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Pays développés ou en développement : qui fait quoi pour le climat?


photo AFP

« Le monde a changé ! » L’antienne des pays développés est martelée quotidiennement aux négociations sur le climat de Paris. Cette volonté d’assouplir la sacro-sainte ligne de partage entre pays du Nord et du Sud et les obligations qui en découlent est au cœur d’une bataille rangée.

« Il est temps d’en finir avec cette différenciation rigide entre pays développés et en développement qui nous empêche de progresser », a lancé lundi le secrétaire d’Etat américain John Kerry, au Bourget où se déroulent les négociations entre 195 pays. Cette position n’est pas nouvelle, mais à l’heure où se négocie un accord légalement contraignant qui servira de cadre d’action pour des décennies, la question cristallise les débats. « Il faut prendre en compte la réalité du monde, et il a clairement changé » depuis l’inscription de cette règle de partage des obligations dans le marbre de la Convention de l’ONU sur le climat en 1992, explique un négociateur européen.

En 1990, 34% des émissions de gaz à effet de serre (GES) provenaient des pays en développement. Treize ans plus tard, elles s’élevaient à 58%. Et en 2030, Chine et Inde, les deux grands pays émergents, seront les deux plus grands émetteurs. « Des pays comme Singapour, l’Arabie saoudite et le Qatar ont un PIB par habitant plus élevé que la plupart des pays développés », renchérit Alden Meyer, de l’ONG américaine Union of concerned scientists.

Ce monde bipolaire s’est fissuré lors de la conférence de Durban en 2011, quand la communauté internationale a décidé de se doter d’un accord « universel » sur le climat. Le protocole de Kyoto, signé en 1995, n’engageait que les pays industrialisés à réduire leurs émissions polluantes.

Cercles concentriques

« Les petites îles ont dit qu’elles allaient finir sous l’eau, et peu importe si les émissions de CO2 viennent de Chine ou des Etats-Unis », rappelle Alden Meyer. Le Brésil a lui proposé une nouvelle division du monde, en trois cercles concentriques: pays développés/en développement/les moins avancés, chaque nation ayant vocation à se rapprocher du centre. Et ils sont aussi nombreux à souligner l’écart qui sépare la Chine, premier pays pollueur au monde (22% des émissions), du troisième, l’Inde (6,1%).

« Leur situation est très différente », souligne le ministre gambien de l’Environnement, Pa Ousman Jarju, « dans certaines régions de l’Inde, la situation économique est la même que dans les pays les moins avancés ». Pour autant, un certain nombre de pays comme la Chine, l’Inde, la Malaisie, l’Arabie saoudite … s’opposent à la remise en cause du principe de la Convention, au nom de la responsabilité historique du Nord dans le réchauffement et leur droit au développement.

Ce débat s’immisce dans de nombreux points de l’accord tant attendu à Paris pour limiter la hausse du mercure à 2°C. Faut-il appeler « tous » les pays à « avoir pour objectif » de réduire en valeur absolue leurs rejets polluants, comme le font déjà les pays industrialisés? Selon un rapport de l’ONG Oxfam, quelque 10% des habitants les plus riches de la planète sont responsables de plus de la moitié des émissions de CO2.

Le système d’inventaire et de vérification des mesures climatiques prévu par l’ONU est plus exigeant pour les pays développés. Les Américains veulent un système unifié, « mais pour l’instant, Chine et Inde insistent pour le plus de différenciation possible », explique le négociateur européen. Mais la mère des batailles semble être celle portant sur l’assistance financière pour aider les pays du Sud à faire face au réchauffement. Déjà engagés à débourser 100 milliards de dollars par an d’ici 2020, les pays du Nord sont appelés à en faire plus.

Mais ces derniers veulent désormais que d’autres mettent la main à la poche. « Nous ne revenons pas en arrière (…) mais il y a beaucoup d’anciens pays en développement qui ont des capacités financières qu’ils n’avaient pas en 1992 », plaidait encore lundi le commissaire européen en charge du Climat, Miguel Arias Canete.

La Chine a déjà promis 3,1 milliards de dollars d’aide pour les pays du Sud. « Plus que l’engagement américain! », souligne Alden Meyer. « De facto, elle a en quelque sorte effacé cette ligne de séparation ». Mais l’argent ne transitera pas par le Fonds vert, la structure mise en place dans le cadre de ces négociations. Pour ne froisser aucun pays, des formulations des plus subtiles, dont ces négociations ont le secret, devront être trouvées. « Il faut éviter les mots qui fâchent », souligne le négociateur européen.

AFP

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