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Obscur assassinat d’un ex-agent du renseignement français


L'ancien agent de la DGSE était lui-même lié à une enquête sur un projet d'assassinat d'un opposant congolais. (illustration AFP)

La mort de Daniel Forestier, retrouvé criblé de balles la semaine dernière en Haute-Savoie, suscite nombre d’interrogations : depuis l’automne, cet ex-agent du renseignement français était lui-même au cœur d’une affaire de projet d’assassinat d’un opposant congolais en région parisienne.

Le corps de cet homme de 57 ans a été retrouvé le 21 mars sur le parking d’une commune proche du lac Léman, mais l’identité de l’ancien agent du service action de la DGSE n’a pu être confirmée que mardi soir, via son avocat, prévenu par la famille de la victime. Le meurtre intrigue puisqu’il s’apparente à une exécution, l’autopsie ayant révélé cinq impacts de balles sur la victime, dont un au niveau du cœur et un autre dans la tête.

Après la découverte du corps, le parquet de Thonon-les-Bains avait immédiatement ouvert une enquête pour assassinat, et le dossier a été repris lundi par la Juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Lyon, compétente en matière de criminalité organisée. C’est la Jirs qui avait mis en examen Daniel Forestier en septembre dans le cadre d’une enquête sur un projet d’assassinat ayant visé le général Ferdinand Mbaou, un opposant au président congolais Denis Sassou Nguesso réfugié en France depuis près de 20 ans. L’ancien militaire de carrière et un autre ex-agent des services de renseignements extérieurs français, Bruno Susini, avaient été inculpés « d’association de malfaiteurs » et « détention d’explosifs ». Un troisième homme avait été placé sous le statut de témoin assisté.

Le mode opératoire et les zones d’ombre entourant l’assassinat de Forestier nourrit des spéculations dignes d’un roman d’espionnage : règlement de comptes ? Élimination d’un témoin gênant ? « On a du mal à croire que ce meurtre soit sans lien avec sa mise en cause dans l’affaire Mbaou », commente une source proche du dossier. De son côté, le parquet de Lyon ne va pas au delà de la confirmation de l’ouverture d’une enquête par la Jirs.

« Aucun protagoniste n’est en sécurité »

Pour l’avocat de Daniel Forestier, la mise en cause de son client dans le dossier concernant l’opposant congolais était injustifiée. « Mon client avait toujours contesté ces accusations rocambolesques, qui ne reposent que sur un témoignage anonyme », souligne-t-il. Son client était placé sous contrôle judiciaire et l’avocat avait engagé dès septembre un recours devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Lyon pour faire annuler cette mise en examen.

Selon le Dauphiné Libéré, Daniel Forestier, marié et père de deux enfants, était établi à Lucinges (Haute-Savoie) après 14 ans passés au sein de la DGSE. Il était conseiller municipal jusqu’à septembre dernier et avait publié à compte d’auteur plusieurs romans aux titres évocateurs tels que Barbouze de la République ou Requiem pour un Savoyard. « C’était un homme qui était avant tout un père de famille et un époux apprécié de tous. Il avait une vie saine et paisible, et n’était pas connu de la justice au-delà de la mise en examen de septembre », a poursuivi son avocat.

Interrogé début octobre, Ferdinand Mbaou, 62 ans, s’était dit « en colère mais pas surpris » par la nouvelle de ce projet d’assassinat, qu’il disait avoir apprise « par la presse ». En 2015, l’ancien chef de la garde de l’ex-président de la République du Congo Pascal Lissouba (1992-1997) avait déjà été grièvement blessé par balle dans une tentative d’assassinat à la sortie de son domicile au nord de Paris. Il serait dans le collimateur de Brazzaville en raison de ses réseaux dans l’armée, selon un opposant congolais.

« Nous avons appris avec effarement le décès de M. Forestier. Avec sa mort, c’est une partie essentielle des preuves, et donc de la manifestation de la vérité, qui disparaît », ont regretté mercredi les avocats de l’opposant congolais. « Il est plus que jamais indispensable que les investigations s’accélèrent pour que la justice puisse déterminer le ou les responsables de la tentative d’assassinat de M. Mbaou », ont-ils souligné, ajoutant : « aucun protagoniste dans cette affaire n’est en sécurité, à commencer par notre client ».

LQ/AFP

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