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COP21 : l’heure de vérité a sonné


Le secrétaire d'État américain, John Kerry. (photo AFP)

L’heure de vérité a sonné pour les ministres de 195 pays, qui, encouragés par une atmosphère positive, mettaient mardi les bouchées doubles pour trouver les compromis nécessaires à un accord sur le climat. Un premier bilan de leurs travaux étant attendu en fin de journée.

Pour l’ambassadrice française, Laurence Tubiana, en première ligne de l’organisation des discussions, celles-ci ont « avancé sur tout »: « il n’y a aucun sujet qui a bloqué à ce stade, aucun. Toutes les parties, même les pays réputés plus difficiles, nous disent on veut y aller« .

En cette « semaine de l’espoir », le président de la COP21, Laurent Fabius, a mis la pression sur les négociateurs pour qu’un nouveau projet d’accord soit produit mercredi, deux jours avant la fin officielle de la réunion. Dans la ruche du parc des expositions du Bourget, les délégués se partagent entre consultations bilatérales, informelles, et grandes réunions pour faire le point collectivement sans oublier personne. Car dans ce processus où il faudra vendredi le consensus de 195 Etats membres, la confiance entre pays du Nord et du Sud reste un acquis fragile, après avoir été mise à mal dans le passé, en 2009 à Copenhague en particulier. Lundi soir, en séance plénière, les délégués ont salué « l’esprit de coopération et la volonté de compromis » animant l’assemblée, même s’ils n’ont pas fait état de percée.

Mardi, « c’est une journée charnière », souligne Pierre Radanne, expert climat et conseiller de pays africains. « On rentre dans les moments sérieux. Et ça peut être compliqué. » L’unanimisme quelquefois grandiloquent des discours des 150 chefs d’Etat, à l’ouverture de la réunion le 30 novembre, paraît loin. « Le problème est que, quand vous négociez, certains pays n’expriment pas le même degré d’enthousiasme », souligne le commissaire européen Miguel Arias Canete: « quand vous entrez dans le détail, c’est plus difficile! ».

« Marchandage »

« Ils mettent enfin les mains dans le cambouis des négociations, ce qui est difficile », explique Jennifer Morgan du groupe de réflexion américain World Resources Institute. « Il y a un marchandage compliqué, qui est inévitable. Et c’est bien ». Sur la table des négociations, les dossiers épineux sont empilés, et bien connus. L’Union européenne et les Etats-Unis réclament que le financement des politiques climat du Sud ne soit pas limité aux pays industrialisés. Mais ceux-ci doivent assumer leurs promesses passées, répondent les pays en développement.

La délicate question des « pertes et dommages » pour les préjudices infligés par le climat, est revenue dans le projet de texte, mais les Etats-Unis refusent d’y voir figurer le terme de « compensation ».

L’Arabie saoudite renâcle

Autre point dur, la révision régulière des mesures pour limiter les gaz à effet de serre, à ce stade insuffisantes pour contenir le réchauffement sous le seuil de +2° par rapport à la Révolution industrielle. La date de la première révision elle-même fait débat. Or les scientifiques soulignent que, pour rester sous 2°C, les émissions devraient atteindre très vite leur maximum. À ce stade le monde file vers +3°, bien au-delà du supportable pour de nombreuses espèces et écosystèmes.

« Les zones de négociations sont claires. Les progrès ne sont pas significatifs, mais ce n’est pas surprenant: rien n’est acquis avant que tout soit acquis, » souligne l’Américain Eliott Diringer, observateur de longue date des négociations. « Il faut voir comment tout ça s’emboîte, il y a toujours le risque que certains pays se mettent en situation d’obstruction », prévient Pierre Radanne.

Tête de pont des pays pétroliers, l’Arabie saoudite renâcle sur la plupart des points. Inde, Russie, certains pays les moins avancés sont autant d’États susceptibles de ralentir les discussions. Laurent Fabius devait recevoir mardi les représentants sud-africain, indien, chinois. Un dîner des chefs de délégations est prévu avant une nuit qui s’annonce longue. « Les gens travailleront jusqu’à la fin d’après-midi, ils prépareront leurs grandes conclusions à 19H00 (18H00 GMT) et après on s’embarquera dans la préparation » du texte attendu mercredi, explique Mme Tubiana: « Je pense que ce soir on ne dort pas ».

AFP