L’UE et les États membres cherchent des solutions pour baisser les prix du gaz. Le Luxembourg est contre un plafonnement des prix du gaz qui pourrait avoir des effets pervers.
Les États membres de l’Union européenne tentent de trouver une solution concernant les prix de l’énergie. Après la flambée due à la reprise économique post-covid, c’est la guerre en Ukraine qui a fait exploser les cours. La mise en place de restrictions sur les produits pétroliers russes et le gaz n’y est pas pour rien tout comme l’utilisation comme arme géopolitique de cette ressource par Vladimir Poutine.
En Asie, le charbon a aussi été remplacé par le gaz, moins polluant, pour produire de l’électricité. Conclusion : une très forte demande, une offre moindre ce qui donne une explosion des prix. Alors comment faire pour ne pas faire trinquer les consommateurs européens ? La Commission européenne et les ministres des États membres tentent de trouver des solutions. Parmi celles avancées le plafonnement général des prix du gaz.
«Le Luxembourg, comme une majorité d’États membres, n’est pas favorable à ce plafonnement qui a été évoqué à plusieurs reprises dans le cadre du Conseil européen et du conseil des ministres de l’Énergie», a expliqué le ministre de l’Énergie Claude Turmes en répondant à une question parlementaire du député Mars Di Bartolomeo. Pour lui, «l’instauration d’un tel plafonnement des prix pourrait nuire à la capacité de l’Union européenne à attirer les approvisionnements par gazoducs et en GNL provenant d’autres canaux d’approvisionnement, et aggraverait encore la pénurie (concurrence au niveau du GNL notamment avec l’Asie)».
«Il convient de noter que l’Agence de coopération des régulateurs européens de l’énergie (ACER) a également mis en garde contre de tels effets secondaires», a-t-il précisé. Un plafonnement qui aurait donc des effets pervers et provoquerait de nombreux tracas pour les consommateurs européens. La loi du marché est dure à combattre.
Le thème de l’énergie secoue plus fortement les débats en Europe depuis l’invasion russe de l’Ukraine. La Commission européenne a communiqué au Conseil européen et aux autres institutions européennes une note sur les options d’urgence concernant cette crise. Son objectif est de réduire le prix du gaz et de limiter son impact sur le prix de l’électricité. Le premier marché étant lié à l’autre (et les évolutions du prix qui vont avec) au grand dam des consommateurs.
La mise en place récente d’une plateforme de l’Union européenne (UE) pour l’énergie devrait contribuer à garantir l’approvisionnement énergétique à des prix équitables ainsi qu’à réduire et, à terme, à éliminer la dépendance de l’UE à l’égard du gaz russe. La plateforme vise à regrouper la demande de gaz dans l’UE sur une base volontaire afin d’attirer des approvisionnements fiables provenant des marchés mondiaux et d’atténuer les effets sur les prix. Dans sa réponse parlementaire, Claude Turmes a indiqué que le Luxembourg suivait avec attention la mise en place de cet instrument d’achats groupés et décidera en temps voulu du volume et de la forme de sa participation.
Gaz et électricité subventionnés ?
La Commission estime aussi que d’autres mesures peuvent également être appliquées, ajoute Claude Turmes dans sa réponse, par exemple des mesures nationales temporaires visant à subventionner le coût du gaz utilisé pour la production d’électricité (par exemple, l’instauration d’un prix de référence pour le gaz utilisé pour la production d’électricité) en vue de faire baisser les prix sur le marché de l’électricité.
Ces mesures devraient être conçues d’une manière compatible avec les traités de l’UE, notamment en ce qui concerne l’absence de restrictions aux exportations transfrontalières, la législation sectorielle et les règles en matière d’aides d’État, et être notifiées à la Commission pour approbation.
Mais Claude Turmes souligne que la Commission note que de telles mesures peuvent entraîner des coûts importants. Ces initiatives devraient être strictement limitées dans le temps et adaptées aux régions ayant une capacité d’interconnexion très faible, où l’influence du gaz sur la fixation des prix est forte et où les consommateurs sont particulièrement exposés aux prix de gros de l’électricité.
Les mesures devraient également éviter de pénaliser les acteurs du marché qui ont garanti leur électricité au moyen de contrats à terme. Une mesure qui est appliquée en ce moment sur le marché ibérique, marché à très faible interconnexion avec le reste de l’UE à l’inverse du Grand-Duché.
Pour faire face à l’incidence des prix élevés pour les consommateurs, la Commission prévoit que les États membres peuvent, dans les circonstances actuelles, élargir la réglementation des prix de détail applicable au gaz naturel. Cela est particulièrement important lorsque le gaz joue un rôle particulier dans le chauffage et les matières premières industrielles.
Il convient de noter que la prise en charge pour tous les clients résidentiels des tarifs de réseau de gaz naturel au Luxembourg par l’État depuis début mai s’inscrit dans cette catégorie de mesures, ajoute Claude Turmes. La Commission estime également que, dans un scénario de rupture complète de l’approvisionnement en gaz russe, une réduction de la demande de gaz pour les acteurs industriels, même dans les États membres moins directement touchés, pourrait être nécessaire afin de garantir l’approvisionnement pour les fonctions ou secteurs essentiels dans les États membres plus directement touchés. Bref, certains vont devoir se passer de gaz pour que d’autres structures essentielles à la bonne marche d’un pays puissent continuer à fonctionner.
La part du gaz russe au Luxembourg s’élève à 13 % actuellement. La semaine dernière, Claude Turmes était très inquiet sur la possibilité que la Russie ferme le gaz à l’Europe et a demandé à tous les habitants du Grand-Duché d’économiser la ressource (-10 % de la consommation habituelle) afin de permettre la constitution rapide de stocks pour cet hiver.