En Suisse, la loi Lex Koller limite le marché de l’immobilier aux acheteurs de pays tiers qui doivent obtenir une autorisation pour acquérir un bien. Une telle idée n’effleure pas la ministre de la Justice.
C’est la seule législation étrangère à laquelle l’ASBL Mieterschutz (défense des locataires) fait référence. Il s’agit de la loi suisse, appelée Lex Koller, limitant l’accès au marché de l’immobilier aux étrangers non ressortissants de l’Union européenne, donc des pays dits tiers. Cette loi est vieille de 40 ans, mais il existe, en Suisse, depuis 1961 déjà, des lois qui régissent l’acquisition immobilière par des non-ressortissants suisses.
Comme le souligne le député libéral André Bauler, dans une question parlementaire, certaines personnes proposent de créer un cadre légal similaire au Luxembourg «afin de lutter contre la pénurie de logements», ajoute le député.
Il a cherché à obtenir des réponses à des interrogations précises concernant une possible transposition de cette loi au Luxembourg et a donc questionné la ministre de la Justice, Sam Tanson (déi gréng) à ce sujet. La réponse s’est limitée à une seule phrase : «Je tiens à préciser que le ministère de la Justice n’a pas étudié l’opportunité et a fortiori la faisabilité de mettre en œuvre un cadre légal interdisant l’acquisition d’immeubles par des étrangers, à l’instar de la loi suisse, dite Lex Koller», signé Sam Tanson.
Le député ne saura pas dans quelle mesure un tel cadre juridique pourrait être conforme à la Constitution luxembourgeoise, ni si une telle législation serait compatible avec les principes du marché unique et des traités de l’Union européenne.
Pas encore de réflexions sur le sujet au ministère de la Justice
Pour finir, André Bauler anticipe déjà, en pensant certainement aux sociétés qui détiennent au Luxembourg, surtout dans la capitale, une grosse part de foncier bâti et non bâti. «Au cas où un tel cadre pourrait être mis en place au Luxembourg, ne serait-il dès lors pas possible de le contourner en créant par exemple des sociétés de personnes ou de capitaux de droit luxembourgeois – appartenant en tout ou en partie à des ressortissants extra-UE – qui investiraient dans des biens immobiliers situés sur notre territoire national?», questionne-t-il encore.
Le ministère de la Justice n’a pas encore débuté de réflexion sur le sujet. C’est dire si une telle loi lui paraît superflue, alors que l’urgence absolue se situe dans le manque de logements, si possible abordables.
En Suisse, les ressortissants étrangers domiciliés à l’étranger, les ressortissants étrangers domiciliés en Suisse qui ne sont ni des citoyens d’un pays de l’UE ou de l’AELE et qui sont en possession d’une autorisation d’établissement valide, sont concernés par la loi Lex Koller. Il existe des exceptions, bien sûr. Aucune autorisation n’est nécessaire si le terrain est utilisé pour établir durablement une entreprise commerciale ou de production, une exploitation artisanale, un restaurant, des locaux pour professions libérales et des cabinets médicaux.
Résidences contingentées
«L’achat ne pose un problème que si le bien est utilisé non seulement à des fins commerciales, mais aussi à des fins résidentielles. Les logements appartenant à des biens immobiliers commerciaux ne peuvent être acquis sans autorisation que dans des cas exceptionnels justifiés. C’est le cas, par exemple, s’ils sont nécessaires à l’exploitation ou si une séparation de la partie utilisée à des fins professionnelles ne peut pas être exigée», précise la loi.
De nombreux cantons autorisent toutefois l’achat de résidences secondaires en faisant abstraction de la loi. L’acquisition de résidences de vacances par des non-ressortissants suisses est soumise dans toute la Suisse à un contingentement. Tous les ans, seulement 1 500 résidences de vacances peuvent être acquises par des non-ressortissants suisses domiciliés à l’étranger, avec des variations selon les cantons.
En janvier 2021, une initiative parlementaire suisse intitulée «Étendre provisoirement le régime de l’autorisation prévu par la Lex Koller aux immeubles destinés à une activité commerciale ou professionnelle» a été déposée. Son but? Éviter que des entreprises ou des particuliers étrangers aisés exploitent la détresse financière d’entreprises suisses pour acquérir à bas prix les immeubles de celles-ci. L’idée a été vite abandonnée.
Au Luxembourg, aucune loi de ce type ne fait son chemin