Luc Holtz est loin d’avoir tiré un trait sur les chances de qualification à l’Euro. Et donc d’y être, lui, avec l’équipe.
On a beaucoup entendu le mot « cruel », lundi soir, au coup de sifflet final de la défaite contre la Slovaquie, qui aurait dû être menée par les Roud Léiwen au bas mot 2-0 à la pause, mais qui gagne finalement sur sa seule occasion. Partagez-vous ce mot-analyse avec les personnes présentes en tribunes ?
Luc Holtz : C’est injuste par rapport au nombre de situations devant le but. Lundi, la meilleure équipe a perdu. Vous savez, quand un joueur du PSG, Skriniar, vient vous voir après le match pour vous dire : « Vous avez une équipe fantastique », ça veut tout dire. Les Slovaques ont plus que souffert, lundi, au stade de Luxembourg. On n’a pas réussi à concrétiser, mais dans le contenu, il s’agit de la performance la plus aboute depuis que je suis sélectionneur. Il ne manquait que l’efficacité. Il aurait juste fallu que nous soyons plus précis dans les vingt derniers mètres, mais on parle de décisions qui se prennent en une demi-seconde, où l’on choisit de frapper plutôt que de servir un coéquipier. À la pause, je leur ai surtout demandé de rentrer dans la surface plutôt que de frapper de l’extérieur. Si on avait pu rentrer plus fréquemment, on aurait sûrement marqué, sauf qu’en deuxième période, Dubravka a montré toute sa classe sur sa ligne.
L’équipe a quand même levé le pied en deuxième période. Surtout l’entrejeu.
Moi je ne trouve pas que nous ayons eu une grosse baisse de régime. Sinon, j’aurais procédé à des changements. Il faut bien admettre qu’un milieu de terrain Barreiro-Martins-Olesen, c’est quand même au-dessus du lot par rapport aux standards luxembourgeois. Ils ont tout fait admirablement bien. Ils ont maîtrisé avec patience et intelligence. Et puis, hé, en face, ils ont de la qualité aussi! Sinon, tu ne marques pas le but qu’ils nous ont mis. Le centreur, Hancko, celui qui vient du Feyenoord Rotterdam, c’est quand même le niveau Ligue des champions (son club évolue dans le groupe E, avec l’Atlético, le Celtic et la Lazio) et sans doute l’un des meilleurs défenseurs d’Eredivisie!
Non, ce n’est pas une baisse de régime, c’est que eux, en face, se sont adaptés et ont élevé leur niveau de jeu. Moi, si j’avais été à la place de leur coach, à la mi-temps, j’aurais remis les pendules à l’heure. Et de fait, ils ont plus allongé en deuxième période pour sauter notre milieu. Cela a limité leurs pertes de balle, ce qui faisait aussi partie de notre plan de jeu.
Croyez-moi, la Géorgie va avoir du mal
Les deux derniers matches de la campagne, contre la Bosnie et au Liechtenstein, vont-ils servir à préparer, désormais, les barrages de la Nations League ?
Non, on jouera les matches à fond parce qu’il reste six points à distribuer et qu’on ne sait jamais au football. Les chances sont restreintes, mais on peut encore y croire. Si on bat la Bosnie et que l’Islande bat la Slovaquie, ils pourraient se retrouver sous une très grosse pression lors du dernier match, contre la Bosnie. Et puis déjà, moi, je veux exploser ce record des 10 points de 1995, pas juste le dépasser comme on l’a déjà fait (NDLR : le Luxembourg en est à 11). Je veux plus de points. Je veux creuser l’écart.
C’est pourtant, si la logique est respectée, une demi-finale de barrages en Géorgie qui vous attend, en mars, devant 50 000 spectateurs.
Oui. Et ce sera dur. Mais ce que je garde c’est qu’hier (NDLR : avant-hier), il s’agissait du match le plus important de notre histoire. Tout le monde le savait, tout le monde le disait et il y avait une certaine pression. Mais l’équipe a su répondre. Elle a montré qu’elle avait franchi un palier : avant, dans ce genre de matches, on n’était pas aussi sereins ni aussi forts. Je ne me fais pas de souci pour la Géorgie : oui, c’est un gros adversaire, avec de grosses individualités et avec un gros public, mais mes joueurs sont matures. Émotionnellement, ils savent gérer. Croyez-moi, la Géorgie va avoir du mal. Allez savoir, peut-être que là-bas, ce sont eux qui auront les occasions et nous qui gagnerons!
Qu’est-ce qui doit être amélioré d’ici là ?
En cinq-six mois? On peut juste attendre de voir ce qui se passe individuellement pour les joueurs. Mais par rapport à la performance d’hier, difficile d’améliorer quelque chose. Parce que l’efficacité, c’est aussi la chance. On doit être persévérants et ne rien lâcher. Et récupérer un Yvandro Borges, un Mica Pinto (NDLR : victime d’une alerte musculaire lundi, d’où son absence du onze de base au profit de Laurent Jans) ou un Flo Bohnert.
Si on va à l’Euro? Je pense que les deux parties auraient à y gagner si Dany Mota nous rejoignait
D’ailleurs, tiens, on parle de mars, mais votre contrat se termine en décembre…
Effectivement.
Et ?
Et on va voir.
Il serait étrange que l’on ne vous offre pas la possibilité de continuer alors que vous restez quand même aux portes de l’Euro, même si l’une d’elles s’est presque refermée…
Dans le foot, on ne sait jamais. On m’a beaucoup posé la question ces derniers temps. J’ai mon idée sur le sujet, mais je ne veux pas la donner. Mon entourage connaît ma position.
Ce que cette sélection a montré dans cette campagne n’a-t-il toujours pas convaincu Dany Mota, régulièrement titulaire en D1 italienne avec Monza, de vous rejoindre ?
Je ne sais pas s’il a vu le match d’hier, mais je sais qu’on l’a relancé plusieurs fois cette année encore et la réponse qui nous est revenue a pour l’instant à chaque fois été la même. Je ne sais pas ce qu’on peut faire de plus pour le convaincre, mais je pense qu’il croit toujours pouvoir jouer pour le Portugal. Il sait qu’on est intéressés, mais il veut encore attendre.
Si vous vous qualifiez pour l’Euro et qu’il décide de se manifester à ce moment-là, une fois que le boulot est fait, vous le prendrez ?
(Il sourit) Il y a beaucoup de «si» dans cette phrase. J’estime que si l’on réussit cet exploit et qu’il se manifeste, alors il faudra y penser. Je pense qu’il nous ferait du bien de par ses caractéristiques. Je pense que les deux parties en profiteraient. À mon avis, dans notre système, il serait très efficace et tout le monde en profiterait. Ce serait du win-win. Il pourrait encore élever notre niveau et on serait cons de s’en priver.