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Stëmm vun der Strooss : «On alerte depuis des années, en vain»


«Quand le genou est à terre, le système fait tout pour qu’il y reste et je n’aurais jamais parlé comme ça il y a 25 ans», déclare Alexandra Oxacelay.

Directrice de la Stëmm vun der Strooss, Alexandra Oxacelay apprécie que les riverains de la gare de Luxembourg s’organisent pour suggérer des solutions. Il faut maintenant passer à l’action.

«On alerte depuis des années, en vain.» La directrice de la Stëmm vun der Strooss, Alexandra Oxacelay, comprend totalement le désarroi des habitants du quartier Gare à Luxembourg et imagine leurs témoignages qui défilent dans le groupe WhatsApp qu’ils ont créé pour étaler leur quotidien qui baigne dans l’insécurité la plus totale.

«Je comprends leur indignation, même si le problème des sans-abri, des drogués et de tous les défavorisés hante toutes les grandes gares du monde qu’on le veuille ou non.» Pour, elle, il est trop tard pour discuter, il faut agir et cela fait longtemps qu’Alexandra Oxacelay tire la sonnette d’alarme. «Quand les associations appellent à l’aide et lancent des cris d’alarme, elles ne sont pas écoutées et voilà le résultat», dit-elle, amère. Elle se met aussi à la place de toutes ces âmes errantes. «Qui s’en préoccupent et se met à leur place? Ces gens ne vont pas bien mais n’ont pas choisi d’être dans cette situation, ils galèrent, ce sont des laissés-pour-compte dans notre société où le problème majeur c’est le bien-être matériel», observe-t-elle.

Dès qu’une guerre éclate ou perdure quelque part dans le monde, la directrice le ressent dans ses structures. Les réfugiés arrivent en masse. «On n’en a beaucoup plus, avec des nouveaux tous les jours chez nous à la Stëmm», témoigne la directrice. Il y a ceux que l’association a toujours connus et tous ceux qui débarquent avec une vie de misère dans leur sac.

«Quand le genou est à terre, le système fait tout pour qu’il y reste»

«L’agressivité a augmenté, nous sommes obligés de prendre un agent de sécurité en dépit de la présence de nos travailleurs sociaux formés pour s’occuper de ce public en difficulté», reconnaît-elle.  Et puis il y a le nombre, qui ne cesse d’augmenter. «Quand on a un tel nombre de personnes, on ne fait plus un travail de qualité, on gère la masse», confie-t-elle.

«Des jeunes désœuvrés luxembourgeois, des réfugiés, des pauvres, nous avons tous ces publics et il suffit de regarder le système social, pour se rendre compte que tout est fait pour les casser, mais rien n’est fait pour les reconstruire», déclare-t-elle. «Quand le genou est à terre, le système fait tout pour qu’il y reste et je n’aurais jamais parlé comme ça il y a 25 ans, je tiens à le préciser», ajoute Alexandra Oxacelay.

Fut une époque, les assistantes sociales avaient le temps de s’occuper des cas individuellement, mais aujourd’hui elles sont dépassées par les évènements. «On a cru pendant longtemps qu’on était sur une île…», souffle la directrice. Les choses se sont empirées après la crise du covid. «Il y a eu un ras-le-bol de tout, un avenir incertain pour beaucoup de gens qui ressentaient de la peur, on sentait bien cette angoisse latente», témoigne la directrice de la Stëmm vun der Strooss.

Jamais de réponse

L’association ne cesse d’envoyer des courriers à toutes les instances décisionnelles mais n’obtient jamais, sinon rarement, une réponse.  Son problème ne se situe pas seulement à Luxembourg, mais aussi à Esch-sur-Alzette. La structure ouverte au centre paroissial va fermer ses portes, car le bail n’est pas reconduit par le Kierchefong.

«On pouvait accueillir une centaine de personnes pour les repas de midi et nous allons avoir une adresse rue du Canal, à partir du 15 septembre avant de déménager dans la même rue en 2025, mais nous n’aurons pas les mêmes capacités d’accueil, environ moitié moins», estime Alexandra Oxacelay.

La Ville d’Esch a exigé que l’association embauche un agent de sécurité.  «Pour nos clients, il n’y a pas d’améliorations. On n’aura rien fait de plus à Esch que gérer l’urgence», déplore-t-elle. «Partout où il y a de la pauvreté, il y a de la criminalité», rappelle la directrice qui demande des moyens pour gérer la situation, s’occuper de la santé des gens que l’association accueille, mais elle sent un manque de volonté manifeste de la part des autorités.

700 repas servis tous les jours

«Le burn-out ne touche pas seulement les policiers du commissariat de la gare de Luxembourg mais aussi les travailleurs sociaux», témoigne-t-elle encore. «Cela fait 25 ans que je cherche à atteindre un rythme de croisière, mais on travaille comme un service d’urgence d’un hôpital», regrette-t-elle.

En revanche, elle reprend espoir quand elle voit que les gens du quartier veulent aider à trouver des solutions et en proposent. «Ce que je trouve bien, c’est d’en parler», conclut-elle.

La Stëmm vun der Strooss sert tous les jours 400 repas à Hollerich, 200 à Esch, et 100 à Ettelbruck.

Un commentaire

  1. Bravo Madame , ça va enfin commencer à changer !