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L’ex-psychiatre de Schrassig à la barre


Le parquet reproche à l'ancien psychiatre du centre pénitentiaire de Schrassig, qui a comparu mardi devant le tribunal d'arrondissement, d'avoir prescrit en août 2007 à un détenu de la méthadone sans l'avoir examiné. (Photo Jean-Claude Ernst)

L’ancien médecin psychiatre du centre pénitentiaire de Luxembourg poursuivi pour homicide involontaire a comparu, mardi, devant la justice.

Ce n’est pas la première fois que ce médecin psychiatre, âgé aujourd’hui de 63 ans, se retrouve devant le tribunal. Dans une affaire similaire, le prévenu avait bénéficié d’un non-lieu il y a quelques années.

Aujourd’hui, le parquet lui reproche d’avoir involontairement causé la mort du prisonnier David R. : sans l’avoir vu, il lui avait prescrit par téléphone, en date du 8 août 2007, une dose quotidienne de 30 mg de méthadone. Il s’agit d’un traitement indiqué dans le cadre du sevrage à l’héroïne, mais potentiellement contre-indiqué, voire mortel, pour une personne non-dépendante et par conséquent non-tolérante.

Selon le rapport d’expertise, le détenu de 39 ans est décédé le 11 août 2007 par asphyxie, mais la cause n’a pas pu être établie. L’expert du service toxicologie du centre hospitalier de Limoges, entendu mardi à la barre, a affirmé qu’aucun médicament n’a été retrouvé en quantité exagérée. Mais il regrette que l’échantillon d’urine prélevé n’ait pas été analysé, car cela aurait pu clarifier la cause exacte de l’asphyxie ayant entraîné la mort. En effet, si les produits restent seulement quelques heures dans le sang, on en retrouve des traces pendant plusieurs jours dans les urines.

Me Jean Minden a demandé l’acquittement de son mandant. Pour la défense de l’ancien médecin psychiatre, l’accusation ne tient pas la route. «Le parquet veut faire croire que la cause du décès est une intoxication médicamenteuse thérapeutique», note l’avocat qui souligne que la cause exacte du décès reste inconnue.

Selon la défense, l’ancien médecin psychiatre du centre pénitentiaire n’a commis aucune faute. Alors qu’il se trouvait en congés, l’infirmière psychiatrique l’avait appelé par téléphone pour lui faire part des troubles, liés au manque, du détenu en question. Il avait donc prescrit une dose quotidienne de 30 mg de méthadone. «Il avait le droit d’initier la prescription par téléphone», a remarqué Me Minden en précisant qu’à l’époque, son mandant était le seul psychiatre travaillant à plein temps au centre pénitentiaire. Il était seulement épaulé d’un deuxième psychiatre engagé à mi-temps, ce qui était largement insuffisant pour le suivi de quelque 700 détenus.

L’anamnèse et l’examen clinique étaient souvent les seuls moyens du praticien pour déterminer si le patient était consommateur d’opiacés a, par ailleurs, plaidé la défense. Me Minden, note encore que David R. avait pris sa dose de méthadone le 10 août à 15h. Sa mort, quant à elle, a été constatée le lendemain à 5h10.

«Aucun examen médical n’a été effectué»

Enfin, la défense a émis l’hypothèse du suicide de David R., évoquant le courrier retrouvé dans la cellule, dans lequel le détenu s’adresse à son père : «Je te demande pardon pour le mal et les inquiétudes que je vais te causer.»

Or selon le parquet, il ne faut pas forcément être suicidaire pour écrire cela : il aurait tout aussi pu s’agir des mots d’une personne incarcérée. Dans son réquisitoire, la représentante du parquet reproche à l’ancien médecin psychiatre du centre pénitentiaire de ne pas avoir remis en question les déclarations que le «probablement polytoxicomane» avait faites à l’infirmière, à son arrivée à Schrassig. Il y avait confié avoir consommé de l’héroïne avant son transfert. «Aucun examen médical n’a été effectué. Il fallait l’examiner», insiste-t-elle.

Comme cause du décès de David R., le parquet retient l’intoxication par médicaments. Il requiert douze mois de prison avec sursis contre le prévenu qui n’aurait pas pris les mesures de précaution pour exclure un surdosage. Le tribunal rendra son jugement le 11 juin.

Fabienne Armborst

Un commentaire

  1. C’était un très grand Monsieur, trop grand pour le petit Luxembourg. Merci à lui !!!

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