S’engager pour le climat ou d’autres causes qu’ils ont à cœur n’est pas vraiment un choix pour Julien Lemmer Veloso et Maximilian van Pauw Gerlings, 17 ans tous les deux. C’est une vocation.
Écoutons les jeunes!
Les «vieux» tirent souvent sur les «jeunes» qui, c’est bien connu, étaient bien mieux avant. Ce discours est aussi ancien que le monde, mais il n’a jamais été vrai (lire le livre très éclairant de Salomé Saqué, Sois jeune et tais-toi aux Éditions Payot). C’est heureux parce que si tel avait été le cas, nous n’aurions pas inventé grand-chose de bon aujourd’hui.
En cette fin d’année, nous avons donc souhaité donner la parole à deux jeunes engagés pour la défense du climat (et pas seulement), dont le discours posé et érudit est la meilleure réponse aux approximations des générations aux commandes.
Et si l’on regardait cette jeunesse, tous ensemble, sans cette pointe de dédain (parfois plus) qu’elle encaisse avec beaucoup de maturité, finalement?
La première partie de cette interview a été publiée le samedi 21 décembre et est disponible ici.
La semaine dernière, vous nous disiez regretter que les politiques ne prennent pas la question du climat assez au sérieux. Qu’auriez-vous envie de leur dire?
Maximilian van Pauw Gerlings : Il y a 15 ans, on ne savait sans doute pas vraiment quoi faire, mais désormais, ce n’est qu’une question de volonté politique. Pourquoi n’est-ce pas une priorité alors que l’on voit bien que le climat change et que cela nous impose de revoir nos comportements, notre économie?
Julien Lemmer Veloso : Les rapports du GIEC sont explicites, tout le monde connaît ses conclusions. En plus, nous avons un scientifique luxembourgeois qui y participe. Donc les élus n’ont pas à aller loin pour s’informer, s’ils en avaient besoin. Pourquoi ne commence-t-on pas à agir?
Les élus suivent aussi les électeurs qui, un peu partout en Europe (sans parler des États-Unis), ne soutiennent pas les écologistes…
M. v.-p. G. : On ne voit qu’à court terme. Tant que l’on arrive à mettre ce qu’il faut dans nos assiettes, c’est que tout va bien. Mais moins on agit aujourd’hui et pire ce sera demain.
Est-ce que les lycéennes et les lycéens vous semblent plus concernés que les adultes ?
M. v.-p. G. : L’intérêt dans les lycées est très varié… Ceux qui s’intéressaient déjà à la politique sont très concernés, mais beaucoup d’autres voient cela d’un œil très lointain. On ne peut pas dire que les questions climatiques touchent tous les jeunes, non.
J. L. V. : Nous avions lancé un sondage au sein du lycée avant la COP pour savoir où nos camarades se renseignaient sur le changement climatique. Sur 163 participants, 38 % ont déclaré prendre les informations au moins en partie sur les réseaux sociaux. Or il y a tellement de fake news…
Si nous réglons toutes les crises sauf le climat, ça ne servira à rien
Est-ce que cette thématique est abordée dans vos cours ?
J. L. V. : Au lycée Robert-Schuman, nous sommes sensibilisés, mais je ne suis pas certain qu’on utilise les bons concepts. On parle beaucoup de ces thèmes avec une approche négative, trop anxiogène. Alors beaucoup préfèrent fermer les yeux et ne rien faire.
M. v.-p. G. : Il faut dire qu’il y a tellement de raisons d’être anxieux…
J. L. V. : Les professeurs supportent nos actions, ils approuvent ce que l’on fait, mais ils restent dans une position extérieure. Ils ne s’engagent pas vraiment à nos côtés.
Justement, est-ce que l’écologie pâtit du nombre de crises actuelles? L’invasion de l’Ukraine, les conflits au Proche-Orient, la montée de l’extrême droite un peu partout…
J. L. V. : Les autres crises sont aussi importantes que le climat, il ne s’agit pas de les hiérarchiser. Mais si nous réglons toutes les autres sauf le climat, ça ne servira à rien. Le changement climatique, c’est comme une personne avec un couteau qui se trouverait dans notre dos.
À votre avis, que faudrait-il faire pour que la conscience des jeunes face au péril climatique progresse ?
M. v.-p. G. : La sensibilisation devrait commencer bien plus tôt. Aujourd’hui, à l’école, on n’entend pas parler du changement climatique pendant les dix premières années et, d’un coup, on est bombardé d’informations angoissantes. Ce n’est pas la bonne méthode, le risque de refuser d’y penser pour se protéger est important.
J. L. V. : Il faut aussi réfléchir à inclure de la meilleure manière possible les réseaux sociaux et l’intelligence artificielle. On ne peut pas laisser ces outils à ceux qui produisent les fake news. Nous devons mieux les utiliser. On parle de bannir les GSM du lycée, mais ce serait une très mauvaise idée. Il faudrait plutôt nous apprendre à bien les utiliser! Ce sont des outils que tout le monde possède et que l’on utilisera toute notre vie, les enlever du lycée n’aurait aucun sens.
C’est parfois dur de s’engager et de voir que ses efforts ne payent pas toujours
Vous vous engagez tous les deux sur de nombreux fronts, comment arrivez-vous à organiser vos vies ?
J. L. V. : On ne compte pas les heures, c’est sûr! Je m’engage pour le climat au sein du lycée, du Klimapakt de ma commune (Sandweiler), je suis ambassadeur de l’Unicef, du Earth Day… C’est beaucoup, mais j’aime ça!
M. v.-p. G. : Je ne peux pas m’imaginer rester à ne rien faire chez moi. Je vois bien que mes parents s’inquiètent un peu pour moi, ils se demandent si je n’en fais pas trop. J’étais aussi bénévole pour la campagne de Kamala Harris, ça m’a occupé environ six heures par semaine pour un résultat déprimant. Comme à la COP finalement. C’est parfois dur de s’engager et de voir que ses efforts ne payent pas toujours. Après les élections américaines, j’ai été vraiment déprimé pendant une bonne semaine. Et puis je me suis dit qu’il ne fallait pas baisser les bras, qu’il fallait continuer. Si on veut que le monde change, nous n’avons pas le choix : c’est à nous d’agir.
Carte d’identité
NOM : Julien Lemmer Veloso
ÂGE : 17 ans
FONCTIONS : lycéen en 3e au lycée Robert-Schuman, président du LRSL_Actionteam4future et du comité de durabilité du lycée Robert-Schuman, coprésident de la commission Environnement au Parlement des Jeunes, organisateur principal du projet Youth4Climate Action, membre de la commission du Pacte Climat de Sandweiler, ambassadeur du Pacte Européen pour le Climat, ambassadeur de l’Unicef Jeunesse, ambassadeur de Earthday – My Future, My Voice.
Carte d’identité
NOM : Maximilian de Pauw Gerlings
ÂGE : 17 ans
FONCTIONS : lycéen en 1re à l’Athénée de Luxembourg, membre du Conseil d’Administration du DP Junglinster, membre et volontaire de campagne DP, co-président de la Commission Économie du Parlement des jeunes, conseiller auprès du Conseil d’Administration de la LUXMUN (Luxembourg international model United Nations), président du Club de Débat de Luxembourg, membre et responsable Contenu de Change for Luxembourg, volontaire pour la campagne Harris for President, président du MUNOG 2023 (Model United Nation of Goldberg).