Une nouvelle exposition inaugurée dimanche au Centre nature et forêt Ellergronn, à l’occasion de la fête de la Nature, dresse le constat alarmant des effets néfastes de l’homme sur la nature. Et incite à trouver des solutions…
Au mitan de sa 25e édition, la campagne «En Dag an der Natur», qui court jusqu’au 31 août, a investi dimanche le Centre nature et forêt Ellergronn, à Esch-sur-Alzette. La grisaille et les nuages menaçants étaient de la partie, et c’est même sous une fine pluie que la ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, Joëlle Welfring, a asséné la dure vérité : «Les ressources de notre planète sont limitées.»
Une vérité qu’il faut répéter, encore et encore, mais surtout, qu’il faut écouter. L’urgence climatique se fait de plus en plus pressante. Mais à en croire l’Agenda 2030 du gouvernement, même les objectifs les plus réalisables à court terme – «conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable», «préserver et restaurer les écosystèmes terrestres (…) et mettre fin à l’appauvrissement de la biodiversité» – semblent hors de notre portée.
Pour comprendre un peu mieux comment la Terre et l’humanité en sont arrivées là, il faut prendre du recul. C’est ce que propose l’exposition «Transition NOW – La nature, le climat et nous», dont la première partie a été inaugurée dimanche lors de la fête de la Nature. Dans l’ancienne halle industrielle qui jouxte le bâtiment principal du Centre nature et forêt Ellergronn, les murs et les fenêtres ont été transformés en espace d’exposition, en face duquel trône la grande question : «Que devons-nous faire maintenant pour que nos enfants habitent une planète vivable en 2050 ?»
Bienvenue dans l’Anthropocène
L’exposition «Transition NOW» sera complétée par une deuxième partie, au sous-sol de la halle industrielle, qui sera visible au public à la fin de l’année. D’ici là, elle propose de se familiariser avec une nouvelle ère. «I want you to panic!», avait déclaré au Forum de Davos, en 2019, l’activiste suédoise Greta Thunberg : c’est un peu ce qu’il faut éprouver devant la fin imminente l’Holocène, «point de départ de l’évolution rapide de la civilisation humaine», il y a environ 12 000 ans et dans laquelle nous vivons toujours… mais plus pour longtemps.
Car les désordres occasionnés par l’être humain, à commencer par la destruction accélérée de la nature et tout ce qui lie les comportements de l’homme au dérèglement climatique, s’apprêtent à marquer l’avènement de l’Anthropocène, que l’on peut simplifier en «âge des humains» et qu’il faut comprendre comme le désordre ultime qui empêchera la survie de notre planète.
La fenêtre ronde à l’entrée du lieu d’exposition prend maintenant la forme de la Terre et est divisée en neuf parties, représentant chacune une des neuf limites écologiques de notre planète. Aujourd’hui, seules trois n’ont pas encore été dépassées : l’utilisation d’eau douce, la diminution de la couche d’ozone et l’acidification des océans. Pour le reste, on imagine difficilement comment inverser le cours des choses… Une information qui, à elle seule, devrait alarmer le visiteur.
Mais il y a plus : on apprend qu’en 2020, la masse totale des édifices et des biens de consommation sur la planète a dépassé la masse totale des plantes et des animaux, ou encore que sept millions de personnes meurent chaque année à cause de la pollution atmosphérique. Devant la masse d’informations donnée par l’exposition «Transition NOW», nous avons toutes les cartes en main pour agir, et déjà réfléchir à la manière dont l’humain pourrait enfin se montrer digne de son rôle de «gardien de la planète», qu’il a abandonné depuis la «grande accélération» initiée par la Révolution industrielle.
Et le Luxembourg dans tout ça ?
Face à cette catastrophe mondiale, le Grand-Duché a de quoi se parer à l’effondrement écologique. Voilà un pays qui possède l’un des revenus par habitant les plus élevés et qui a la deuxième plus grande empreinte écologique au monde. Autant dire que le Luxembourg fait partie des rares territoires qui peuvent se permettre de se diriger vers le changement des modes de vie et des habitudes de consommation.
Mais même cela ne suffit plus : entre une croissance démographique qui file vers les étoiles, une température ambiante qui a augmenté de 1,6 degré, ses près de 16 tonnes de CO2 émises par habitant en 2018 (contre 2 tonnes pour l’Inde), ses 80 % de zones humides détruites depuis 1950 et ses cours d’eau dont aucun n’est «dans un bon état écologique», le pays ne se place même pas parmi les bons élèves dans son rapport à l’environnement. Le simple choix de montrer cette exposition sur des terres surexploitées a de quoi faire réfléchir…
La ministre de l’Environnement n’assure pas moins qu’il «existe des alternatives et des solutions». Ainsi, le spectateur peut découvrir à l’étage de la halle industrielle un aperçu de ce que le Luxembourg compte entreprendre à l’horizon 2050. De ses 16 tonnes d’émissions de CO2, le pays entend les réduire dix fois moins, soit à 1,6 tonne par habitant.
Des études de cas, à Bettendorf, Differdange, Foetz ou encore Leudelange, imaginent un paysage transformé, pour un futur plus vert et pour que la modernité soit synonyme de respect de l’environnement. Le Biergerkommitee Lëtzebuerg 2050, composé de 30 citoyens luxembourgeois, a élaboré durant un an «neuf principes et 44 propositions pour une politique de transition» visant à rendre le pays neutre en carbone d’ici 2050.
Des solutions existent, effectivement; reste à savoir si la population – luxembourgeoise, européenne, mondiale – est prête à faire un pas en avant. C’est là qu’on s’aventure dans l’utopie… Car si la suite de l’exposition ne sera dévoilée que dans quelques mois, le changement, en bien ou en mal, n’attend pas.
«Transition NOW – La nature, le climat et nous», à voir au Centre nature et forêt Ellergronn – Esch-sur-Alzette.