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Michel Barnier prend ses fonctions à Matignon


A 73 ans, il devient le plus vieux Premier ministre de la Ve République, succédant ainsi au plus jeune Gabriel Attal, 35 ans, qui avait été nommé en janvier seulement. (Photo AFP)

Emmanuel Macron a nommé jeudi l’ancien ministre et commissaire européen de droite Michel Barnier Premier ministre, 60 jours après le second tour des législatives qui n’ont débouché sur aucune majorité, suscitant la réprobation de la gauche qui a dénoncé un « quitus » du Rassemblement national, le parti de Marine Le Pen n’ayant pas agité la menace d’une censure immédiate.

Cinq heures plus tard, le nouveau Premier ministre, issu des Républicains (LR), était à Matignon pour une passation de pouvoirs avec Gabriel Attal, démissionnnaire depuis 51 jours et déjà tout à sa tâche de chef du groupe de députés du parti présidentiel Renaissance.

Michel Barnier est arrivé à grandes enjambées, le pas décidé, saluant, la main sur le coeur, les dizaines de personnes réunies dans la cour de Matignon, dont des ministres sortants, Aurore Bergé, Catherine Vautrin, et des conseillers d’Emmanuel Macon.

A 73 ans, il devient le plus vieux Premier ministre de la Ve République, succédant ainsi au plus jeune Gabriel Attal, 35 ans, qui avait été nommé en janvier seulement.

Le nouveau Premier ministre, qui sera soutenu par le camp présidentiel et les LR, mais sans majorité, va devoir tenter de former un gouvernement susceptible de survivre à une censure parlementaire, pour mettre fin à la plus grave crise politique depuis 1958.

Éviter le risque de censure immédiate

Le président « l’a chargé de constituer un gouvernement de rassemblement au service du pays et des Français », a déclaré l’Elysée dans un communiqué. Emmanuel Macron « s’est assuré que le Premier ministre et le gouvernement à venir réuniraient les conditions pour être les plus stables possibles et se donner les chances de rassembler le plus largement », a ajouté la présidence.

En attendant, les ministres démissionnaires vont eux rester en fonctions pour continuer de gérer les affaires courantes le temps des négociations.

Avant d’opter pour Michel Barnier, le chef de l’Etat, qui voulait éviter au maximum le risque de censure immédiate, avait épuisé plusieurs autres cartouches, de Bernard Cazeneuve à gauche à Xavier Bertrand à droite, en passant par le président du Conseil économique, social et environnemental Thierry Beaudet pour la société civile.

Le nouveau Premier ministre, qui fut aussi candidat malheureux à la primaire du parti Les Républicains en vue de la présidentielle de 2022, hérite d’une tâche aux allures de mission impossible, tant aucune coalition viable n’a jusqu’ici émergé et tant les différents acteurs sont en embuscade.

Il devrait réunir 235 sièges avec le bloc central (166 sièges), les LR (47) et le groupe Liot (Libertés, indépendants, Outre-mer et territoires, 22), loin de la majorité absolue (289), seul paratonnerre contre la censure. En face, le RN et ses alliés alignent 142 sièges et le Nouveau front populaire (NFP) 193 sièges.

Attendu de tous côtés

Vieux routier de la politique, Michel Barnier est réputé bon médiateur: il a été le négociateur en chef de l’Union européenne pour le Brexit lorsque le Royaume-Uni a quitté le bloc continental. Avant cela, il a été ministre à plusieurs reprises depuis 1993, notamment sous les présidences de Jacques Chirac (Affaires étrangères et européennes) et de Nicolas Sarkozy (Agriculture).

Plus récemment, lorsqu’il lorgnait l’Elysée, ce gaulliste centriste avait durci son discours sur l’immigration, prônant pour un « moratoire » et allant, lui l’Européen convaincu, jusqu’à remettre en cause la Cour européenne de justice au nom de la « souveraineté juridique ».

Mais il est attendu de tous côtés. A gauche, où l’on promet déjà la censure, le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon a aussitôt dénoncé une « élection volée aux Français », assurant que Michel Barnier avait été nommé « avec la permission et peut être sur la suggestion du Rassemblement national » et appelant à la « mobilisation la plus puissante possible » samedi lors d’une manifestation anti-Macron. Le RN a « donné une forme de quitus » à la nomination de Barnier, a dans la même veine grincé François Hollande.

« Crise de régime »

Le patron des socialistes Olivier Faure a crié à « la crise de régime » et au « déni démocratique porté à son apogée » avec « un Premier ministre issu du parti qui est arrivé en 4e position et qui n’a même pas participé au front républicain » contre le RN.

Le parti de Marine Le Pen, qui peut à tout moment faire tomber le futur gouvernement en votant une motion de censure qui serait déposée par la gauche, est resté pour sa part plus circonspect. Il « jugera sur pièces son discours de politique générale », a déclaré le président du parti, Jordan Bardella.

Le dirigeant LR Laurent Wauquiez a jugé pour sa part que Michel Barnier avait « tous les atouts pour réussir dans cette difficile mission qui lui est confiée ».

Renaissance, le parti d’Emmanuel Macron, a promis de porter « des exigences sur le fond, sans chèque en blanc » mais ne votera pas de « censure automatique », Edouard Philippe (Horizons) assurant de son côté « nous serons nombreux à l’aider ».

« Clone »

Quant à cette « odeur de cohabitation » que l’entourage d’Emmanuel Macron recherchait pour incarner une forme d’alternance, ce n’est pas avec Michel Barnier qu’elle devrait être la plus enivrante. Il est venu d’une droite pro-européenne et jugée « pragmatique », et il a souvent été considéré « Macron-compatible ».

Le chef de l’Etat « cherchait un clone, il a fini par le trouver », a ironisé sur BFMTV le communiste Ian Brossat.

Ces derniers jours, plusieurs sources, jusque parmi ses soutiens, décelaient chez le président une réticence à se tourner réellement vers le centre-gauche, de crainte de voir son bilan économique « détricoté ».

« Il est très apprécié des députés de droite sans que ce soit un irritant à gauche », s’enthousiasme une ministre démissionnaire de l’aile droite de la macronie au sujet de M. Barnier. « On doit savoir faire avec », tempère un dirigeant centriste, avec beaucoup moins d’engouement.

Nombre de macronistes jugent aussi que Michel Barnier est le plus petit dénominateur commun et que, vu son âge, il ne devrait pas effrayer tous ceux qui rêvent de briguer l’Elysée en 2027. « J’en suis au stade où je pense que l’urgence absolue pour le président c’est qu’il nomme quelqu’un. Je n’en suis même plus au stade de donner un avis », lâchait un confident d’Emmanuel Macron juste avant l’annonce officielle.

Un commentaire

  1. Le président lance un signal radio. Le romantisme, c est comme le populisme. C est tentant, deplace les foules mais cela ne paie pas les factures. J aimerais comprendre pourquoi la France est 2x plus endettee que l allemagne alors que cette dernière a ete rasee apres la seconde guerre mondiale et a absorbee le choc de la chute du mur de berlin. Quoi qu il en soit, il reste 2 grands posted de prestige a pourvoir. L interieur et l exterieur. Qui va se taper le 1er sachant que le feu d artifice en france n a pas lieu exclusivement aux jo ou le 14 juillet? Qui sera le dur a cuire?

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