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Vivre-ensemble interculturel : «On n’a pas avancé depuis 15 ans», estime le CLAE 


Pour Anita Helpiquet, le projet de réforme porté par l’ex-ministre Corinne Cahen n'est pas à la hauteur des enjeux. (photo Fabrizio Pizzolante)

Précurseur en matière d’intégration et de citoyenneté au Luxembourg, le CLAE voit aujourd’hui des années d’efforts balayées par le projet de loi sur le vivre-ensemble interculturel.

Déposé le 20 février dernier par l’ex-ministre de la Famille et de l’Intégration, Corinne Cahen, le projet de loi sur le vivre-ensemble interculturel, actuellement examiné en commission parlementaire, peine à convaincre les associations engagées de longue date dans le combat pour la citoyenneté. À l’image du CLAE, qui publie un avis cinglant.

Ainsi, pour la directrice du Comité de liaison des associations d’étrangers, Anita Helpiquet, ce texte censé réformer la loi en vigueur depuis 2008, n’apporte rien de nouveau et ressemble davantage à un remodelage sémantique qu’à une vraie stratégie politique. Seul l’exposé des motifs trouve grâce à ses yeux, et pour cause : «On aurait pu l’écrire, tant on y retrouve notre philosophie. Le concept d’étranger est enfin abandonné au profit de celui de citoyen résident, et de manière assez habile, les frontaliers sont également inclus. Ce qui redessine l’espace et les relations au sein de la population», commente-t-elle, tout en saluant un contrepied aux peurs et replis identitaires qui sévissent en Europe.

Dommage que le projet de loi se borne à ce changement de paradigme, pointe le CLAE, qui aurait préféré un plan d’attaque pour résoudre les problèmes concrets qui se posent aux personnes arrivant sur le sol luxembourgeois. «Face aux défis du logement, de l’insertion sur le marché du travail, de la scolarisation des enfants, de la santé ou encore de la formation, si on veut une politique d’accueil efficace, il faut travailler ces sujets de manière transversale pour permettre à chacun de prendre sa place dans la société», plaide Anita Helpiquet.

Elle épingle au passage le fait que les mêmes instruments qui ont montré leurs limites par le passé – contrat d’accueil et d’intégration, pacte communal d’intégration, commissions consultatives d’intégration – soient reconduits quasiment à l’identique, alors qu’ils ne suffisent pas : «On est littéralement en 2008, on n’a pas avancé depuis 15 ans. Soyons clairs, ce nouveau contrat d’accueil va permettre de suivre trois cours de langue et d’accéder à des informations, mais sans jamais s’attaquer aux difficultés réelles», regrette la directrice.

Une intégration à sens unique

Le CLAE note aussi que, selon la réforme, l’engagement citoyen ne dépasse pas le territoire de la commune et passe obligatoirement par les commissions du vivre-ensemble interculturel. «C’est une vision simpliste et purement institutionnelle. L’intégration locale est importante, oui, mais aujourd’hui, ce n’est plus seulement là qu’on tisse des relations», poursuit Anita Helpiquet.

Elle fait remarquer que, comme dans l’ancienne version, la loi ne montre qu’une seule direction possible vers l’intégration : celle de la responsabilité individuelle et de l’engagement local. Une conception jugée totalement dépassée. «Il faut reconnaître et impliquer l’ensemble de la société civile, à commencer par les associations héritières de l’immigration», point sur lequel la directrice du CLAE met directement en cause l’ex-ministre. «Elle le dit elle-même : elle n’a jamais compris le rôle des associations issues de l’immigration dans l’accueil, la création de nouvelles solidarités, ou la valorisation des différentes cultures pour que tout le monde se sente à égale dignité dans le pays.»

Ce qui amène à une injustice difficile à digérer : «Nous qui avons porté le concept de participation citoyenne contre vents et marées durant des décennies, en sommes écartés au moment même où il s’impose», déplore-t-elle. «C’est quand même cynique.» Amer, le CLAE reste convaincu que ce projet de loi tant attendu sur le vivre-ensemble passe complètement à côté de son sujet et des véritables enjeux.

Un commentaire

  1. On parle de « personnes arrivant sur le sol luxembourgeois », puis on passe à autre chose, alors que le vrai problème se situe dans cette « arrivée ».
    D’où?
    Comment?
    De quels moyens disposent-elles?
    Etc.