Romain Schmit, secrétaire général de la Fédération des artisans est connu pour son franc-parler. Il aborde avec nous les sujets d’actualité. Surtout ceux qui fâchent.
Le partenariat pour l’emploi fait partie d’une offensive générale pour l’emploi dans laquelle les PME, et l’artisanat en particulier, ont un rôle essentiel à jouer comme chacun s’accorde à le dire. Mais à quel prix ? La flexibilité du travail, la baisse du salaire social minimum qui, au Luxembourg, répond au coût de la vie ?
Romain Schmit : Un salaire, fut-il appelé minimum n’a rien à voir avec le niveau de vie. Un salaire doit être en relation avec la productivité et le travail. Notre salaire minimum empêche que des emplois soient créés, notamment pour des non-qualifiés. Je ne prétends pas qu’il est confortable de vivre avec un salaire minimum, surtout au vu du prix du logement. Il faudra trouver des solutions alternatives au niveau des transferts sociaux pour ces catégories de revenus.
Les entreprises ne sauront jamais pallier ces déficiences par des augmentations salariales. Le paradoxe du Luxembourg est que le pays exerce une attractivité équivalente à une métropole dans un pays en voie de développement où on voit les bidonvilles se développer. Chez nous, c’est le chômage qui se développe. Plutôt que de renchérir l’emploi il faut s’attaquer au chômage et créer du logement social en location.
La Fédération des artisans évoque aussi comme « frein à l’emploi » le problème des sites d’implantation. Manquerait-on de zones artisanales dans le pays ?
Oui, il faut faire le constat que les zones d’activités ne sont pas assez nombreuses, que souvent elles ne sont pas ouvertes à certaines catégories d’entreprises, comme c’est le cas pour les entrepreneurs de construction. Finalement, le prix d’acquisition constitue, notamment pour les entreprises nouvellement créées, un lourd fardeau financier à porter. Dans ce créneau-là, il n’y a pas de différence entre un jeune ménage voulant acquérir son logement et la jeune entreprise voulant s’implanter.
Et la pauvreté se développe aussi, visiblement, puisque ce risque s’accroît, selon les syndicats qui estiment qu’une augmentation du salaire social minimum permettrait de l’éradiquer…
Dire qu’il faudrait augmenter le SSM de 10% pour lutter contre la pauvreté est une absurdité, mais présente l’avantage de faire la une pour sa simplicité ! La pauvreté, telle qu’on la conçoit en Europe, est un problème relatif. Je cite un exemple livré par Michel Wurth (NDLR : patron des patrons), qui rappelait, très justement, qu’une entreprise active dans les ITC, ramenant au Luxembourg en s’y implantant une centaine de personnes très bien payées, entraîne 100 autres personnes dans une situation de pauvreté relative. Si ces travailleurs hautement qualifiés ne sont pas là, le pays est plus pauvre et s’ils sont là, les gens sont plus pauvres, c’est quand-même insensé !
La pauvreté est un problème grave et sérieux, arrêtons de la calculer par rapport à une médiane qui est celle que l’on a au Luxembourg. Il y a quelques années, le CES a calculé le prix de l’éradication de la pauvreté pour démontrer l’absurdité du concept. L’idée était de combler jusqu’au niveau du seuil de pauvreté tous les revenus inférieurs à ce seuil. Cette opération ne coûterait que la relative bagatelle de 30 millions environ.
Le problème est, qu’après l’opération, une nouvelle médiane et un nouveau taux de pauvreté seront calculés et la pauvreté relative sera de nouveau au niveau d’avant. Le relèvement du SSM aura exactement le même effet.
Entretien avec Geneviève Montaigu, à lire en intégralité dans notre édition papier de ce mardi.