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Éducation : les programmes d’histoire débattus sur fond de violentes polémiques


La ministre de l'Education nationale Najat Vallaud-Belkacem à Nancy le 1er juin 2015. (Photo : AFP)

Les futurs programmes d’histoire, dont la première mouture a généré de violentes polémiques sur la place de la chrétienté, des Lumières ou le «récit national», seront débattus ce mercredi à la Sorbonne.

Parmi les participants à ce forum ouvert par la ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem figurent des détracteurs de certains aspects du projet, comme l’historien Pierre Nora, d’autres qui l’ont défendu et des représentants d’associations de professeurs d’histoire.

Cette journée est organisée par le Conseil supérieur des programmes (CSP), instance indépendante chargée par la loi de 2013 de rédiger les programmes. Elle se tient parallèlement à la consultation en cours des enseignants après laquelle les programmes du CP à la troisième seront amendés, comme l’avaient été ceux, plus consensuels, de maternelle. Ils seront finalisés en septembre pour entrée en vigueur à la rentrée 2016.

«Compte tenu de polémiques», le CSP organise ce forum «pour recueillir les avis à la fois les plus informés et les plus libres qui soient», selon son président Michel Lussault.

La première version des programmes a déclenché de vives critiques d’historiens, intellectuels ou politiques, parfois très éloignées des textes – d’où les propos de Najat Vallaud-Belkacem s’en prenant aux «pseudo-intellectuels». Certaines maladresses dans leur rédaction, reconnues par Michel Lussault, ont aussi pu favoriser de mauvaises interprétations.

Certains reprochent aux futurs programmes de remplacer l’enseignement de la chrétienté par l’islam, ce qui est faux: l’islam sera enseigné en cinquième, comme il l’était déjà, le judaïsme et la chrétienté seront toujours enseignés en sixième, car les programmes, contrairement à ce qui a parfois été dit, sont chronologiques.

D’autres critiquent une distinction entre les périodes obligatoires et celles au choix de l’enseignant, dont les Lumières, présentes par ailleurs dans les cours d’histoire des arts.

Cette distinction «vise à éviter que l’apprentissage de l’histoire se limite à une mémorisation éphémère de faits et de dates au lieu d’introduire à une réflexion sur le passé», expliquent dans Le Monde deux membres du CSP, Denis Paget et Patrick Rayou.

«Discours du désastre»

Le président du CSP a «admis que la rédaction de ces programmes d’histoire comportait certains défauts, qui ne les rendaient pas clairs, et notamment cette histoire d’obligatoire-facultatif, sur laquelle je souhaite que l’on revienne», a expliqué Najat Vallaud-Belkacem.

Certains fustigent aussi une tendance à la «repentance», jugeant trop grande la place accordée aux pages sombres de l’histoire de France, au détriment des périodes glorieuses.

«Tout ce qui rappelle tant les racines chrétiennes de la France que le fait national (conflits, annexions de provinces, traités entre États) se trouve passé sous silence», a déploré dans Le Figaro Patrice Gueniffey, directeur d’études à l’École de hautes études en sciences sociales (EHESS).

Ces programmes portent «une forme de culpabilité nationale qui fait la part belle à l’islam, aux traites négrières, à l’esclavage et qui tend à réinterpréter l’ensemble du développement de l’Occident et de la France à travers le prisme du colonialisme et de ses crimes», a renchéri Pierre Nora auprès du Journal du dimanche.

Pour Najat Vallaud-Belkacem, le programme «doit raconter un récit national, pas un roman national, c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas de fiction». Il faut «faire comprendre aux jeunes gens le monde dans lequel ils vivent, en connaissant le passé de la France» mais également «la France dans le monde». «Les périodes glorieuses comme les périodes sombres servent à comprendre comment la France est devenue la France.»

«Depuis les années 1980, toute réécriture de programmes d’histoire s’accompagne d’un discours du désastre», rappelle dans un blog Laurence De Cock, professeur d’histoire et membre du collectif Aggiornamento.

Or l’école a accueilli des enfants «héritiers de l’immigration, qui, progressivement, sont venus interroger les poncifs du récit national». «Plus ou moins maladroitement», les programmes «se sont ouverts à l’altérité», sont revenus sur un passé colonial «encore mal digéré», ajoute-t-elle. «Les questions sont désormais posées et l’objectivité historique ne peut revenir sur ces certitudes, sauf à plaider pour le mensonge d’État.»

AFP

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