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[Gardiens de la nature] «Il n’y aura pas de perte d’arbres remarquables»


Les arbres remarquables classés sont non seulement des marqueurs de territoire, mais ils jouent aussi un rôle écologique très important. (Photo : archives editpress)

De vifs échanges ont eu lieu cette semaine entre le ministère de l’Environnement et le Mouvement écologique. En jeu, la nouvelle liste officielle des arbres remarquables dans le pays.

L’État veut-il réduire drastiquement la liste des arbres remarquables, donc protégés? Le Mouvement écologique (Méco) a fait part de son inquiétude dans un communiqué de presse envoyé lundi. Sollicitée par Le Quotidien, l’administration de la Nature et des Forêts (qui dépend du ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité) a donné des réponses détaillées en assurant que tel ne serait pas le cas, au contraire.

Retraçons cette histoire. Martine Neuberg, responsable du service Forêts de l’administration de la Nature et des Forêts, explique que «la base légale pour le classement des arbres remarquables était, jusqu’en 2022, la loi du 18 juillet 1983 relative à la conservation et à la protection des sites et monuments nationaux». À l’époque, 108 arbres situés le plus souvent à côté de bâtiments classés avaient été inscrits. «L’objectif était de conférer un statut de protection élevé à l’ensemble du site qui comprenait le bâtiment et l’arbre.»

Mais la nouvelle loi du 25 février 2022 relative au patrimoine culturel ne permet plus de classer un arbre comme un monument. Les arbres remarquables doivent être inscrits sur une nouvelle liste, qui figure depuis 2022 dans l’article 14 bis de la loi sur la protection de la nature et des ressources naturelles. La responsabilité de ce catalogue passe donc de l’Institut national pour le patrimoine architectural (INPA, ex-Service des sites et monuments nationaux) à l’administration de la Nature et des Forêts (ANF).

Ce transfert s’accompagne d’une nouvelle procédure qui définira, notamment, de nouveaux critères de distinction. «Ils se trouveront dans le règlement grand-ducal qui sera établi en exécution de la loi du 18 juillet 2018 relative à la protection de la nature et des ressources naturelles. Ils concerneront les aspects biologique, paysager, morphologique, historique et/ou commémoratif des arbres», précise Martine Neuberg.

Près de 250 arbres seront classés

Dans son communiqué, le Méco s’indignait de constater que «seuls 100 arbres sur les plus de 500 qui figuraient sur l’ancienne liste étaient maintenus et que, par conséquent, 400 arbres aient été déclassés alors que seuls 145 nouveaux ont été ajoutés». Les défenseurs de l’environnement assuraient, en outre, qu’une circulaire a été envoyée aux gardes forestiers pour leur demander d’indiquer deux ou trois arbres dignes de protection dans leur zone de travail. «Il doit y avoir bien des endroits où davantage d’arbres sont à protéger», regrettait vendredi Blanche Weber, la présidente du Méco.

L’ANF se justifie en expliquant que le Méco ne s’est pas basé sur la bonne liste. Celle, originelle, des arbres remarquables en comptait 108, pas 500. Il n’en reste d’ailleurs aujourd’hui plus que 64 pour différentes causes, «comme, par exemple, leur mort naturelle due à leur âge ou leur abattage autorisé en raison d’une situation dangereuse due à des raisons phytosanitaires ou à des événements météorologiques», précise Martine Neuberg.

La liste mise en avant par le Méco n’était pas celle des arbres remarquables, mais une énumération établie «par l’ANF en application du règlement grand-ducal du 18 mars 2008 concernant les aides pour l’amélioration de l’environnement naturel. Cette liste avait pour but de déterminer quels arbres âgés pouvaient bénéficier de subsides pour leur remise en état. Les frais d’entretien des arbres qui se trouvaient sur cette liste pouvaient être subventionnés à 50 %. Les frais d’entretien des arbres remarquables classés monuments nationaux pouvaient toutefois être subventionnés à 75 % sur base de ce règlement».

Martine Neuberg avance que le nouveau décompte déterminera autour de 250 arbres, «dont ceux qui figuraient sur les listes du Service des sites et monuments, mais aussi d’autres, sélectionnés selon les critères fixés par la loi. En réalité, il n’y a pas eu de perte d’arbres remarquables». Elle assure de plus que «l’ANF continue à s’investir dans la protection des arbres matures à caractère exceptionnel»  et qu’«il est prévu d’ajouter progressivement d’autres arbres remarquables à la nouvelle liste des arbres remarquables».

Il n’y aura jamais trop d’arbres protégés, d’autant qu’ils ne coûtent pas cher à l’État

Blanche Weber se demande toutefois pourquoi la liste de 2008 créée par l’ANF concernant les aides pour l’amélioration de l’environnement naturel ne pourrait pas être intégralement reprise dans la nouvelle loi. «Il n’y aura jamais trop d’arbres protégés, d’autant que les subventions accordées pour leur entretien ne coûtent pas cher à l’État, fait-elle remarquer. Et je ne comprends toujours pas pourquoi on a demandé aux forestiers de n’en sélectionner que deux ou trois…» Le Méco craint notamment que la perte de statut d’un certain nombre d’arbres remarquables ne soit que le prélude de leur abattage dans le cadre de nouveaux projets immobiliers.

L’ANF promet que ce ne sera pas le cas. «Nous sommes conscients du rôle important que jouent les arbres dans le contexte du changement climatique et du déclin général de la biodiversité. Tout est mis en œuvre pour protéger encore mieux les arbres solitaires, que ce soit par le biais de dispositions légales interdisant de les menacer ou d’initiatives telles que le Pacte Nature, qui encourage les communes à en planter de nouveaux et à mettre en œuvre des mesures de protection et de restauration des arbres âgés sur leur territoire.»

Les arbres remarquables font l’objet d’une surveillance particulière. (Photo : archives editpress)

Qui sont ces arbres remarquables?

«Ce sont des arbres isolés, souvent très âgés et de grande dimension, avance Martine Neuberg, responsable du service Forêts de l’administration de la Nature et des Forêts. La plupart d’entre eux font partie des espèces d’arbres indigènes. Ils se trouvent dans les zones urbanisées ou dans les espaces ouverts et jouent un rôle important pour la biodiversité, car ils offrent un abri à une multitude d’animaux, structurent le paysage, réduisent les effets de l’érosion, stockent l’eau, produisent de l’oxygène et fixent le dioxyde de carbone, purifient l’air et contribuent à abaisser la température ambiante, et ce, surtout dans les agglomérations.»

Ce statut d’arbres remarquables leur octroie une surveillance particulière. Ainsi, la loi sur la protection de la nature et des ressources naturelles interdit de les abattre, de les déraciner, de les transférer, de les endommager ou de les détruire «à moins que le ministre ne l’autorise dans un but d’utilité publique ou pour des raisons phytosanitaires», stipule le texte. Seule une expertise reconnaissant le mauvais état de santé ou l’instabilité des arbres concernés peut provoquer une telle décision.

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