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Viol : l’attitude du prévenu parle pour sa victime présumée


Manuela a été victime d’un viol sous la menace d’une bouteille d’acide sulfurique, selon le parquet, contrairement à ce que prétend le prévenu. (photo archives LQ)

La déposition du prévenu, jeudi, n’a fait que conforter la version de sa victime présumée et en a dit long sur sa personnalité. Selon le parquet, «il n’a aucune prise de conscience».

Manuela, 58 ans, avait toutes les raisons du monde de vouloir que Joachim sorte de sa vie. Joachim en avait une pour ne pas partir : le train de vie que son ancienne compagne lui permettait de vivre à lui, toxicomane sans emploi. «Je voulais partir, mais sans argent je me serais retrouvé à la rue», a-t-il confessé à la barre de la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg jeudi après-midi.

Le prévenu s’est accroché jusqu’au jour où il a compris qu’elle commençait à échapper à son emprise et voulait sortir de l’isolement dans lequel il l’avait petit à petit plongée. Alors, il a, ressort-il du réquisitoire du parquet, joué sa dernière carte pour tenter de rafler une dernière mise. Celle du viol et de menaces de mort pour extorquer deux reconnaissances de dette à Manuela qui, «par compassion», l’avait déjà couché sur son testament. En échange de quoi, il lui aurait fait vivre un enfer difficilement concevable.

La relation toxique que cet ancien couple de toxicomanes a vécue jusqu’à ce qu’elle s’en libère, a profondément meurtri la victime présumée. Le fait de ne pas avoir été crue immédiatement et que sa parole ait pu être mise en doute également. La représentante du ministère public croit la victime présumée «qui n’a jamais essayé de cacher quoi que ce soit» et a toujours fait «des déclarations constantes», contrairement à Joaquim. «Elle s’est trouvée dans un état de sidération et de distanciation qui a fait qu’elle n’a pas pu dénoncer le viol plus rapidement» et n’a pas insisté face à l’absence de réaction du policier qui n’a pas cherché à comprendre ce qui se cachait derrière sa phrase : «J’ai été violée et il peut rester dans la maison.»

Malgré tout, elle ne s’est pas découragée et a dénoncé les faits, rassemblé les preuves de ce qu’elle avance, forgé sa crédibilité et sa bonne foi. Cela lui a été reproché par la défense et a également coloré le dossier d’une impression de mise en scène. Mais elle a fini par convaincre. L’attitude de Joachim a fait le reste.

«Il n’est pas un fou furieux»

Le prévenu conteste en bloc les accusations : les menaces, le harcèlement, l’abus de confiance, les vols, les extorsions. «Il n’est pas un fou furieux qui raconte n’importe quoi. Il est la victime», assure son avocat. À la barre jeudi, Joaquim a retourné les accusations contre Manuela, a changé ses déclarations et évoqué de mauvaises interprétations lors de ses auditions, a répondu tout et son contraire aux questions répétées de la présidente. Notamment sur l’état de la bouteille d’acide sulfurique utilisée à deux reprises pour menacer Manuela. «Elle était vide», répond-il une première fois. Cinq minutes plus tard, à la présidente qui lui a demandé si la bouteille était pleine, il a répondu : «Je ne sais pas, je ne l’ai pas ouverte.»

L’homme de 51 ans ne convainc pas. Bien au contraire et n’est pas à une incohérence près. Son avocat appuie ses dires en livrant une interprétation différente de celle du parquet, de l’expertise psychologique et des conclusions de l’enquête de police judiciaire. «Il existe un très grand doute quant à la culpabilité de mon client», assure-t-il avant de plaider son acquittement de tous les chefs d’accusation «basés uniquement sur les dires de Madame».

La victime présumée aurait «tout fabriqué de toutes pièces» et rendrait Joaquim «responsable de tout ce qui va mal dans sa vie». «Elle m’empêchait d’aller travailler et empochait le Revis que je recevais», accuse-t-il. «Je n’ai absolument rien à me reprocher. Je n’ai rien fait.» Il accuse Manuela d’avoir profité de l’arrivée de la police pour lui sauter dessus, vêtue d’une nuisette rouge. Malheureusement pour lui, les faits ne se seraient pas produits de cette manière.

La représentante du parquet estime que c’est tout le contraire. «Pour lui, Manuela est la cause de tous ses problèmes. Il n’a aucune prise de conscience. Il n’y a rien. Il campe sur sa contestation, pas sur sa version des faits, parce qu’il en a eu des différentes.» Les infractions desquelles Joachim est accusé sont, pour elle, toutes données et elle a requis une peine de 5 ans de prison à son encontre. À court d’arguments, l’avocat de la défense conclut en disant que «Joaquim n’était pas connu pour être un individu menaçant ou agressif».

Le prononcé est fixé au 28 mars.