La politique migratoire de l’UE a donné lieu à une polémique entre le président du Conseil européen Donald Tusk et la Commission de Jean-Claude Juncker autour de la possibilité d’établir à l’avenir un mécanisme de « quotas » obligatoires de répartition des réfugiés.
Donald Tusk, qui préside un sommet des dirigeants de l’UE jeudi et vendredi à Bruxelles, a proposé d’avoir une discussion « ouverte et franche » sur « ce qui a marché et ce qui n’a pas marché » dans la réponse de l’UE à la crise migratoire depuis 2015. Dans une note adressée aux 28, il souligne que le débat qui se tient autour de la possibilité de mettre en place des quotas obligatoires « s’est révélé hautement conflictuel », et qualifie l’attention qui y a été consacrée de « disproportionnée ». « En ce sens », la problématique des quotas obligatoires s’est avérée à ses yeux « inefficace ».
Les quotas temporaires mis en place en 2015 à la majorité qualifiée pour accueillir des réfugiés arrivés en Italie et en Grèce ont été difficilement mis en place. Ils sont par ailleurs à l’origine d’une fracture profonde avec plusieurs pays de l’Est qui ont refusé d’accueillir des réfugiés par ce biais, à tel point que trois d’entre eux (Hongrie, Pologne et République tchèque), ont été renvoyés la semaine dernière devant la Cour de justice de l’UE par la Commission.
Pour l’avenir, la Commission propose désormais de garder la règle de la responsabilité des pays d’arrivée, mais avec un « mécanisme correcteur » en cas d’afflux massif. « La Commission désapprouve fortement la déclaration selon laquelle la relocalisation, en tant que réponse d’urgence, a été inefficace », a répliqué mercredi un porte-parole de l’exécutif européen, Margaritis Schinas. « Plus de 32 000 personnes ont été relocalisées, soit environ 90% des personnes éligibles », a-t-il insisté, en soulignant que ce programme n’avait pas été imposé, mais adopté « par le Conseil » de l’UE qui réunit les 28 États membres. L’objectif initial prévoyait jusqu’à 160 000 places réparties selon des quotas par pays. « Il n’y a pas de dispute, il n’y pas de dramatisation », a voulu rassurer Margaritis Schinas.
Divergences profondes
Mais sur le fond, des divergences entre l’exécutif européen et Donald Tusk existent, comme en témoigne la réaction furieuse du commissaire aux Migrations Dimitris Avramopoulos mardi. « Le document préparé par M. Tusk est inacceptable, c’est anti-européen », a-t-il critiqué depuis Strasbourg, accusant la lettre de Donald Tusk de « saper l’un des principaux piliers du projet européen : le principe de solidarité ».
La Commission a répété que la seule solution se trouvait au niveau européen, et non dans des initiatives nationales. Dans sa note, Donald Tusk estime qu’un État membre seul ne peut pas trouver de solution aux défis soulevés, mais que certaines actions entreprises sous l’égide d’un État se sont montrées « cruciales ». Il cite à ce titre l’exemple de l’Italie qui a réussi cet été à faire chuter les arrivées de migrants depuis la Libye grâce à un accord direct – mais très controversé – avec les autorités de Tripoli et des milices. M. Tusk plaide donc pour un soutien et une assistance de l’UE aux États membres en première ligne, et pour créer une enveloppe financière conséquente et dédiée dans le prochain budget multi-annuel de l’Union, « visant à stopper l’immigration illégale ».
Le Quotidien/AFP