Seule formation au mannequinat dédiée aux enfants et aux adolescents dans la région, Top Model Kids nous a ouvert ses portes.
Depuis le petit hall d’entrée du centre culturel de Hollerich, ils sont quelques parents à observer, à travers les portes vitrées, leurs enfants en plein cours. «Elle a toujours voulu faire ça depuis qu’elle est petite», lance la maman de Laugane, 14 ans. «Ma fille était plutôt timide, je ne savais pas qu’elle était capable de faire ça», ajoute la mère d’Anaïs, 12 ans. «Au début, ce milieu m’a inquiétée, mais, ici, les filles sont bien encadrées», conclut celle de Léa, 17 ans.
En ce dimanche de mars, plus de la moitié de l’année d’apprentissage au mannequinat proposée par Top Model Kids Luxembourg est passée. Agréée par l’État, cette académie d’un genre unique dans la région propose à des enfants et des ados de 3 à 17 ans d’acquérir les compétences pour devenir modèle, figurant ou intermittent du spectacle. «Nous accueillons environ 100 élèves», annonce Thierry Broggi, le codirecteur de l’agence All in One, dans laquelle est compris le parcours Top Model Kids. Si le projet était, entre 2015 et 2019, un concours de mode, il a évolué avec le covid. «La pandémie a tout changé. Le fait d’être exclusivement une école nous permet, aujourd’hui, d’être plus complet dans l’enseignement que nous proposons aux enfants.»
Dix mois de préparation
L’année commence, en septembre, par un shooting photo puis les cours s’enchaînent à raison d’une fois par mois, toujours les dimanches. En parallèle de ces ateliers, les jeunes filles et garçons peuvent participer à divers évènements en semaine. Les parents des enfants et des adolescents ont la possibilité de choisir différentes formules qui s’étalent sur l’année et dont les prix varient de 29,90 euros par mois à 89,90 euros par mois.
Quelle que soit l’activité, les ambitions principales de la formation sont de faire progresser les jeunes autant dans leur capacité à poser, à adopter le bon maintien, à marcher sur un podium qu’à prendre confiance en eux, à développer leur personnalité et à gérer leur stress dans un métier qui en génère. «Avec le temps, nous nous sommes rendu compte du manque de confiance de certains enfants», souligne la codirectrice de l’agence, Carine Broggi. «Ils viennent d’abord pour être mannequin, puis nous travaillons ensemble pour renforcer leur confiance. Ils gagnent en assurance, se libèrent et deviennent plus indépendants chez nous.»
Deux fois en dix mois, ils devront se présenter devant un jury pour être évalués. Si la première échéance s’est déjà produite en février, il ne reste plus que quelques mois de préparation à ces modèles en herbe. En juin, lors de leur prestation finale, les deux majors de chaque classe d’âge remporteront un voyage qui mélangera mode et culture locale. Les autres étudiants pourront également partir, mais à condition de participer financièrement. Pour les préparer, des intervenants extérieurs viennent transmettre leur savoir aux futures mannequins et chaque début de saison, les responsables de Top Model Kids Luxembourg décident d’un thème qui fera office de fil rouge. Pour cette année, direction l’univers des mille et une nuits à la rencontre de Shéhérazade et des contes orientaux.
Ici, les enfants sont comme ils sont, avec les mêmes droits
L’initiation de ce dimanche vient s’immiscer dans cette mouvance orientale. Dans l’immense salle du centre culturel de Hollerich, la musique prend tout l’espace tandis que les quatre jeunes filles tentent de reproduire quelques mouvements de danse orientale en mimant les gestes gracieux et assurés de leur professeur. Si leur avenir, elles l’imaginent plutôt sous les projecteurs des défilés de mode ou sur les pages des magazines tendance, cette initiation est là pour les aider appréhender un corps en passe d’entrer dans l’adolescence. «Mon intervention permet aux filles de ressentir leur corps. C’est une danse parfaite pour le découvrir et le comprendre dans son ensemble», détaille Esmeralda Conrad, professeure et chorégraphe venue de Moselle pour enseigner sa spécialité.
Ce type d’expérience, où se mêlent exercices corporels et prise d’assurance, constitue le fondement de l’académie. «Nous n’adhérons pas à une certaine image du milieu de la mode où les mannequins doivent être maigre et longiligne», appuie Thierry Broggi. «Ici, chacun à sa beauté. Les enfants sont comme ils sont, avec les mêmes droits.»
La confiance comme moteur
Cette volonté de faire prendre conscience à chacune et chacun de son potentiel s’applique dans certains cours dédiés au coaching et aux échanges entre les élèves. Au total, quatre coachs se repartissent les quatre tranches d’âge définies par Top Model Kids Luxembourg. Parmi ces préparateurs, Malo del Galo, ancien élève de l’académie devenu depuis professeur, après une formation auprès du directeur. «Nous les encourageons à trouver leur personnalité», explique-t-il. «Par exemple, lors de la préparation à l’examen final, je leur demande de choisir eux-mêmes la musique sur laquelle ils souhaitent défiler. Je leur propose de s’imaginer marcher dans leur chambre.» À côté de ces quelques conseils, l’académie plébiscite le dialogue entre les élèves. «Quel que soit le cours, les jeunes s’entraident, s’encouragent, donnent leur avis, posent des questions…», ajoute Carine Broggi. Une technique qui a fait ses preuves, notamment, lors d’un évènement surprise pour l’académie : une participation à la Fashion Week de Paris.
Cette expérience était incroyable, j’avais des étoiles dans les yeux
«Je ne me rendais pas compte de ce qu’il se passait», décrit Anaïs. «J’étais si heureuse, c’était un rêve», s’exclame Laugane. «Elle a relu cinq fois le mail», sourit la maman de Léa. Le 27 février au matin, douze modèles âgées de 7 à 15 ans prenaient la route de la capitale française avec leurs parents et quelques membres de Top Model Kids Luxembourg pour participer à un défilé organisé par Supertalent of the World. Dans l’enceinte de la salle Wagram, les petites filles ont parcouru le podium comme des pros. Toutes étaient vêtues des tenues confectionnées pour l’occasion par la designer Yana Duschak, Ukraino-Luxembourgeoise.«Au début, j’étais un peu stressée puis je me suis rappelée des conseils que j’ai reçus à l’académie et je me suis lancée», avoue Anaïs. L’émotion était aussi palpable du côté des parents qui ont conduit leurs enfants en France et ont assisté au show. «À notre arrivée sur le lieu du défilé, on se sentait un peu à part dans cette foule d’habitués de la mode. Mais une fois installées, nous étions tellement fières. J’en ai presque pleuré», se remémore la mère de Laugane.
Le conte de fées ne s’est pas arrêté là pour les petites mannequins et la déception des filles plus âgées de ne pas avoir participé aux festivités s’est envolée. Le dimanche 5 mars, c’était leur tour d’embarquer en direction de Paris pour un nouveau défilé. Les membres de l’académie étaient à nouveau invitées à participer, cette fois, à l’Asian and European Fashion Week (AEFW 23) dans la capitale. Quatre modèles adolescentes de 15 à 17 ans se sont appropriées le catwalk pour représenter plusieurs marques de prêt-à-porter, dont une fois encore celle de Yana Duschak. «J’ai l’ambition de devenir mannequin. J’aime développer et créer ma personnalité et la mode est une source d’expression», indique Léa, 17 ans. «Cette expérience était incroyable, j’avais des étoiles dans les yeux». Maintenant cette première marche franchie, le directeur annonce que des invitations sont déjà tombées pour Milan, Londres ou encore Cannes.
Enfin nous jeunes ont à nouveau des perspectives!