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Mendicité : la base légale qui se cherche


Lundi matin, dans la Grand-Rue, une action de solidarité avec les sans-abri alors que la police mène une opération contre la mendicité.  

Tout le monde conçoit qu’une erreur a été commise en 2008 et qui a permis de supprimer la mendicité simple des infractions pénales. Ce qui fragilise la base légale défendue par Léon Gloden.

L’opération de police contre les sans-abri et les mendiants a été organisée après concertation entre le ministre des Affaires intérieures, Léon Gloden, les responsables communaux de la Ville de Luxembourg et la police. Mardi, devant les députés, le ministre chrétien-social a annoncé que des effectifs seraient recrutés dans les autres commissariats du pays pour venir prêter main-forte aux unités de la capitale lors d’opération visant à lutter contre la mendicité, l’immigration illégale et l’insalubrité, comme le précise Léon Gloden.

Il reste droit dans ses bottes et refuse de trop en dire. «Vous pourrez me poser toutes les questions stratégiques demain et je vous répondrai à huis clos», adresse-t-il aux députés qui avaient profité de l’heure de questions au gouvernement pour essayer d’en savoir plus sur l’opération de la veille.

Le caractère urgent de leurs questions a été reconnu, mais les réponses sont restées évasives. Marc Goergen (Parti pirate) veut savoir de quels commissariats venaient les policiers qui ont procédé aux contrôles des mendiants, mais ce genre de détails n’est pas public. Marc Baum (déi Lénk), va plus loin et demande le bilan de l’opération, le nombre de policiers déployés, les consignes qu’ils ont reçues, s’ils ont fait une différence entre la mendicité agressive et passive «comme promis». Le député Sven Clement (Parti pirate), comme Taina Bofferding (LSAP), insistent eux aussi pour connaître les prochaines étapes, et surtout, les bases légales qui ont permis de s’attaquer à la mendicité. «Avons-nous, oui ou non, une base légale concernant l’interdiction de la mendicité simple?», demande à son tour Paulette Lenert (LSAP), qui fut juge au tribunal administratif dans une autre vie.

Le ministre des Affaires intérieures ne dira rien sur la base légale, la ministre de la Justice est là pour récupérer la patate chaude. Léon Gloden consent à dévoiler que l’effectif de l’opération mendicité était composé de six agents en uniforme et de deux agents en civil de la police judiciaire. Il n’y a eu ni amende ni procès-verbal et les sans-abri ont été sensibilisés aux alternatives existantes pour éviter de dormir sur le trottoir.

La ministre de la Justice, Elisabeth Margue, s’est rangée du côté de son collègue ministre qui s’évertue à dire que l’article concernant l’interdiction de la mendicité fait toujours partie du code pénal, même si la loi dit le contraire, par erreur sans doute, mais jamais rectifiée jusqu’ici, depuis le vote de la loi du 29 août 2008 sur la libre circulation et l’immigration. Les députés voulaient supprimer le deuxième alinéa du point six et se sont trompés en supprimant le point six du deuxième alinéa. Voilà comment la mendicité simple a disparu des infractions pénales pour les autorités judiciaires qui appliquent le texte publié au Mémorial. Les commentaires des articles ont beau révéler où se situe l’erreur, les juges estiment que la loi ne punit plus la mendicité.

Si tel est le cas, la police n’avait aucune base légale pour agir. La ministre de la Justice estime pourtant qu’un règlement communal n’a pas besoin qu’une infraction soit pénalement réprimée pour exister. La Cour européenne des droits de l’homme dit de son côté qu’un État ne peut interdire la mendicité. La question de la base légale reste toujours ouverte et la bataille entre les élus juristes n’a pas fini d’être livrée.

En 2012 déjà

La ministre de la Justice, Elisabeth Margue, a cité sa prédécesseure dans sa réponse, mais Sam Tanson n’a pas eu la possibilité de répondre pour «fait personnel», le président Wiseler l’ayant privé de ce droit.  L’article 45 du règlement de la Chambre des députés stipule «qu’il est toujours permis de demander la parole pour répondre à un fait personnel. Le député qui demande la parole pour un fait personnel doit se borner à de brèves rectifications de faits qui ne pourront durer plus de cinq minutes. S’il a de plus amples observations à présenter, elles seront renvoyées à la fin de la séance». Il n’y a pas plus de précisions.

Cette décision du président était d’autant plus surprenante qu’il a accordé ce droit à Sven Clement quelques instants plus tard pour les mêmes motifs.

Sam Tanson aurait sans doute rappelé, entre autres, à Elisabeth Margue que c’était en premier lieu l’ancien ministre chrétien-social de la Justice, François Biltgen, qui avait clairement écrit dans une réponse parlementaire datée de 2012, que l’infraction de mendicité ne constituait plus une infraction pénale.

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