Le fonds destiné à financer les «pertes et dommages» climatiques des pays vulnérables s’est concrétisé hier, au premier jour de la COP28 à Dubai.
La COP28 s’est ouverte en fanfare hier à Dubai avec la concrétisation très attendue d’un fonds de compensation des pertes et dommages climatiques dans les pays vulnérables. La grande conférence internationale sur le climat a été inaugurée officiellement dans l’émirat pétrogazier, au moment où l’Organisation météorologique mondiale confirmait que l’année 2023 devrait être la plus chaude jamais enregistrée. Première avancée majeure de la COP28, la concrétisation du fonds destiné à financer les «pertes et dommages» climatiques des pays vulnérables a été adoptée, un pas positif pour espérer dégripper les tensions financières entre le Nord et le Sud, en parallèle des négociations sur les énergies fossiles.
Cette décision historique, saluée par une ovation debout des délégués des près de 200 pays participants, concrétise le principal résultat de la COP27 en Égypte l’an dernier, où ce fonds avait été approuvé sur le principe mais dont les contours, très débattus, n’avaient pas encore été définis. «C’est un signal positif pour le monde et pour notre travail», a déclaré Sultan Al Jaber, le président émirien de cette COP28. «Nous avons écrit une page d’histoire aujourd’hui… La rapidité avec laquelle nous l’avons fait est inédite, phénoménale et historique.»
Les énergies fossiles font de la résistance
Reste à savoir de combien sera doté ce fonds, provisoirement accueilli par la Banque mondiale, contre l’avis initial des pays en développement. Les premières promesses ont commencé à pleuvoir : 225 millions d’euros pour l’Union européenne (dont 100 millions de dollars annoncés par l’Allemagne), 100 millions de dollars pour les Émirats, 10 millions de dollars pour le Japon, 17,5 millions pour les États-Unis, jusqu’à 40 millions de livres (environ 50 millions de dollars) pour le Royaume-Uni… Les pays développés font aussi pression pour élargir la base des donateurs aux riches émergents, comme la Chine et l’Arabie saoudite.
Madeleine Diouf Sarr, présidente du groupe des Pays les moins avancés, qui représente 46 des nations les plus pauvres, a salué une décision d’une «signification énorme pour la justice climatique». «Mais un fonds vide ne peut pas aider nos citoyens», a-t-elle souligné, alors que les pertes se chiffrent en centaines de milliards. «On attend des promesses en milliards, pas en millions», a pressé Rachel Cleetus, du groupe américain Union of Concerned Scientists (UCS). «Le travail est loin d’être achevé», a aussi réagi l’alliance des petits États insulaires (Aosis). «On ne sera pas tranquilles tant que ce fonds ne sera pas financé convenablement et commencera à alléger le fardeau des communautés vulnérables.»
Malgré cette avancée rapide sur ce sujet crucial, les négociateurs auront d’autres sujets probables de division, en discutant de l’avenir des énergies fossiles, sur fond de conflit entre Israël et le Hamas. Signe que la guerre occupe les esprits, le président de la précédente conférence, Sameh Choukri, chef de la diplomatie égyptienne, a appelé au début de la cérémonie d’ouverture à un court moment de silence pour «tous les civils ayant trouvé la mort dans le conflit actuel à Gaza». Le président israélien, Isaac Herzog, profitera aussi de sa venue à la COP pour mener une série de réunions diplomatiques destinées à faire libérer d’autres otages détenus par le Hamas, ont indiqué ses services.
180 chefs d’Etat et de gouvernement attendus
Plus de 97 000 personnes (délégations, médias, ONG, lobbys, organisateurs, techniciens…) sont accréditées, deux fois plus que l’an dernier, et environ 180 chefs d’État et de gouvernement sont attendus selon les organisateurs d’ici le 12 décembre, fin théorique de la conférence. Plus de 140 dirigeants défileront à la tribune aujourd’hui et demain pour des discours de quelques minutes censés donner une impulsion politique aux négociations byzantines qui occuperont les délégations pendant deux semaines.
En haut de l’agenda figurera le sort des énergies fossiles – charbon, gaz, pétrole – dont l’utilisation est la principale cause du réchauffement climatique et des catastrophes qui l’accompagnent. Également directeur général de la compagnie pétrolière nationale Adnoc, Sultan Al Jaber a mis les pieds dans le plat en appelant à mentionner «le rôle des combustibles fossiles» dans tout accord final. Cela alors qu’il est sous le feu des critiques après la publication par la BBC et le Centre for Climate Reporting de notes internes de préparation de réunions officielles qui énumèrent des arguments pour la promotion des projets d’Adnoc à l’étranger.
Il a rejeté ces accusations mercredi. «C’est à ses résultats qu’on évaluera le président de la COP», a jugé Jennifer Morgan, l’émissaire pour le climat de l’Allemagne. Le chef de l’ONU Climat, Simon Stiell, s’est montré encore plus direct : «Si nous ne donnons pas le signal de la phase terminale de l’ère fossile telle que nous la connaissons, nous préparons notre propre déclin terminal».
Le Grand-Duc et Serge Wilmes sont à Dubai
Aujourd’hui et demain, le Grand-Duc Henri, accompagné du ministre de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité, Serge Wilmes, est à Dubai pour représenter le Luxembourg au World Climate Action Summit. Ce sommet a lieu sur invitation du pays hôte, les Émirats arabes unis, en marge de la COP28 de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui est considérée comme la plus grande conférence mondiale sur l’action climat.
Outre la participation à ce sommet climat de haut niveau, le Grand-Duc et le ministre de l’Environnement profiteront de l’occasion de rencontrer des acteurs de la société civile, ainsi que de visiter les pavillons des principaux partenaires du Luxembourg dans le domaine de l’action climat. Le ministre Serge Wilmes participera par ailleurs à la séance de lancement du Club Climat (Climate Club) dont le Luxembourg est l’un des premiers supporteurs. Le Club Climat, initié par le G7 en décembre 2022, présidé par le chancelier allemand, Olaf Scholz, et le président chilien, Gabriel Boric, a pour objet d’accélérer la décarbonisation de l’industrie mondiale en ligne avec les objectifs de l’accord de Paris, en commençant par l’acier et le ciment.