Dans une forêt du nord du pays sont conservés des débris d’un Lockheed Hudson de la Royal Air Force britannique abattu pendant la Seconde Guerre mondiale. À découvrir.
Le site en question se trouve sur le sentier ardennais balisé de Clervaux-Troisvierges (CFL 40) et permet au randonneur-visiteur de plonger dans le passé historique lié à la Seconde Guerre mondiale.
En effet, en continuant son chemin en pleine forêt, à Boxhorn, il est possible de se recueillir sur un lieu où se trouvent des morceaux d’une épave d’un avion allié de la Royal Air Force (RAF) britannique, de type Lockheed Hudson. Selon certaines sources, il aurait été abattu par la Luftwaffe allemande dans la nuit du 20 mars au 21 mars 1945, tandis que d’autres documents et témoignages estiment qu’il aurait été descendu par erreur sous les tirs d’un avion allié américain.
Abattu alors qu’il effectuait une mission secrète
Après l’épisode tragique de l’offensive des Ardennes, au cours de laquelle les Allemands espéraient reprendre le terrain perdu et qui avait encore coûté leur vie à des milliers d’hommes, les Alliés reprennent le contrôle des opérations. Les parties réoccupées de la Belgique et du Grand-Duché de Luxembourg sont libérées une seconde fois et l’ennemi est refoulé au-delà de la fameuse barrière du Rhin.
Ce crash trouve en tout cas ses origines dans le projet du commandement allié de parachuter des agents derrière les lignes allemandes, et notamment là où se trouvent rassemblés des travailleurs forcés des pays occupés. Certains rapports mentionnent qu’à bord se trouvaient six membres d’équipage, dont trois agents secrets belges, qui étaient censés débarquer en parachute derrière les lignes allemandes pour une mission secrète.
D’autres sources évoquent, quant à elles, sept membres d’équipage. Baptisée «Walnut», l’opération avait finalement été annulée en raison des conditions météorologiques, tandis que l’appareil avait pris le chemin du retour, à savoir en direction de la base de Tempsford, en Angleterre.
«Avec le temps, des pièces de l’avion ont disparu»
Selon un ouvrage intitulé Flight Most Secret : Air Missions for SOE and SIS, publié chez William Klimber & Co. Ltd en 1981, l’opérateur de la piste de décollage était le SOE (Special Operations Executive), un département créé par Winston Churchill pour que les résistants d’Europe, qui avaient une formation en infiltration, ainsi que des volontaires puissent apporter leur aide aux pays occupés. Par ailleurs, les archives rapportent que les conditions météorologiques de cette nuit de 1945 étaient difficiles : beaucoup de nuages, de même que des averses de pluie, avaient compliqué la mission du Lockheed Hudson.
Gilles Wunsch, qui connaît bien le coin pour y avoir en partie vécu, apporte son authentique témoignage : «Mon père était cheminot et, de ce fait, j’ai habité dans une petite gare à Maulusmühle (entre Clervaux et Troisvierges). Je suis né en 1955 et l’avion s’était écrasé en 1945, soit 10 ans plus tôt. Je me rappelle que lorsqu’on se promenait dans la forêt, après 1 km-1,5 km, on se retrouvait devant l’épave de l’avion. Il faut dire que dans le temps l’épave était plus complète avec notamment encore une partie du cockpit. Avec le temps, des pièces de l’avion ont disparu. Je suppose que les gens qui passaient par là ont ramené certaines pièces chez eux. À l’époque, il n’y avait pas encore de grillage de protection autour de l’épave (NDLR : ce qui est le cas depuis une quinzaine d’années environ).»
Notre témoin poursuit : «De plus, il y a six tombes jouxtant l’épave, celles de trois membres britanniques de l’équipage ainsi que les tombes de trois membres belges. Or, d’après mes recherches, il y avait sept personnes à bord. Apparemment, le pilote – ou commandant de bord – aurait survécu à cet accident. En effet, lorsqu’on observe les tombes où sont spécifiés les grades des militaires tués, on s’aperçoit qu’il y avait un « First Officer », c’est-à-dire un copilote. Par contre, je n’ai jamais trouvé la tombe du pilote.» D’où la thèse selon laquelle le pilote, ou commandant de bord, aurait survécu…
Descendu par erreur par les Américains?
Le site est cependant bien connu, dans le coin du moins. Et ce n’est d’ailleurs pas la seule épave retrouvée dans la région du «grand» Nord du Luxembourg. En effet, «il y a trois ou quatre autres endroits où des avions ont été abattus au-dessus du nord du Grand-Duché. D’ailleurs, pas très loin de Weiswampach, il y a un avion de modèle Halifax qui a été abattu. De manière générale, il était assez fréquent que des avions soient abattus dans la région, surtout de nuit. L’Hudson qui s’est crashé à Maulusmühle effectuait un vol de nuit, car il était parti en mission secrète», rappelle Gilles Wunsch.
Avant, pour lui, d’évoquer la théorie de l’accident «par erreur» : «Les gens racontaient, dans le temps, que l’Hudson de la Royal Air Force, de fabrication américaine, avait été abattu par un chasseur allemand de la Luftwaffe. Mais apparemment, il aurait en fin de compte été descendu par un chasseur allié, américain en l’occurrence, qui, en pleine nuit, aurait pris cet avion britannique pour un avion allemand.»
Soit un fait historique qui n’est pas clarifié, tout comme le mystère entourant le nombre exact de membres de l’équipage à bord : de quoi forcément rendre ce lieu énigmatique et intrigant… Bref, à découvrir!
Claude Damiani
S’armer d’un GPS
Très reculé dans le nord du Luxembourg, le site peut être rejoint à partir de la localité de Maulusmühle (Maulusmillen), qui se trouve après Clervaux et au sud de Troisvierges, lorsqu’on vient de la capitale ou du sud du Grand-Duché.
Un GPS pourra être d’une grande utilité pour trouver un panneau de signalisation indiquant que le lieu se trouve à 300 mètres à pied, au bout d’un petit sentier qui mène à l’entrée de la forêt en amont. Le site est également accessible via le sentier qui fait partie de l’«Escapardenne Eislek Trail».