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Les habitants de la Gare «enfin entendus» : «Le mot milice a fait peur»


À la sortie de la réunion, les six habitants (Laurence Gillen à gauche, et Patrick Reisdorff à droite) avaient le sourire.  (Photo : Julien Garroy)

Les autorités auraient-elles enfin pris la mesure du problème? En tout cas, le spectre de citoyens se faisant justice eux-mêmes au quartier Gare a mis le système en branle.

C’est bien simple, jamais les riverains du quartier Gare ne se sont autant sentis pris au sérieux. Eux qui affrontent incivilités, vandalisme, bagarres, prostitution, trafic et consommation de drogue au quotidien depuis des décennies, sont plutôt habitués aux sempiternelles réunions publiques où, tous les trois ans, élus et ministres se succèdent au micro avec les mêmes discours et baissent la tête au moment des doléances.

Cette fois, ils ont été conviés à la table de Léon Gloden, au ministère des Affaires intérieures, aux côtés des autorités communales, du directeur général de la police et de représentants du ministère de la Justice. Une première.

«On a été entendus»

Aucun doute, la menace d’une «milice citoyenne» a fait son effet. En janvier, sur la boucle WhatsApp faisant à la fois office d’exutoire et de groupe de soutien entre habitants, l’un des membres confiait ainsi sa crainte de voir la situation déraper, avec des citoyens se faisant justice eux-mêmes.

À l’issue de l’entrevue au ministère ce lundi, celui-ci ne cache pas un certain soulagement : «On a été entendus, et ce, pour la première fois depuis 20 ans que je suis engagé pour défendre mon quartier. Jusqu’ici, on nous écoutait d’une oreille et il ne se passait jamais rien», soupire Patrick Reisdorff, conscient que «le mot milice a fait peur».

«On était totalement oubliés»

Selon lui, le changement de couleur politique du ministre a mis un sérieux coup de pied dans la fourmilière, le spectre d’une «milice» agissant comme un déclencheur. «On était totalement oubliés, et on ne nous parlait que de mesurettes, alors que la situation se dégrade à vitesse grand V», rappelle-t-il.

Face à une délégation de six habitants, le ministre Gloden a déroulé la liste de mesures concrètes qu’il compte déployer dans les prochaines semaines et mois, afin d’attaquer de front l’insécurité grimpante dans le quartier.

La volonté politique d’agir

Si aucune information n’a filtré – les autorités souhaitant pouvoir travailler sereinement – ces annonces fortes ont suffi à rétablir la confiance des riverains. «On sent enfin une volonté politique de s’emparer du sujet et d’agir. Et ça, c’est nouveau», salue Laurence Gillen, l’une des porte-parole du collectif.

Certaines des mesures devraient être rendues publiques lors de la prochaine rencontre prévue fin mars. En parallèle, le fait de mobiliser l’ensemble des ministères compétents (Justice, Famille, Santé, Affaires intérieures), une demande de longue date, les rend optimistes. Stopper l’escalade enclenchée au début de l’hiver apparaît comme prioritaire.

Des policiers démunis

Sur le terrain, les policiers eux-mêmes confient leur désarroi aux riverains qui les sollicitent : «Ils se sentent démunis, démotivés et inutiles», souffle-t-il. «Tout le monde s’accorde sur le fait que des adaptations sont nécessaires au niveau de la Justice. La bourgmestre a d’ailleurs souligné que c’est à ce niveau qu’il y a des blocages», ajoute Laurence Gillen.

Tous deux nourrissent l’espoir d’obtenir des réponses concrètes le mois prochain, que ce soit sur le volet répressif, le volet judiciaire, ou sur l’aide aux toxicomanes. «Nous sommes conscients que les toxicomanes sont avant tout des personnes malades, mais ce n’est pas à nous d’en subir les conséquences», répète Patrick Reisdorff.

Prochaine entrevue fin mars

L’adoption de la loi du «Platzverweis» renforcé, visant à permettre aux policiers d’expulser des halls d’immeubles tout individu qui en troublerait la tranquillité, pourrait être un levier important. Le ministre a dit espérer un vote avant l’été.

Il a aussi confirmé sa volonté de continuer à collaborer régulièrement avec les habitants. La date précise de la prochaine réunion n’est pas fixée. Les ministères excusés ce lundi (Santé, Famille) seront cette fois-ci représentés.