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Orpea veut se sauver mardi


Orpea a enclenché une procédure de conciliation amiable devant le tribunal de commerce de Nanterre. (photo Adobe Stock)

Le groupe de maisons de retraite privées Orpea doit présenter mardi son plan de transformation pour tourner la page du scandale de maltraitance des pensionnaires.

Hausse des coûts, cours de Bourse en berne et dette massive à rembourser : les difficultés s’accumulent pour le groupe d’Ehpad privés Orpea, dont la nouvelle direction présente mardi son plan de transformation afin de tourner la page du scandale. Où en est Orpea ? Le chiffre d’affaires du groupe a progressé de 9,3 % pour atteindre près de 3,5 milliards d’euros sur les neuf premiers mois de l’année. Sa performance financière risque toutefois d’être affectée par les hausses de coûts de l’énergie du fait de l’inflation, et par des frais de personnels accrus en raison d’un plan de recrutement.

Surtout, Orpea ploie sous le poids d’une dette de 9,5 milliards d’euros. «Il s’agit d’un niveau beaucoup trop important par rapport au résultat d’exploitation récurrent et à la trésorerie disponible», qui atteint 854 millions d’euros à fin septembre, commente Yi Zhong, analyste d’Alpha Value. Dans ce contexte, les investisseurs attendent mardi «des solutions pour assurer la bonne exploitation du groupe et générer de la trésorerie de façon récurrente et durable», ajoute-t-elle.

L’État français en embuscade

L’action Orpea a perdu 90 % de sa valeur depuis le début de l’année et les révélations du livre-enquête Les Fossoyeurs. L’un des principaux actionnaires, le fonds d’investissement Mirova, qui détenait 4 % du capital, a vendu sa participation. Deux groupes français, Mat Immo Beaune et Nextstone, sont montés au capital, à hauteur de plus de 5 %, pour «accompagner» la direction dans le redressement du groupe. Pour les analystes, un rachat d’une part importante du capital d’Orpea semble peu probable, en raison notamment de sa lourde dette.

En outre, il s’agit d’un dossier «extrêmement politique», souligne Pierre Michaud, gérant de portefeuilles chez Monocle. «Orpea assure un service public, l’État ne tolèrerait pas qu’un acteur extérieur ou qu’un fonds activiste prenne le contrôle, il le contrerait en faisant monter au capital la Caisse des dépôts», estime-t-il. De même, l’État interviendrait si la pérennité du groupe était menacée par le poids de sa dette, selon l’analyste.

Orpea a enclenché une procédure de conciliation amiable devant le tribunal de commerce de Nanterre afin de renégocier sa dette avec ses créanciers. Une première réunion doit se tenir mardi. Il s’agit d’un «cadre idoine» pour «traiter efficacement les difficultés des entreprises endettées», estime Michael Cahn, avocat associé chez DWF en France. Cette procédure aboutit à un accord dans la vaste majorité des cas, selon lui. Toutefois, «lorsqu’on y a recours deux fois dans la même année», comme c’est le cas d’Orpea, «les statistiques ne sont plus aussi favorables», prévient-il.

Lors de ces négociations confidentielles, «tout est possible», à condition d’obtenir l’accord des créanciers, précise Michael Cahn. La direction d’Orpea souhaite convertir une partie de la dette du groupe en capital et lever à nouveau de l’argent frais, en dette et en capital. «S’ils ne souscrivent pas à l’augmentation de capital, les actionnaires déjà présents seront dilués, ils perdront en influence, en droits de vote», observe Numa Rengot, avocat associé au cabinet Franklin. Ce type d’opération peut se traduire par une réorganisation «majeure» de la répartition du capital entre les différents actionnaires, ajoute-t-il.

En cas d’échec d’une procédure amiable, l’entreprise en difficulté peut ouvrir une procédure de sauvegarde, si elle n’est pas en cessation de paiement. Dans le cas contraire, elle peut se placer en redressement judiciaire. Ces procédures permettent de geler les dettes et de préparer un plan pour poursuivre l’activité tout en assainissant les finances. Le plan proposé par l’entreprise doit être validé par la justice. Si le tribunal estime toutefois qu’il n’est pas viable, il peut prononcer la liquidation de l’entreprise, synonyme de cessation d’activité et de licenciements.

Orpea est-il protégé d’une telle éventualité, car il assure un service d’intérêt général ? «Dans ces procédures, il y a toujours un enjeu social. Est-il supérieur à l’enjeu économique ? Certains dossiers montrent que ce ne n’est plus le cas», observe Numa Rengot. Il évoque notamment la liquidation de l’enseigne Camaïeu qui a entraîné le licenciement de 2 100 salariés et celle de Geoxia, constructeur des maisons Phénix, laissant ses clients en attente de livraison sans toit.

Orpea présent aussi au Luxembourg

Le géant mondial des maisons de retraite Orpea a obtenu le jeudi 3 novembre l’agrément du ministère de la Famille, et ouvrira bientôt une première résidence, à Merl. La ministre de la Famille était dans l’impossibilité de refuser cet agrément puisque Orpea remplit toutes les conditions prévues par la loi.

Lire aussi : Plus d’obstacle à l’ouverture d’Orpea au Luxembourg

À Merl, les 110 chambres et 23 appartements de la résidence Récital – une maison de repos et de soins et une résidence services pour seniors – ne sont pas encore tous remplis. Les visites du site se poursuivent. Vingt et un équivalents temps plein ont déjà rejoint l’encadrement, permettant à l’établissement de fonctionner correctement dès son ouverture, mais Orpea compte bien renforcer les effectifs ces prochains mois.

Marijke Verboven, qui dirige la communication du groupe pour la Belgique et le Luxembourg, avait confié dans nos colonnes que les déboires financiers d’Orpea n’éclabousseront pas l’établissement luxembourgeois, qui jouira, selon elle, d’un statut indépendant au sein du réseau.

L’arrivée du groupe Orpea au Luxembourg a été fustigée la semaine dernière par l’OGBL.