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Nico Braun : « J’ai été fasciné par Charly Gaul »


«Dans le sport, on ne prête attention qu'aux premiers. C'est dommage, car le mérite revient encore plus aux sans grades», estime Nico Braun. (photo Gerry Schmit)

Nico Braun, l’ancien buteur luxembourgeois du FC Metz, découvre les coulisses du Tour de France avec émerveillement. Pas de doute, il maîtrise son sujet. Le cyclisme, son histoire mais aussi son présent, et notamment le Tour n’ont pas de secret pour lui. La preuve…

Du haut de ses 65 ans, Nico Braun promène des yeux d’enfant lorsqu’il déambule dans les coursives du Tour. L’occasion de réveiller son imaginaire et les rêves qui ont bercé sa prime jeunesse avec les exploits de Charly Gaul. L’ancien footballeur professionnel dont la carrière (Schalke 04 de 1971 à 1973, FC Metz de 1973 à 1978, Charleroi de 1978 à 1980) se termina en queue de poisson du côté de Thionville, évoque, à l’occasion, une blessure jamais refermée.
«J’ai fini ma carrière pro en 1981, le président m’apprenant qu’il ne pouvait plus payer nos salaires à la veille de Noël. C’est toujours un regret profond, je méritais mieux, mais bon…» , maugrée-t-il en s’échappant quelques instants. Ici il est chauffeur, pour une semaine, de la voiture de notre confrère de la Revue . Entretien…Le Quotidien : Nico, vous vous retrouvez sur ce Tour parmi les nombreux suiveurs du Tour.

Nico Braun  : Oui, c’est un rêve. Ces dernières années, j’ai toujours eu la chance d’y participer en tant qu’invité sur l’une ou l’autre étape. Mais je souhaitais le vivre différemment. Je voulais être présent une fois dans le cœur du Tour de France. Pour être près des coureurs au départ ou à l’arrivée, des journalistes, des nombreux techniciens. Cela s’est présenté. J’ai croisé les anciens grands champions du Tour, c’est un rêve pour moi. Même à 65 ans, je suis heureux comme un gamin de voir Eddy Merckx, Bernard Hinault, Greg Lemond.

Lequel vous a fasciné?

Tous, sans exception. En suivant de très près leurs performances, je suis admiratif. J’ai une pensée pour les coureurs qui sont anonymes dans le peloton et parviennent à finir le Tour. Dans le sport, on ne prête attention qu’aux premiers. C’est dommage, car le mérite revient encore plus aux sans grades. Je leur tire mon chapeau. Si je le compare avec mon ancien métier de joueur professionnel, j’ai toujours pensé qu’au foot, on peut se reposer pendant les 90  minutes d’un match. On ne court pas toujours. En vélo, si tu t’arrêtes, tu n’avances plus. Pour être ici dans le Tour, il faut être un sacré gaillard.

Actuellement quels coureurs vous fascinent?

Il n’y en a pas qu’un seul. Il y a les rouleurs, les grimpeurs, les sprinteurs. J’ai de l’admiration pour tous. Les sprinteurs comme Sagan, Cavendish, Kristoff m’impressionnent fortement. En montagne, Contador, Quintana, Nibali, Froome pour ne pas l’oublier. Martin m’a plu également sur les pavés. Je n’ai pas une idole en particulier comme du temps de Merckx ou Hinault qui étaient au-dessus. Ici, le groupe des vainqueurs possibles du Tour s’est considérablement élargi ces dernières années.

Vous êtes personnellement né en pleine période Charly Gaul. Racontez-nous…

C’était une fierté énorme pour tout le pays. Il représentait le Grand-Duché en France, mais pas seulement, dans le monde entier. Il a fait bouger tout le Luxembourg. Tout le monde regardait la télé lorsque Charly Gaul était sur le Tour, mais aussi sur le Giro ou la Vuelta. Il restera à tout jamais comme le grand coureur luxembourgeois. Il m’a fasciné.

Au-delà du champion, il y avait l’homme. Vous l’avez connu?

Oui, et par hasard d’ailleurs. Après ma carrière, j’ai été gérant à Cactus Howald et il accompagnait sa femme pour les courses. Mais il évitait de pousser le caddie. Il restait assis sur un banc à l’extérieur. Vu que je connaissais son épouse, j’ai fini par lui demander si Charly était par là. J’ai pris mon courage à deux mains et je suis allé le trouver. Il connaissait juste mon nom. C’était le début d’une amitié particulière. Mon rêve d’enfance de le rencontrer s’était matérialisé.

Rétrospectivement, vous aviez compris son long retrait de la scène publique?

À l’époque, j’étais comme tout le monde, je ne comprenais pas. Il a fallu deux décennies et le départ du Tour de France en 1989 de Luxembourg pour que ses vrais amis le remettent en selle. Il avait retrouvé une deuxième jeunesse. Dans les discussions que j’ai pu avoir avec lui, il fallait lui tirer les vers du nez. Ce n’était pas un gars comme moi qui parle facilement. À la fin, il s’était resocialisé et c’est très bien ainsi. J’étais content pour lui.

C’est difficile lorsqu’on a été un sportif connu et reconnu de retrouver sa place dans la vie?

Tout dépend des personnes. Moi, je n’ai pas connu une après-carrière difficile. Je savais que je devais retravailler au Luxembourg. Lorsque j’ai retrouvé des métiers «normaux», on ne m’a pas fait de cadeau, ni à la BIL (NDLR  : il y travailla de 1981 à 1984), ni chez Cactus (de 1984 à 2012). J’ai dû faire mon travail comme tous les autres. Aujourd’hui, c’est logique, le nom de Nico Braun n’est plus vraiment dans les bouches des journalistes, mais cela me fait toujours plaisir lorsqu’on m’interpelle. Lorsque j’ai rejoint le cabinet de mon médecin de famille actuel, il m’a indiqué qu’il était fan et venait me voir, enfant, au FC Metz. De temps en temps, ça fait plaisir et je réponds toujours à des courriers, venus essentiellement d’Allemagne. Ces minutes-là me font plaisir.

Revenons au Tour de France et à ces premières étapes…

Il n’y a pas de mot. On se demande comment c’est possible de faire ça. L’étape des pavés, c’était une vraie bataille. Nibali a tout fait pour lâcher ses rivaux. C’était grandiose, je suis fasciné. Ce n’est pas n’importe qui qui peut faire ce sport-là.

Les Luxembourgeois présents, vous les jugez comment?

J’étais curieux de les voir à l’œuvre, surtout Bob Jungels. C’était intéressant dans la première étape. Même Fabian Cancellara avait parlé de lui. Cela n’avait pas échappé au grand public. Il n’a pas déçu, quinzième à 22 ans, c’est prometteur. Ben (Gastauer) et Laurent (Didier) poursuivent leur route. Ils ne sont pas devant au classement général, mais ce n’est pas leur rôle. Ces gars- là doivent faire des efforts et on ne doit pas leur demander l’impossible. Bob me semble promis à un grand avenir. Il est tout jeune et a les deux pieds sur terre. Je crois en lui.

Propos recueillis par Denis Bastien

 

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