Le roux ardennais, grand protecteur de la Minette

Les éleveurs des Minetter Schof, Pol et Guy Kail, assurent un pâturage itinérant dans les anciens sites miniers de la Minette, aux abords de Schifflange. La collaboration avec l’ANF, visant à entretenir la biodiversité à l’aide du roux ardennais, est renouvelée.

Sur le terrain de l’ancienne minière à ciel ouvert de Schifflange, dont le paysage est marqué par les pelouses sèches et les collines remblayées, un troupeau de plusieurs dizaines de moutons broute les herbes et se fait guider par la voix du berger.

Les hautes températures matinales et les rayons étincelants du soleil en poussent certains à se réfugier dans les coins ombragés, alors que les border collies s’affairent à les rassembler. Ici, pas de barrières ni d’étables puisque ce cheptel itinérant contribue à lutter contre l’embroussaillement des pelouses sèches afin de maintenir en bon état de conservation le paysage et sa biodiversité.

Les prémices de ce projet remontent au début des années 2000. L’administration de la Nature et des Forêts (ANF) avait lancé la mise en place d’un pâturage chargé d’assurer l’entretien des pelouses sèches dans des zones, qui deviendront, 20 ans plus tard, des réserves de biosphère. En octobre 2020, la région de la Minette a ainsi intégré le réseau mondial du programme de l’Unesco visant à promouvoir la conservation de la biodiversité et le développement durable basés sur la participation citoyenne.

Dans le cadre de ce programme, intitulé «Minett Unesco Biosphere», une attention particulière a été apportée aux moutons roux ardennais, qui à travers un pâturage itinérant, sont chargés de racler, piétiner et fertiliser la végétation herbacée et ligneuse. Associée avec le ministère de l’Environnement et le syndicat intercommunal Pro-Sud, l’ANF renouvelle son partenariat avec les éleveurs Kail et Kail, qui s’axe sur un renforcement de l’identité régionale et de la consommation locale.

«Un contrat de biodiversité»

Les éleveurs des Minetter Schof, Pol et Guy Kail, sont les seuls exploitants agricoles à pratiquer ce modèle de pâturage traditionnel itinérant dans les zones de la Minett Unesco Biosphere. L’élevage compte environ 350 moutons, agneaux et brebis, pâturant sur une dizaine de sites et placés sous la surveillance d’un berger de l’exploitation Kail et Kail de Bergem.

«Il s’agit là d’un contrat de biodiversité entre conservation de cette race ovine, qualifiée de menacée, et la préservation des réserves naturelles. Les moutons, en broutant les herbes sèches, dispersent les semences sur les zones protégées et enrayent ainsi l’érosion de cet écosystème», développe Pol Kail, l’un des frères qui dirigent l’exploitation.

Réputé pour être vif, fin et peu exigeant dans son alimentation, le mouton ardennais peuple, en large partie, les différents troupeaux qui vagabondent dans les anciens sites miniers. À la fois résistant aux parasites et aux maladies, cette race a la capacité de s’adapter à des conditions climatiques difficiles. Un atout majeur pour cette réserve à ciel ouvert où un climat aride règne en maître durant la période estivale.

«La crise climatique a pour effet néfaste de renforcer la crise de la biodiversité. De plus, avec l’arrêt des activités minières dans les années 70, un biotope sec est apparu dans cette zone. On a la responsabilité de maintenir cette biodiversité à travers des alternatives saines, à l’instar de celle-ci», rapporte la ministre de l’Environnement, Joëlle Welfring, qui salue la «bonne coopération des acteurs locaux» dans ce projet.

«Un exemple de circuit court»

Cette collaboration s’étend d’ailleurs à d’autres organisations, telles que Pro-Sud, qui a apporté son aide à la commercialisation de la viande d’agneau du Minetter Schof. Une initiative marchande dont l’objectif est de promouvoir des produits locaux et de bonne qualité. En boucherie, le roux ardennais atteint un bon rendement et procure une viande maigre, au goût proche du «chevreuil», selon les éleveurs.

Dans cette entreprise locale, chaque partie occupe un rôle défini : la Minett Unesco Biosphere a coordonné les échanges et développé le visuel du produit avec l’agence ID Communication et le soutien du Département de l’aménagement du territoire. L’éleveur a, pour sa part, financé les premières étiquettes avant que le grossiste en alimentation générale, en l’occurrence ici La Provençale, gère toute la logistique de commercialisation du produit et rétribue le producteur en fonction des rentes.

«En plus d’être une source de revenu supplémentaire pour les agriculteurs, ce projet est un exemple intéressant de commerce de proximité à circuit court. Des restaurants sont également présents dans la chaîne et peuvent profiter de ces produits locaux», fait savoir la ministre de l’Environnement.

Seule contrainte, le cheptel étant réduit et devant assurer la gestion des pelouses sèches jusqu’à la fin d’année, elle est disponible en petite quantité. Assez tout de même pour investir les présentoirs des boucheries et centres commerciaux luxembourgeois. La liste évolutive des points de vente de cette viande est disponible sur le site de la Minett Unesco Biosphere.