur scène, nombreux sont les humoristes ceux qui décident de se former à l'emblématique École nationale de l'humour (ENH). (Photo : afp)

Une école spécialisée, le plus grand festival du rire au monde et des bars qui font salle comble chaque semaine avec des dizaines de spectacles de stand-up… Au Québec, l’humour est une affaire sérieuse.

Si Montréal est considérée comme l’une des capitales du rire et que la vague humoristique québécoise est ancienne, ces dernières années ont marqué une véritable explosion. «Quand je suis sorti de l’école, en 2010, il y avait quelques bars à Montréal qui faisaient des shows d’humour, mais on ne pouvait pas jouer autant que maintenant. Si je décide aujourd’hui de travailler un numéro, je peux jouer 15 fois par semaine», assure l’humoriste Simon Delisle. «L’humour, ici au Québec, on prend ça au sérieux», commente le Québécois, qui vit de sa passion depuis douze ans.

Les spectacles d’humour arrivent en tête des divertissements attirant le plus le public, devant le théâtre, avec un prix moyen au billet (30 dollars canadiens, soit 20 euros) en dessous des autres disciplines, d’après des données de l’Institut de la statistique du Québec de 2021.

«On est complet sur tous les spectacles»

Au Bordel Comédie Club, l’une des salles à la mode à Montréal, Charles Deschamps, micro à la main devant un mur de briques, casquette vissée sur la tête, déroule ses blagues face à une foule hilare. Lancé en 2015, ce cabaret d’humour francophone propose chaque soir plusieurs représentations avec des billets débutant à 10 dollars (moins de 7 euros). «On est complet sur tous les spectacles», souvent avec plusieurs semaines d’avance, avant même que la programmation ne soit finalisée, se félicite Charles Deschamps, l’un des fondateurs. Face au succès, le cabaret a ouvert une deuxième salle l’an dernier et attire aujourd’hui des artistes venus d’ailleurs. Et un public fidèle… qui aime les mélanges de genre. «Il y a différents styles et puis c’est une façon de se relaxer», sourit Manuel St-Aubin, 27 ans, un habitué des lieux.

Au Bordel, «les rires sont forts, ça applaudit beaucoup, il y a moins cette habitude-là à Paris», observe Certe Mathurin. L’humoriste parisien a tenu à entamer la tournée de son quatrième spectacle au Québec, qu’il considère comme «la Mecque de l’humour». «C’est un pèlerinage pour les humoristes : qu’on soit français, suisses, belges… il faut aller au Québec parce qu’ils ont été à l’avant-garde de l’humour francophone», poursuit l’artiste de 37 ans. Le festival Juste pour rire, référence de l’humour francophone, y a été établi en 1983.

C’est un pèlerinage pour les humoristes (…) il faut aller au Québec parce qu’ils ont été à l’avant-garde de l’humour francophone

Avant de se produire sur scène, nombreux sont ceux qui décident de se former à l’emblématique École nationale de l’humour (ENH). Fondée il y a 35 ans, cette institution sélective forme chaque année une trentaine d’étudiants, humoristes et auteurs, et a délivré des stars, comme Roman Frayssinet. Un parcours qui en fait rêver certains, comme Félix Wagner, un Français venu spécialement au Québec pour intégrer l’école.

Le jeune homme a «vraiment la sensation d’avoir passé un cap» et d’avoir gagné «une légitimité» notamment grâce à un cours qui lui a permis de «disséquer la construction d’une blague». À l’intérieur d’une salle aux rideaux tirés, l’un de ses camarades répète son numéro sous le regard de son enseignant : «Travaille sur le texte pour que ça s’enchaîne plus!», lui lance Stéphan Allard.

Explorer différents registres

Cours de créativité, d’improvisation, gestion de carrière, présentation d’un nouveau numéro par semaine… avec cette formation (à 16 500 dollars les deux ans pour les humoristes et 11 000 dollars l’année pour les auteurs), les étudiants viennent «explorer» pour découvrir «le registre dans lequel ils sont le plus drôle sur scène», explique Stéphan Allard. Ils viennent aussi chercher «une structure dans l’écriture», voire une «signature», pour se distinguer parmi l’offre grandissante d’humoristes, souligne l’enseignant.

«Faire l’école m’a permis de jouer dans des comedy clubs à Paris, dans des endroits où normalement il est difficile de jouer» comme le Paname ou le Fridge Comedy Club de Kev Adams, «alors qu’ils ne me connaissaient pas», raconte Beurguy, alias Virginie Courtiol, future diplômée. Sur scène, cette Française de 34 ans ose blaguer sur des sujets inhabituels comme son avortement ou les menstruations. Un humour féministe qui s’inscrit dans la lignée de spectacles incisifs créés ces dernières années, comme le «Womansplaining Show» visant à «détruire le patriarcat, une blague à la fois».

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