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Cazeneuve condamne les maires désireux de n’accueillir que des réfugiés chrétiens


"Les chrétiens d'Orient doivent être accueillis mais il y a aussi des musulmans qui sont persécutés avec le même degré de barbarie", a recadré Bernard Cazeneuve. (photo AFP)

La solidarité s’organise en France, mais quelques maires se sont dits prêts à accueillir des réfugiés « à condition qu’ils soient chrétiens ». Une demande d’ores et déjà condamnée par Bernard Cazeneuve qui reçoit ce mardi le président de l’Association des maires de France et les représentants des cultes.

Ces entretiens, prévus dans l’après-midi, doivent baliser le terrain avant une réunion des maires, qui se sont portés volontaires pour l’accueil de réfugiés, samedi au ministère de l’Intérieur. Il s’agira pour l’Etat « de mettre à disposition des collectivités l’ensemble des outils et des financements nécessaires », pour « réunir dans des conditions dignes l’accueil des réfugiés persécutés », a indiqué M. Cazeneuve lundi, alors que la France s’est déclarée prête à accueillir 24 000 réfugiés dans les deux années à venir.

Mais une poignée de maires ont provoqué un coup d’éclat en assurant qu’ils ne prendraient que des chrétiens. Le député-maire de Roanne Yves Nicolin (Les Républicains) a expliqué que sa ville pourrait « accueillir peut-être une dizaine de familles mais à la condition qu’il soit bien question de réfugiés chrétiens qui sont persécutés parce que chrétiens en Syrie par Daesh ». « Ce que je souhaite c’est qu’on puisse avoir l’absolue certitude que ce ne sont pas des terroristes déguisés », a-t-il dit.

Celui de Belfort, Damien Meslot (Les Républicains), a affirmé qu’il réfléchissait à accueillir des « familles de chrétiens syriens et de chrétiens d’Irak », parce qu’ils sont « les plus persécutés ». Des prises de position condamnées au ministère de l’Intérieur. « Cette distinction, je ne la comprends pas, je la condamne et elle me paraît funeste », a réagi Bernard Cazeneuve. « Les chrétiens d’Orient doivent être accueillis mais il y a aussi des musulmans qui sont persécutés et il y a d’autres minorités qui le sont avec le même degré de barbarie », a-t-il ajouté.

Même s’il a regretté « l’interprétation qui en est faite par certains médias », M. Nicolin a maintenu ses propos en assurant mardi sur France Bleu Saint-Etienne que « ce n’est pas parce que nous sommes généreux que nous devons être aveugles et que nous devons le faire n’importe comment, sans prendre aucune précaution ».

« Contraire aux conventions internationales »

Ce genre de prises de positions, très minoritaires, semblent également hasardeuses d’un point de vue juridique: « C’est absolument contraire à toutes les conventions internationales », a expliqué Serge Slama, maître de conférences en droit public à Paris Ouest-Nanterre.

La Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés stipule que les Etats signataires en appliqueront les dispositions « sans discrimination quant à la race, la religion ou le pays d’origine », et ce principe « est aussi rappelé dans un certain nombre de directives européennes », ajoute-t-il.

A la Conférence des évêques de France, on prend ses distance avec de telles propositions: « Evidemment nous n’effectuons aucun tri, ça n’a pas lieu d’être et c’est contraire à l’esprit des religions », a assuré Vincent Neymon, secrétaire général adjoint de la Conférence.

Le sénateur Jean-Pierre Raffarin (Les Républicains) a lui aussi assuré qu' »on peut difficilement être sélectif », avant d’ajouter : « Je comprends qu’on puisse dire cela. C’est vrai qu’il y a une question majeure des chrétiens aujourd’hui, c’est vrai qu’on peut considérer que dans le malheur il y a ici une priorité parce qu’on est en train d’exterminer des gens. »

Au-delà de la polémique, les associations redoutent le message de « choix » sous-jacent. « Nous sommes scandalisés. Il est inacceptable qu’un élu républicain se réfère à des critères de discrimination sur des bases religieuses », a réagi Geneviève Jacques, présidente de la Cimade, qui fait partie de la Fédération protestante de France.

« Cela envoie un signal détestable comme quoi une partie de la France chrétienne pourrait faire un choix » parmi les réfugiés, a ajouté la responsable, en déplorant qu' »à partir du moment où on considère comme admissible de faire des discriminations entre les bons réfugiés et ceux qu’on ne préfère pas, on introduit au coeur de l’idée d’accueil des considérations qui ruinent le concept même d’ouverture à ceux qui se trouvent sur le chemin de l’exode ».

 

AFP / S.A.

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