Course-poursuite, coups de feu et prise d’otage : les événements se précipitaient vendredi dans le nord de la France, où d’importantes forces de l’ordre ratissent la région pour retrouver les frères Kouachi, deux jihadistes français accusés du massacre de 12 personnes au journal Charlie Hebdo.
Chaque maison des villages aux alentours de Villers-Cotterêts a été minutieusement fouillée par les forces spéciales. (Photo : AFP)
Une prise d’otage était en cours dans une entreprise d’une commune au nord-est de Paris, a indiqué une source proche du dossier, peu après qu’une source policière eut fait état de coups de feu et d’une course poursuite avec deux suspects dans la région.
C’est dans cette zone, placée en état d’alerte maximum, que se concentre depuis trois jours la chasse à l’homme contre les deux frères Kouachi, suspects numéro 1 de l’attentat contre Charlie Hebdo. Au fil des informations recueillies, la responsabilité de Saïd Kouachi dans le carnage mercredi au siège du journal satirique prenait de l’ampleur alors que celle de son frère cadet, Chérif, fiché par les services antiterroristes en France, avait dans un premier temps était mise en avant.
A Washington, des responsables américains ont en effet révélé que les frères d’origine algérienne Chérif, 32 ans et Saïd Kouachi, 34 ans, se trouvaient depuis des années sur la liste noire américaine du terrorisme, et que Saïd Kouachi s’était entraîné au maniement des armes au Yémen en 2011. Les frères Kouachi étaient sur « notre liste de surveillance depuis des années », a révélé un responsable américain des forces de l’ordre sous le couvert de l’anonymat. Les deux hommes figurent dans les bases de données américaines des personnes suspectées de terrorisme, y compris sur la « No Fly List » qui interdit à ceux qui y figurent de prendre des vols au départ ou à destination des Etats-Unis. Ajoutant à l’inquiétude face à la menace jihadiste, le chef du MI5, le service de renseignement intérieur britannique, a déclaré jeudi qu’un groupe islamiste extrémiste se trouvant en Syrie projetait « des attentats de grande ampleur » en Occident.
Au lendemain d’une journée de deuil national, une troisième réunion de crise a débuté vendredi matin à l’Elysée autour du président socialiste François Hollande et du Premier ministre Manuel Valls, centrée sur les recherches et les dispositifs de sécurité sur le territoire, mais elle a été écourtée en raison des événements en cours.
> Hommage dans les mosquées
Dans une atmosphère d’union sacrée, les représentants de l’islam de France ont appelé les fidèles à condamner le terrorisme et à « rejoindre massivement la manifestation nationale » à la mémoire des victimes prévue dimanche à Paris. Vendredi, jour de prière pour les musulmans, un hommage sera rendu aux victimes de l’attentat dans toutes les mosquées de France, alors que l’attentat a été salué jeudi par le groupe jihadiste Etat islamique (EI), dont la radio a qualifié de « héros » les auteurs du massacre.
Cet attentat, le plus meurtrier en France depuis un demi-siècle, a provoqué une onde de choc dans tout le pays et à l’étranger. Des pancartes, tweets et inscriptions « Je suis Charlie » ont fleuri par milliers en hommage aux 12 morts, dont huit membres de l’équipe Charlie Hebdo et deux policiers, et fait onze blessés. Dans un geste très remarqué, le président américain Barack Obama s’est rendu jeudi à l’ambassade de France à Washington pour rendre hommage aux victimes de l’attentat en signant le livre de condoléances ouvert à l’ambassade. « Nous avançons ensemble, convaincus que la terreur ne vaincra pas la liberté et les idéaux qui sont les nôtres, les idéaux que illuminent le monde. Vive la France ! », a-t-il écrit, ces trois derniers mots écrits en français.
Le président américain s’est recueilli à l’ambassade de France à Washington. (Photo : AFP)
L’équipe de Charlie Hebdo a annoncé que l’hebdomadaire sortirait un « numéro de survivants » mercredi, avec un tirage exceptionnel d’un million d’exemplaires, contre 60 000 habituellement.
> Union nationale écornée
Le climat de tension extrême qui règne en France depuis l’attentat – certains éditorialistes et hommes politiques n’hésitant pas à parler de « guerre » – a été exacerbé avec un nouvel attentat jeudi matin à Montrouge, près de Paris. Cette attaque a coûté la vie à une jeune policière stagiaire, et un agent municipal a été blessé. Aucun lien à ce stade n’a été établi avec l’attentat contre Charlie Hebdo, selon le ministre de l’Intérieur, qui a précisé que deux personnes étaient gardées à vue dans cette affaire. Le président François Hollande a multiplié les entretiens avec les dirigeants politiques, conviés à la « marche républicaine » de dimanche à laquelle sont attendues des centaines de milliers de personnes. Mais l' »union nationale » prônée par le président a été entamée par une polémique avec le Front national (extrême droite), qui a dénoncé son « exclusion » du rassemblement.
AFP