« Je ne suis pas dans la case terroriste, mais dans la case délinquant », a cherché à convaincre jeudi Mohamed Soumah, complice du « logeur » du 13-Novembre Jawad Bendaoud, lors de leur procès devant le tribunal correctionnel de Paris.
Mohamed Soumah est jugé depuis mercredi, au côté de Jawad Bendaoud, pour « recel de malfaiteurs terroristes », devant la 16e chambre du tribunal. Peu après le début de son interrogatoire par la présidente Isabelle Prévost-Desprez, il a voulu « présenter toutes (ses) condoléances et demander pardon aux familles des victimes et aux victimes » des attentats du 13 novembre 2015. « Indirectement, sans le savoir, c’est un peu ma faute. J’étais pas au courant mais ça reste de ma faute », a-t-il déclaré.
Mohamed Soumah, 28 ans, a mis en contact Jawad Bendaoud et Hasna Aïtboulahcen, qui cherchait une planque pour deux jihadistes du 13-Novembre (le cerveau présumé des attaques, Abdelhamid Abaaoud et son compagnon de cavale Chakib Akrouh). Mais il a affirmé qu’il ne savait pas à qui était réellement destiné l’appartement. Les deux jihadistes et la jeune femme seront tués dans l’appartement du logeur, lors de l’assaut du Raid, le 18 novembre 2015 très tôt le matin, à Saint-Denis.
Il parle au tribunal de « la poisse d’avoir été embarqué dans cette affaire ». « Je ne suis pas dans la case terroriste, mais dans la case voyou, délinquant, racaille », poursuit le prévenu, qui reconnaît avoir « fait beaucoup de bêtises » dans sa vie. Il a déjà été condamné plusieurs fois à des peines de prison ferme. Aux enquêteurs, il avait dit avoir été « choqué » par les attentats du 13-Novembre.
Pour l’argent et plus si affinités…
C’est en prison en 2011 qu’il a rencontré Jawad Bendaoud. Ils partageaient en novembre 2015 « un business » dans les stupéfiants. Mohamed Soumah pensait qu’Hasna Aïtboulahcen cherchait un logement pour elle ou pour des copines, a-t-il affirmé. La présidente a toutefois souligné que le prévenu avait plusieurs fois menti au cours de l’enquête. Il n’aurait pris conscience qu’elle voulait un logement pour des hommes que le 17 novembre au soir, quand il a parlé au téléphone avec Abdelhamid Abaaoud, qui ne parvenait pas à trouver l’appartement de Jawad Bendaoud. « Rien ne m’a fait penser que c’était bizarre. (…) C’est vrai qu’il y avait eu les attentats. Mais la vie criminelle continuait. Et je regardais beaucoup BFMTV, iTélé : ils ne parlaient pas de Hasna ».
Pourquoi avoir accepté de chercher un logement pour cette femme qu’il a rencontrée, selon ses dires, seulement le 16 novembre pour lui vendre de la cocaïne ? Le prévenu a mis d’abord en avant « l’argent », puis enchaîné : « Et pourquoi pas après, si je l’aide, coucher avec elle ? ». « J’avais envie de lui faire l’amour », a-t-il répété à de multiples reprises, dans un langage pas toujours aussi soutenu. « A la fin, je me suis dit : elle m’a utilisé. Elle m’a charmé. (…) Elle m’a pris pour un con », a-t-il conclu.
Mohamed Soumah a affirmé au tribunal qu’il n’avait pas compris les messages codés au téléphone d’Hasna Aïtboulahcen. Comme quand elle parlait de son « gynéco » et qu’il pensait que « c’était de l’argot ». « C’était une pipelette », a tranché le prévenu. Mohamed Soumah a été interpelé le 1er décembre 2015. Il est depuis incarcéré. L’interrogatoire de Jawad Bendaoud devait commencer jeudi en milieu d’après-midi.
Le Quotidien/AFP