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Au procès Hermant, un douanier en eaux troubles


Le douanier qui avait recruté Claude Hermant a entretenu des relations troubles avec son « indic», notamment en lui achetant une arme . (Photo : RL)

Le procès à Lille de Claude Hermant, soupçonné d’être au coeur d’un trafic d’armes ayant alimenté Amedy Coulibaly dans l’attentat de l’Hyper Cacher, s’est focalisé jeudi sur les méthodes «borderline » d’un douanier. Il est poursuivi pour un achat d’arme auprès de cette figure d’extrême droite.

Sébastien L., agent de renseignement des douanes, a connu Hermant fin 2010 et après l’avoir utilisé comme «indic», l’a présenté aux gendarmes qui l’ont fait travailler de 2013 à 2015. Si ceux-ci ont été malmenés mercredi sur l’éventuel «blanc-seing » donné à Claude Hermant, dont il aurait abusé pour faire son trafic, le douanier a été encore plus chahuté jeudi.

Une vidéo enregistrée par Hermant lui-même lors d’une de leurs rencontres informelles, à propos d’un fusil mitrailleur démilitarisé, a été le fil conducteur d’un interrogatoire musclé du président Marc Trévidic. On y entend en effet la fascination – simulée, réelle? – du douanier pour l’engin de mort. «Vous avez beaucoup changé de version lors de vos auditions», a reproché le président. Avant d’assurer n’avoir pas pris l’arme, «vous dites d’abord que vous l’avez eue mais que vous l’avez jetée dans la Deûle», un canal lillois. Grattant son crâne dégarni, le douanier, 41 ans, très tendu, a répliqué: «J’ai subi une énorme pression de ma hiérarchie, ils m’ont donné un scénario à décrire» au juge instructeur. Pourquoi avoir autant joué avec le feu en faisant mine de vouloir acheter l’arme? «Je voulais tester Hermant pour savoir si c’était quelqu’un de sérieux, s’il avait les moyens de ses prétentions», a expliqué Sébastien L.

De l’argent pour dépanner

«On n’a pas besoin de beaucoup tester Claude Hermant sur les armes, surtout qu’à l’époque c’est la section de recherches des gendarmes qui l’utilisait comme indic», a noté Marc Trévidic. «Comme tant d’autres», le douanier et son informateur ont continué à échanger, même s’il n’était plus informateur dûment répertorié, a lâché Me Emmanuel Riglaire, son avocat. Et «si des gens n’étaient pas « borderline » comme lui, je ne sais pas s’il y aurait beaucoup de choses dans le registre» des forces de l’ordre, en terme de renseignements, a-t-il ajouté.

Mais le douanier est bel et bien poursuivi pour achat d’arme et non simplement pour des méthodes jugées excessives. Claude Hermant a défendu la version de son ancien «aviseur». «Il vous a remis de l’argent pour cette arme?», l’a questionné l’un des deux magistrats du parquet. «Oui mais pour me tester», a répondu Hermant. «Vous l’avez remboursé j’espère?» «Non», a reconnu cet ancien boxeur, figure des milieux identitaires lillois et ancien membre du Front national. «Je n’ai pas le souvenir d’avoir remis de l’argent à Hermant. Mais c’est possible de dépanner un informateur quand il a des difficultés passagères», a fait valoir Sébastien L.

Devant ses hésitations à citer la déontologie des douaniers, l’autre magistrat du parquet a ironisé: «Et vous avez dit que vous vouliez désormais vous consacrer à la formation des douaniers… Dans la gestion des « indics », par exemple?»

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