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Les secrets de la crypte du Saint-Esprit se dévoilent


Une visite de la crypte, sous le plateau du Saint-Esprit, a été organisée à l’initiative de Sam Tanson, ministre de la Culture. (photo Julien Garroy)

Sous la cité judiciaire gît la crypte du Saint-Esprit, qui fait l’objet de fouilles et de travaux depuis le mois de mai. Archéologues, ouvriers et architectes s’attèlent à restituer les vestiges du passé afin de les rendre accessibles au public d’ici 2024. Une visite a été organisée à l’initiative de la ministre de la Culture.

C’est une histoire qui remonte à 1996, année durant laquelle les premiers sondages ont révélé d’importants vestiges de l’ancien couvent des Clarisses remontant au XIIIe siècle. À l’époque, les dessous du Plateau du Saint-Esprit, situé au sud de la Ville-Haute, font seulement l’objet de fouilles sommaires. La priorité est à la fondation de la cité judiciaire, dont le début de la construction, en 2002, coïncidera avec la mise sous protection du site archéologique. Les lieux seront donc pensés pour accueillir, un jour ou l’autre, un espace dédié à un musée.

Vingt ans plus tard, l’idéal archéologique renaît sous la houlette de l’Institut national pour le patrimoine architectural (INPA) et de l’Institut national de recherches archéologiques (INRA) : «Lors de la construction de la cité judiciaire, une promesse avait été faite à l’Unesco de rendre accessibles au public ces vestiges du passé», a rappelé la ministre de la Culture, Sam Tanson.

D’importants travaux de déblaiement sont réalisés dans les entrailles du Plateau depuis la fin du mois de mai. L’objectif est de révéler, peu à peu, les vestiges de la crypte du Saint-Esprit. Une vaste entreprise, qui nécessite l’appui de six ouvriers chargés d’extraire l’épaisse couche de sable qui s’étend sur près de 1 000 m2. Pour ce faire, un camion-aspirateur disposé devant l’ancienne porte de la crypte extrait la nappe recouvrante et les pierres encombrantes : «L’entrée est petite et le niveau de remblai est impressionnant, mais nous avons déjà retiré 3 000 m3 de sable», détaille Christiane Bis-Worch, archéologue à l’INRA et responsable du chantier.

Cinq siècles d’histoire sous les bottes

Pour accéder à la crypte, il faut contourner les murs de la forteresse et traverser un tunnel montant. Une fois le sommet atteint, les murs de l’ancien couvent se dévoilent. Des chemins pavés apparaissent au pied des immenses colonnes, qui soutiennent la dalle où repose la cité judiciaire. Çà et là, des pelleteuses et autres engins mécaniques surplombent de larges mottes de sable : «Cette première étape, qui consiste à enlever le sable, sera suivie par une fouille archéologique plus importante et qui peut prendre du temps», annonce Catherine Medernach, conservatrice-architecte à l’INPA. Le travail ne sera donc pas une mince affaire puisque le sol recèle environ cinq siècles d’histoire.

Un important travail de restitution se dessine pour les archéologues, qui découvrent peu à peu le site. Photo : julien garroy

À l’origine, l’emplacement a accueilli un couvent de femmes, fondé en 1234, sous le patronage de la comtesse Ermesinde. Deux courants se sont suivis dans cette enceinte : le premier, celui des Pénitentes de Sainte-Marie-Madeleine (1254-1264), le second, celui des Clarisses Urbanistes (1264-1783). La prise du Luxembourg par les Français, en 1684, et la construction d’une citadelle Vauban auront finalement raison du couvent : «Avec les fortifications et les garnisons de soldats qui ont logé dans le couvent, l’église est tombée en ruine», explique Christiane Bis-Worch. Et de complémenter : «Mais nous avons tout déployé pour préserver le site. Nous savons également comment certaines pierres étaient disposées, ce qui va permettre une restitution fidèle».

Des fondations intrigantes peuvent d’ailleurs être aperçues, à l’instar de ces murs dégradés dans lesquels une sœur s’est enfermée vivante : «Elle avait juste la place pour s’allonger à l’entrée de l’église», narre l’archéologue de l’INRA. À ce jour, 2 000 pierres sculptées ont été trouvées et les découvertes ne cessent de s’enchaîner : «Il faut travailler doucement parce qu’on peut tomber sur de la céramique ou des crânes», raconte Georges Molo, l’un des ouvriers du chantier. L’équipe a pour dessein de retirer encore 50 cm de sable dans les prochains jours.

Un futur projet touristique

Ce chantier n’est que le prologue d’une entreprise plus grande, qui consiste à offrir un accès au public à la crypte. L’essentiel est de rendre l’espace «visible» et «pédagogique», selon les termes d’Elisabeth Teisen, l’une des têtes pensantes du projet. En s’inspirant des cryptes de Bâle ou de Rome, l’architecte a imaginé la mise en place d’un système de passerelles suspendues sur 220 m2, qui guideraient les visiteurs à travers les vestiges du passé.

Le circuit sera jalonné par des zones à vocation didactique et disposant d’éléments multimédias, tout en restant à une certaine distance des vestiges : «Un escalier a déjà été détruit pendant la construction de la cité judiciaire», évoque Elisabeth Teisen. Avec ce véritable «atout touristique» qui se dessine, les multiples facettes historiques de la crypte du Saint-Esprit devraient se révéler au grand public en 2024.