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Impôt foncier : les Sages suggèrent de tout réécrire


Le Conseil d’État aimerait que les auteurs du projet de loi sur l’impôt foncier mettent un peu d’ordre et uniformisent la procédure pour les trois taxes.  (photo archives LQ)

Le Conseil d’État a rendu son avis sur le texte présentant la réforme de l’impôt foncier et ses suites. Sa conclusion est sans appel au bout de 17 oppositions formelles. La copie est à revoir.

Les Sages retoquent le projet de réforme de l’impôt foncier sorti de trois ministères, l’Intérieur, le Logement et les Finances. Ils proposent même de réécrire le texte pour combler les vides procéduraux et uniformiser les trois nouveaux impôts. Au total, le Conseil d’État émet 17 oppositions formelles dont la plupart ont trait à une insécurité juridique. Mais pas toutes.

Le président du Syvicol qui se réjouissait d’avoir obtenu la non-imposition des terrains situés en zone verte risque d’être déçu. Les Sages ne voient aucune raison de faire une différence alors que la notion même de l’impôt foncier devrait couvrir tout le territoire national. Vouloir limiter l’impôt aux parcelles construites et constructibles en zone urbanisée en excluant les autres propriétés foncières situées en zone verte, apparaît contraire à une imposition juste et équitable.

Les auteurs du projet de loi ne voulaient pas s’embarrasser pour si peu. Le jeu n’en vaut pas la chandelle, vu les moyens à déployer pour de maigres recettes perçues pour ces terrains. Le Conseil d’État considère cette explication «comme non convaincante et insuffisante», estimant qu’elle vaut tout aussi bien pour la mise en place du nouvel impôt foncier dans son entièreté, «étant donné que les recettes à générer par l’impôt foncier réformé devraient se cantonner, d’après les auteurs du projet, entre 33,8 à 41,3 millions d’euros».

Il existe, au demeurant, des résidences secondaires situées en zone verte, des hangars agricoles aussi. On peut également y trouver des logements non occupés qui seront imposés au titre du nouvel impôt sur la non-occupation de logement, alors que les constructions dans lesquelles ces logements se trouvent seront exemptées de l’impôt foncier.

Problème de transfert de compétence

«Étant donné que les terrains construits en zone urbanisée et les terrains construits en zone verte constituent des terrains tout à fait comparables», note le Conseil d’État, il se voit dans l’obligation de s’opposer formellement à cet article du projet de loi.

Vient ensuite le gros problème de transfert de compétence. L’impôt foncier, au même titre que les finances communales, fait partie des attributions du ministre de l’Intérieur qui assure ainsi les compétences traditionnelles d’imposition des services de l’administration des Contributions directes, «dorénavant exclue de la procédure, ce qui constitue un précédent voire un changement de paradigme», observent les Sages.

Les deux autres impôts introduits par ce projet de loi, celui sur la non-occupation de logement et celui à la mobilisation de terrain, sont des impôts nationaux, donc de la compétence de l’administration des Contributions directes.

Pour les Sages, le texte ne prend pas suffisamment en considération «les complexités de la matière au niveau procédural». Il tente d’instaurer le mélange d’éléments issus de la procédure administrative avec les impératifs des règles fiscales traditionnelles en la matière. Le Conseil d’État «suggère de revoir entièrement le projet de loi sous examen afin de le doter d’un régime procédural uniforme pour les trois impôts, en ce compris la question des voies de recours». Les Sages renvoient carrément les auteurs à leur copie.

Des reproches sur la forme

Le Conseil d’État a reconnu le bien-fondé du projet de loi, reconnaissant que l’absence d’impôts fonciers significatifs a conduit à la spéculation que le pays doit affronter aujourd’hui pour stopper la flambée de l’immobilier.

Toutefois, ils reprochent à la socialiste Taina Bofferding, à l’écolo Henri Kox et la libérale Yuriko Backes, de manquer de précision et de cohérence dans le texte. Selon l’exposé des motifs, l’objectif de la réforme n’est pas de gonfler les recettes fiscales, mais d’instaurer «une imposition juste et équitable qui ne s’expose pas à des reproches d’inégalité de traitement». Il s’agissait encore de créer un modèle d’évaluation foncière «transparent et objectif, permettant de contribuer à la lutte contre la pénurie de logements dans le cadre d’un impôt à la mobilisation des terrains».

Les Sages rappellent tout de même aux auteurs que la finalité et la fonction financière première de l’impôt foncier sont bien «de procurer des ressources au profit des communes pour leur permettre de couvrir les dépenses supplémentaires occasionnées par la propriété foncière située sur leur territoire».