Poursuivi pour proxénétisme aggravé, Dominique Strauss-Kahn a été relaxé vendredi en correctionnelle dans l’affaire dite du Carlton de Lille, qui clôt la série de scandales sexuels ayant brisé la carrière d’un homme tenu un temps comme le favori pour l’Elysée.
Pas de soulagement apparent toutefois sur le visage grave de l’ancien directeur général du FMI, qui n’a affiché un large sourire qu’après la fin de l’audience. DSK s’est eclipsé rapidement, laissant à un de ses avocats, Me Henri Leclerc, le soin de dresser le bilan d’un dossier à charge qui s’est écroulé avec une relaxe quasi générale des prévenus.
Dominique Strauss-Kahn sort donc blanchi de cette épreuve, plus de trois ans après le début de l’affaire, le tribunal ayant estimé qu’il avait eu « un comportement de client non répréhensible par la loi pénale ». « Quand bien même il en avait connaissance (de la qualité de prostituée des participantes), ce qui n’est pas démontré, il n’a fait que bénéficier des modalités d’une prestation sexuelle de groupe », organisée par David Roquet et Fabrice Paszkowski, a estimé le tribunal.
Si le parquet n’a eu de cesse de demander la relaxe de DSK, laissant planer un suspense tout relatif à l’issue des débats, il avait demandé des peines de prison avec sursis pour de nombreux prévenus et même de la prison ferme à l’égard de Dominique Alderweireld, alias Dodo la saumure, tenancier assumé de maisons closes, mais ce dernier a également été relaxé.
Le tribunal a également prononcé la relaxe pour sa compagne, Béatrice Legrain, et pour les anciens responsables de l’hôtel Hervé Franchois et Francis Henrion, ou encore l’avocat Emmanuel Riglaire. L’écrasante majorité des prévenus a été relaxée, à l’exception de René Kojfer, ancien responsable des relations publiques du Carlton, condamné à un an de prison avec sursis. A l’exception de ce dernier, le tribunal a estimé que les prévenus avaient agi comme de simples « clients ».
Les deux amis entrepreneurs, principaux organisateurs des soirées, également relaxés par le tribunal dans ce volet de l’affaire, ont en revanche été condamnés à de la prison avec sursis dans le volet financier de l’affaire, tout comme une troisième prévenue, accusée d’avoir libellé les factures. Relaxe également pour le commissaire Jean-Christophe Lagarde, qui a participé à des voyages à Washington, à l’époque où DSK y était encore en poste.
René Kojfer, grand ami de Dodo, qualifié par le procureur de « sergent-recuteur de la prostitution lilloise », est donc le seul à avoir été reconnu coupable de proxénétisme.
En préambule d’une lecture qui a duré un peu plus de deux heures, le président Bernard Lemaire a souligné la « complexité du dossier », son « impact médiatique » avec « trois volets » et de « nombreuses victimes »: « le tribunal a souhaité expliquer publiquement son jugement ».
Accusé de proxénétisme aggravé en bande organisée comme 12 des autres personnes comparaissant à ses côtés (le 14e prévenu ne comparaissait que pour complicité d’escroquerie), DSK encourait en théorie jusqu’à 10 ans de prison et 1,5 million d’euros d’amende. Mais au terme des trois semaines de procès en février, le parquet, trouvant les charges retenues par l’instruction non étayées, avait requis sa relaxe « pure et simple ».
Combatif à la barre du tribunal, DSK avait farouchement nié être l’instigateur des soirées libertines auxquelles il participait, et avoir été au courant de la profession des prostituées qu’il y rencontrait, après une autre affaire à connotation sexuelle, celle du Sofitel de New York en mai 2011, qui avait anéanti sa carrière politique.
Tout au long du procès, le tribunal a tenté de démêler l’écheveau des différents cercles évoluant dans cette affaire: d’anciens dirigeants de l’hôtel Carlton, d’où l’affaire est partie, aux amis du Nord de DSK. Lors de la lecture de ses motivations, le président du tribunal a évoqué à plusieurs reprises de multiples imprécisions dans l’instruction, et les contradictions dans les témoignages de prostituées.
Au-delà des charges retenues et de l’instruction, pilonnée à boulets rouges par la défense, le procès s’est parfois transformé en débat autour de la prostitution et de la législation qui l’entoure. Dépassée, selon les avocats de la défense. A compléter, pour les parties civiles.
AFP