Quand l’affaire a éclaté, il avait parlé de « révélations » : le réalisateur Quentin Tarantino, grand ami de Harvey Weinstein, a reconnu avoir été au courant depuis de longues années des agissements du producteur, accusé de harcèlement sexuel et de viols par près de 40 actrices.
La police de Los Angeles (LAPD) a également confirmé jeudi avoir ouvert une enquête sur Harvey Weinstein pour une agression sexuelle qui remonterait à 2013, alors que deux enquêtes sont déjà menées sur le magnat du cinéma à New York et Londres. La réaction de Tarantino, un des metteurs en scène les plus renommés d’Hollywood et un des plus proches de Weinstein, était fortement attendue.
« J’en savais suffisamment »
« J’en savais suffisamment pour réagir plus que ce que je n’ai fait », a reconnu le réalisateur multi-oscarisé de 54 ans, dans une interview publiée par le New York Times jeudi. « C’était plus que les rumeurs habituelles, les ragots. Ce n’était pas des ‘on dit’. Je savais qu’il avait fait plusieurs de ces choses », a-t-il également admis.
A la mi-octobre, après les premières accusations portées contre Harvey Weinstein, le lauréat de la Palme d’or 1994 pour Pulp Fiction avait réagi par un court message sur Twitter en parlant des « révélations qui ont émergé ». Il s’était également dit « abasourdi, le cœur brisé ». Dans son interview au New York Times, Tarantino explique pourtant que Mira Sorvino, son ancienne compagne, lui a notamment fait part d’attouchements non consentis de la part de Weinstein. Le réalisateur, de son propre aveu, a « mis de côté » cet épisode, qui n’était pourtant pas le seul dont il avait eu connaissance.
Utterly shocked by the revelations about Harvey. He is a good friend, but if he is guilty, there are issues that are inevitable.
— Quentin Tarantino (@qtarantino) 11 octobre 2017
Il reconnait également avoir été au courant de l’accord à l’amiable signé entre Rose McGowan et Harvey Weinstein. « J’aurais aimé avoir agi de façon responsable devant ce que j’ai entendu. Si j’avais fait ce que j’aurais dû faire, il aurait fallu que je ne travaille pas avec lui », a-t-il également déclaré. Ensemble, le duo a écrit parmi les plus belles pages du cinéma hollywoodien des années 90 et 2000, arrivant à concilier reconnaissance critique et succès populaire. Harvey Weinstein avait distribué le premier film de Tarantino, Reservoir Dogs en 1992, avant de produire plusieurs de ses plus gros succès, comme Kill Bill, Pulp Fiction ou Inglourious Basterds.
« Tout ce que je peux dire aura l’air d’une pauvre excuse »
Le producteur, qui a été licencié de sa société, la Weinstein Company, est maintenant visé par une nouvelle enquête policière pour agression sexuelle, ouverte par la police de Los Angeles. Le porte-parole de la LAPD n’a pas donné l’identité de la victime mais, selon plusieurs médias, il s’agirait d’une actrice et mannequin italienne.
Cette dernière a expliqué au Los Angeles Times que les faits s’étaient déroulés dans un hôtel de Los Angeles en février 2013. Harvey Weinstein, selon elle, est arrivé « sans prévenir » à son hôtel, et est monté dans sa chambre pour la voir, alors qu’elle avait proposé de descendre le rencontrer dans le lobby. « Il a forcé le passage dans ma chambre », a-t-elle expliqué au journal californien, avant de raconter : « Il est devenu très rapidement agressif et demandait à me voir nue. Il m’a attrapée par les cheveux, et m’a forcée à faire quelque chose que je ne voulais pas. Ensuite il m’a traînée dans la salle de bain et m’a violée ».
Avant ce nouveau témoignage, cinq actrices accusaient déjà Harvey Weinstein de viol. Sa personnalité était bien connue à Hollywood, et plusieurs fois évoquée entre les lignes lors de discours publics ou dans des films. Harvey Weinstein a affirmé, par la voix de sa porte-parole, que les relations sexuelles publiquement révélées étaient consenties. Quentin Tarantino, interrogé par le New York Times sur les conséquences que pourraient avoir cette affaire sur son travail, a expliqué « espérer » que cela n’affecterait pas ses films. « Tout ce que je peux dire maintenant aura l’air d’une pauvre excuse ».
Le Quotidien/AFP