Pour inciter les compagnies à diriger leurs meilleurs avions vers le Findel, les taxes d’utilisation des pistes seront jusqu’à deux fois plus élevées pour les avions les plus bruyants.
Les avions de fret représentent une large majorité des appareils qui arrivent la nuit entre 23h et 6h. (Photos : Jean-Claude Ernst).
Le 9 janvier, l’Union des syndicats d’intérêts locaux de la ville de Luxembourg envoyait un courrier vertement rédigé à François Bausch. Usant d’un style volontiers agressif, les riverains du Findel pestaient contre la progression constante du nombre de vols de nuit. Cette sortie, qui a agacé le ministre, lui a surtout permis d’expliquer, hier, les mesures qu’il vient de mettre en place pour limiter de manière significative les départs et les arrivées d’avions entre 23h et 6h.
Certes, le nombre de vols de nuit a légèrement augmenté en 2014, mais cette hausse est plus légère que l’augmentation générale du trafic aérien au Luxembourg. Et le diagramme détaillant la dispersion de ces vols nocturnes au cours de la nuit montre que l’écrasante majorité des avions qui partent ou arrivent en retard passe par le Findel entre 23h et minuit.
D’une manière générale, le règlement grand-ducal du 24 mai 2008 « fixant les conditions d’exploitation technique et opérationnelle de l’aéroport de Luxembourg » interdit les vols de nuit. Toutefois, des exceptions peuvent être accordées. « Tous les avions dont le port d’attache est le Luxembourg ont le droit d’atterrir, quelle que soit l’heure », explique le directeur de l’administration de la Navigation aérienne, John Santurbano.
Ceux portant l’emblème de Luxair et surtout celui de Cargolux sont concernés. Pour partir, ces appareils doivent obtenir une dérogation qui ne sera accordée qu’en cas de motif valable.
> « Le principe pollueur-payeur »
Les avions qui ne sont pas basés au Grand-Duché doivent systématiquement demander une autorisation d’arrivée ou de départ tardif. « Et ils ne peuvent l’obtenir que dans des circonstances précises : problème technique, météo difficile, vol humanitaire ou sanitaire, transport de produits pharmaceutiques, d’animaux vivants… » Si la liste peut paraître longue, elle est surtout très restrictive.
L’an passé, 89 demandes ont été accordées, c’est 28 de moins qu’en 2013. John Santurbano assure avoir posé son veto dans la grande majorité des cas, y compris pour les avions luxembourgeois.
Un autre outil vient également d’être mis en place et le Findel est un pionnier européen en la matière. Pour la première fois en Europe, les taxes d’utilisation des pistes d’un aéroport sont modulées selon les performances acoustiques de l’avion. « Nous mettons en place le principe pollueur-payeur, explique John Santurbano. Cette taxe est représentée sous la forme d’une équation dans laquelle entrent en compte l’heure, la capacité d’emport de l’avion ou son certificat de nuisance sonore. »
Ainsi, un avion bruyant obtenant l’autorisation d’utiliser l’aéroport entre 23h et 6h verrait la facture multipliée par deux. « L’idée n’est pas de sanctionner les compagnies luxembourgeoises : elles disposent d’une flotte récente et donc d’avions performants. Ce sont surtout les compagnies étrangères qui seraient tentées d’utiliser des avions plus anciens vers Luxembourg qui sont visées par cette disposition », précise le directeur de l’administration de la Navigation aérienne.
> Un aéroport dans l’Oesling ? « Aucun sens »
Les modalités d’arrivée de nuit sont également en passe d’être modifiées. Ainsi, l’aéroport veut privilégier le principe de descente continue qui permet à l’avion de se rapprocher du sol — et donc des habitations — plus tardivement que lorsqu’il effectue des paliers, ce qui reste la démarche classique.
Alors que l’aéroport de Liège est ouvert toute la nuit ou que les plages horaires de celui de Cologne sont nettement plus étendues, François Bausch se défend d’ouvrir les pistes du Findel à qui veut. « Ces discussions auraient lieu de toute façon où que soit l’aéroport, a-t-il souligné. Cela n’aurait aucun sens de le déplacer dans l’Oesling et je trouve un peu facile le fait que les riverains se plaignent parce qu’ils entendent les avions depuis la maison qu’ils viennent d’acheter ou de faire construire. Ils savent qu’un aéroport produit des nuisances. »
Il a également rappelé que les cartes qui illustrent le bruit causé par le trafic aérien sont en libre accès sur le site geoportail.lu.
De notre journaliste Erwan Nonet