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Mineur isolé : la France condamnée par la CEDH


Dans leur arrêt, les juges dressent un portrait cauchemardesque des conditions de vie dans la "Jungle", nom officieux de ce campement de bric et de broc, au nord-est de Calais. (photo AFP)

Manque d’eau, de nourriture, abri insalubre, exposition aux violences sexuelles : la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné jeudi la France pour avoir abandonné à son sort un Afghan de 12 ans lorsqu’il vivait sur le camp de « la lande » de Calais (nord) en 2016.

L’enfant, parti d’Afghanistan un an plus tôt, a « vécu durant plusieurs mois dans le bidonville (…) dans un environnement totalement inadapté à sa condition d’enfant et dans une précarité inacceptable au regard de son jeune âge », a spécifié la CEDH, condamnant la France pour « traitement dégradant ».

Le Défenseur français des droits, Jacques Toubon, a souligné « le caractère majeur » de cet arrêt. L’État doit prendre « la mesure de cette condamnation sévère pour assurer le respect effectif des droits fondamentaux de tous les enfants présents sur le territoire français », a-t-il poursuivi.

Dans leur arrêt, les juges dressent un portrait cauchemardesque des conditions de vie dans la « Jungle », nom officieux de ce campement de bric et de broc, au nord-est de Calais, qui a accueilli jusqu’à 10000 migrants désireux d’entrer au Royaume-Uni avant d’être démantelé. Accès limité aux soins et à l’eau potable, conditions d’hygiène déplorables, manque de nourriture, promiscuité…

Dans ce contexte, « les mineurs isolés étrangers se trouvaient de surcroît exposés à divers dangers, dont celui de subir des violences physiques et sexuelles », souligne la Cour.

«Tente de fortune avec un accès très compliqué à l’hygiène et une grande insécurité»

Rencontré lors d’une maraude en février 2016, J. « vivait à plusieurs dans une tente de fortune avec un accès très compliqué à l’hygiène et une grande insécurité », a raconté Solenne Lecomte, coprésidente de l’association La Cabane juridique à Calais, qui a accompagné le jeune migrant dans ses démarches auprès de la Cour de Strasbourg.

Alors que la zone sud du campement était évacuée par les autorités, la tente du jeune homme a été détruite. Un juge des enfants avait ordonné sa mise à l’abri et J. s’était déclaré « favorable » à cette solution, note la CEDH. Mais cette décision n’a pas été exécutée. Quelques semaines plus tard, le préadolescent a quitté la France pour entrer clandestinement au Royaume-Uni où il a été recueilli par les services britanniques de l’aide à l’enfance.

La CEDH « estime que ces circonstances particulièrement graves et l’inexécution de l’ordonnance du juge des enfants (…) constituent une violation des obligations pesant » sur la France. À Calais, « les autorités compétentes n’avaient pas même identifié le requérant comme tel », déplorent les juges européens, estimant que « les moyens mis en œuvre pour identifier » les mineurs isolés étrangers étaient « insuffisants ».

Le préfet du Pas-de-Calais, représentant l’État, a assuré que la situation visée par l’arrêt datait du « temps de la lande » et que la situation se présente « dans un nouveau contexte différent » aujourd’hui.

Selon l’association Salam, vivraient actuellement à Calais « 500 à 600 » migrants. « Le problème existe encore aujourd’hui, avec un nombre important de mineurs non accompagnés qui dorment dehors », affirme Didier Degrémont, président du Secours catholique dans le Pas-de-Calais.

AFP

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