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[Mondial-2022] Le Maroc, locomotive de l’Afrique


Le Maroc a donné une belle leçon pour les pays d'Afrique en investissant largement dans les infrastructures et le personnel. (Photo AFP)

Derrière le parcours historique du Maroc, premier demi-finaliste de l’histoire du continent, l’Afrique a ravivé au Mondial-2022 un espoir entretenu depuis des décennies.

« Sur ce tournoi toutes les équipes africaines ont fait de bonnes choses », souligne Romain Saïss, capitaine des « Lions de l’Atlas », stoppé en demi-finale par la France (2-0), mercredi. En effet le Sénégal, champion d’Afrique, a passé un tour aussi, avant de plier contre l’Angleterre (3-0) en 1/8 de finale.

Et si les trois autres nations ont été éliminées, elles sortent avec deux performances mémorables: la Tunisie a battu la France (1-0), le Cameroun s’est offert le Brésil (1-0), même s’il s’agissait des « équipes B », Bleus et Auriverdes étant déjà qualifiés.

Le Ghana n’a gagné qu’un match, contre la Corée du Sud (3-2), mais il avait sa qualification en main au dernier match, où il n’a pu prendre sa revanche sur l’Uruguay (2-0), qui lui avait barré la route du dernier carré en 2010. L’Afrique a placé deux équipes en 1/8e de finale pour la deuxième fois, après 2014 (Algérie et Nigeria). En 2018 en Russie, aucune sélection du continent n’avait franchi le premier tour.

« Il ne faut pas avoir de complexe d’infériorité », reprend Romain Saïss, « aujourd’hui les équipes africaines sont toutes composées de très grands joueurs, pas seulement celles qui étaient là » au Qatar.

Un long chemin

« J’espère que ça servira d’exemple pour l’avenir, qu’il y aura de plus en plus d’équipes africaines qui atteindront les demi-finales », poursuit le Marocain. « L’Afrique et le Maroc progressent, on a enfin compris qu’il fallait se prendre en main, on a montré au monde qu’au Maroc on travaille et on avance », poursuit en écho le sélectionneur marocain Walid Regragui.

Entraîneur adjoint du Cameroun, Sébastien Migné « n’oublie pas 1990, qui était à l’époque en soi une révolution. Les +Lions Indomptables+, premiers quarts de finalistes, avaient amené un vent de fraîcheur, on retrouve un peu ça avec le Maroc ».

Avant ces pionniers, le chemin a été long, et semé d’embûche. Le continent n’a pas eu de place assurée avant 1970, où le Maroc décroche le billet mais ne prend qu’un point. Auparavant, seule l’Égypte avait participé une fois, battue au premier tour par la Hongrie (4-2) en 1934. En 1974, le Zaïre est humilié, avec trois défaites dont un 9-0 contre la Yougoslavie.

Le premier succès arrive en 1978, quand la Tunisie bat le Mexique (3-1), et résiste à la RFA (0-0) avant d’être éliminée d’un rien. A partir de 1982, l’Afrique compte deux représentants et au moins une équipe se distingue à chaque édition. L’Algérie surprend la RFA (2-1) avant d’être éliminée par le « match de la honte », la commode victoire 1-0 des Allemands sur l’Autriche qui qualifiait les deux pays.

Neuf équipes africaines en 2026

Le Maroc, déjà, devient la première nation africaine qualifiée pour le second tour en 1986. Le parcours du Cameroun en 1990 permet à la CAF (Confédération africaine de football) de décrocher une troisième place pour 1994, puis une quatrième et une cinquième à partir de 1998. Avec le passage à 48 nations, l’Afrique comptera neuf équipes en 2026.

Le Nigeria atteint trois fois les huitièmes (1994, 1998 et 2014), et le Ghana (2006 et 2010) et le Sénégal (2002 et 2022) deux fois, avec chacun un quart de finale, 2010 pour les « Black Stars » et 2002 pour les « Lions ». La réussite de l’édition qatarie vient de loin. Le sélectionneur Aliou Cissé est en poste depuis sept ans, et le Maroc a opéré un vrai travail de fond.

« Rien n’est impossible quand on travaille dans la durée »

Maître d’oeuvre du vaste projet de formation marocain, au travers notamment de l’Académie Mohamed VI, Nasser Larguet met en avant « l’héritage » laissé par ce parcours des Lions de l’Atlas.

« Cela montre qu’on peut travailler sur nos continents, on a un potentiel, il faut croire en nous, nous décomplexer par rapport à l’Amérique du Sud et à l’Europe, rien n’est impossible quand on travaille dans la durée », dit-il à l’AFP. Pour Sébastien Migné, qui entraîne depuis 12 ans sur le continent, le Maroc a « donné une belle leçon pour les pays d’Afrique en investissant largement dans les infrastructures et le personnel. Quelques années après ils en récoltent les fruits ».

« J’espère que les dirigeants africains vont réfléchir, investir pour des résultats à long terme, et pas à court terme », conclut Migné.