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Le recours collectif refait surface


L’ULC pensait voir enfin le bout du tunnel dans le dossier des recours collectifs, mais elle devra encore patienter; le temps des corrections. (Photo : archives lq/fabrizio pizzolante)

Les députés vont reprendre en main le texte introduisant le recours collectif pour les consommateurs. Après l’avis des Sages, la situation s’annonce mal et le retard s’accumule.

Le président de l’Union luxembourgeoise des consommateurs (ULC), Nico Hoffmann, trépignait d’impatience et le faisait savoir. L’avis du Conseil d’État sur le projet de loi devant introduire le recours collectif s’est fait désirer. Pas loin de trois ans entre le dépôt du texte en septembre 2020 et la publication de l’avis des Sages au début de l’été 2023. Quand il est enfin tombé, l’ULC a fait part aussitôt de sa déception.

Le projet de loi transposant la directive européenne sur les actions représentatives, qui devait entrer en vigueur le 25 juin 2023, a inspiré au Conseil d’État «nombre d’oppositions formelles de sorte que le projet devra être revu fondamentalement avant toute adoption et entrée en vigueur», se lamentait l’ULC.

L’accord de coalition 2018-2023, était censé donner «l’impulsion nécessaire» pour introduire le recours collectif en droit luxembourgeois. L’ancien gouvernement qui voulait adopter «rapidement» le texte, a raté son coup. Le dossier est entre les mains de Martine Hansen (CSV) qui en hérite à la suite de Paulette Lenert. La commission de l’Agriculture, de l’Alimentation et de la Viticulture va examiner de plus près l’avis du Conseil d’État, et désigner par la même occasion, peut-être, un nouveau rapporteur ou nouvelle rapportrice qui succédera à Tess Burton, ex-députée socialiste qui avait été nommé en décembre 2021.

Depuis cette date, le texte est en attente, plus rien n’a bougé en commission et le recours collectif n’est toujours pas introduit. L’ULC, qui appréciait l’audace du texte initial, voit ses espoirs s’effondrer après l’avis des Sages.

«Il faudra une seconde loi»

Le projet proposait un règlement extrajudiciaire laissé aux soins de médiateurs agréés, ce qui avait mis le patronat en boule. Il estimait que le droit commun devait suffire. Le Conseil d’État, lui, rejette le dispositif de médiation pour «insécurité juridique». Pour l’ULC, «si le projet devait renoncer à son modèle original de règlement extrajudiciaire, il n’y aura plus d’incitations à la médiation coûteuse par nature et insensible aux spécificités du droit de la consommation. Le médiateur de la consommation, financé aussi par l’État, ne s’occupe pas de litiges collectifs», notait l’ASBL.

Sa grande crainte se situe au niveau du financement des actions en justice pour les recours collectif. La médiation permettait d’éviter des frais d’avocats et d’expertises coûteuses que l’ULC ne pourra pas se permettre de supporter. «Après deux ou trois recours, on peut mettre la clé sous la porte», illustrait le président Nico Hoffmann, pour souligner qu’une petite structure comme l’ULC s’écroulerait rapidement sous les frais de justice.

«Rien n’est prévu dans ce projet de loi en ce qui concerne le financement des actions collectives et pour cela, il faudra une seconde loi», regrettait le président de l’ULC, Nico Hoffmann. «Il faudra que l’État finance un fonds spécial pour permettre aux associations de financer les recours collectifs», ajoutait-il, ne voyant pas comment l’ASBL qu’il préside pourrait entamer et préfinancer une procédure jusqu’au prononcé du jugement.

Sans le mécanisme de médiation, «le futur recours collectif au Luxembourg se perdra dans les méandres de longues procédures judiciaires très coûteuses avec peu de décisions comme c’est le cas, hélas, aujourd’hui en Belgique et en France qui disposent déjà de législations antérieures à la directive d’harmonisation européenne», regrettait l’ULC. «Le projet du gouvernement souhaitait justement parer aux failles des pays voisins et rendre le règlement extrajudiciaire le plus alléchant possible pour les deux parties en litige», rappelait-elle.

Un mécanisme nécessaire

Alors qu’elle attendait l’avis des Sages pour voir le texte être enfin adopté par les députés, elle constate que le chemin à parcourir risque d’être encore long.

Depuis le 20 juin 2023, date de la publication de l’avis du Conseil d’État, soit cinq jours avant la date de l’entrée en vigueur de la directive européenne, le projet de loi est mis en veille. Reste à savoir ce que les députés en feront, demain. Pourtant, «l’introduction d’un mécanisme collectif en droit de la consommation luxembourgeois est nécessaire», expliquaient les auteurs du projet de loi dans l’exposé des motifs. L’urgence consiste à combler un vide juridique sur le plan procédural.

L’action en cessation, qui permet aujourd’hui de faire cesser une violation du droit de la consommation nuisant aux intérêts collectifs des consommateurs, ne permet pas, en revanche, l’indemnisation des consommateurs victimes des pratiques illicites.

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