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Le gouvernement fait sauter le plafond des loyers


Le Conseil d’État ne pouvait que constater «l’importance de l’ingérence dans le droit de propriété prévue dans le dispositif».

Le gouvernement a décidé de supprimer le volet relatif à la réforme du plafond des loyers, qui était décriée depuis le début. Quant à la colocation, elle fera l’objet d’un texte à part.

Bientôt quatre ans que l’ancien ministre du Logement, Henri Kox, a déposé le projet de loi réformant la loi sur le bail à loyer et le nouveau gouvernement a désormais hâte que le texte aboutisse.

Plusieurs fois amendé, le projet de loi était une nouvelle fois inscrit à l’ordre du jour du Conseil de gouvernement qui s’est déroulé hier.

De nouveaux amendements ont été approuvés, qui clarifient les dispositions concernant la colocation, la procédure de restitution des garanties locatives, le partage équitable des frais d’agence immobilière, l’obligation d’un bail écrit et l’abolition de la notion de logements de luxe.

Protéger les bailleurs

La grande nouveauté, et pas des moindres, c’est que le gouvernement supprime finalement tout le volet relatif à la réforme du plafond des loyers. Il en a décidé ainsi après «la forte contestation» que ce chapitre a suscitée.

Le plafond du loyer annuel maximal, actuellement limité à 5 % du capital investi (réévalué et décoté) dans le logement, devait être réduit à un taux de 3,5 % à 3 % du capital investi selon la catégorie énergétique du bien.

De plus, l’accord de coalition indiquait clairement que le gouvernement allait revoir le texte pour «tenir compte de la situation économique actuelle du marché du logement et veiller à maintenir un rapport équilibré entre locataires et bailleurs».

Protéger les bailleurs et inciter en parallèle les investisseurs privés à investir dans la création de logements supplémentaires, voilà pour ce qui est de l’équilibre à trouver.

L’importance de l’ingérence

Le Conseil d’État avait attiré l’attention des auteurs du projet sur la législation que l’État peut mettre en vigueur pour réglementer l’usage des biens.

«L’État reste en effet soumis au respect d’un juste équilibre entre l’intérêt général et l’intérêt particulier. C’est en raison de la violation de cet équilibre que la Cour a été amenée à condamner, au cours de la dernière décennie, certaines lois nationales», rappelaient les Sages en se référant à des jurisprudences de la Cour européenne des droits de l’homme.

Le Conseil d’État ne se disait pas en mesure «de porter un jugement sur le régime envisagé par le projet de loi» au regard de cette jurisprudence. Il ne pouvait que constater «l’importance de l’ingérence dans le droit de propriété prévue dans le dispositif».

Le gouvernement a eu beau revoir sa copie à deux reprises, le Conseil d’État persistait à penser que les nouvelles obligations légales risquaient d’amener certains bailleurs, et notamment les petits propriétaires, «à préférer une mise en vente de leur logement, sinon à renoncer à sa mise en location, ce qui, dans les deux hypothèses, reviendrait à limiter encore plus le marché du logement locatif et donc à aboutir au résultat inverse de celui visé par les auteurs du projet de loi».

Séparer la colocation

Henri Kox vantait un plafond des loyers efficace, avec l’obligation pour le propriétaire de déterminer le capital investi, et l’obligation d’un contrat de bail par écrit avec indication de ce capital investi afin de donner aux locataires la transparence nécessaire pour se protéger contre des loyers d’usure.

La nouvelle version du texte battait toujours de l’aile et forçait les Sages à émettre quatre oppositions formelles qui s’ajoutaient aux deux premières formulées pour insécurité juridique.

Le Conseil d’État dit «comprendre la finalité» du projet de réforme, mais la haute corporation «estime que le texte proposé n’y parvient que très imparfaitement en raison de son imprécision».

Le gouvernement a encore décidé que les dispositions légales spécifiques à la colocation seront scindées et reprises dans un nouveau projet de loi afin de le soumettre au vote de la Chambre des députés «dans les plus brefs délais».